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Retraites: gouvernement appelé à remettre l'ouvrage sur le métier

Pour la presse suisse, le conseiller fédéral Alain Berset doit mettre rapidement l'ouvrage sur le métier. © KEYSTONE/PETER SCHNEIDER
Pour la presse suisse, le conseiller fédéral Alain Berset doit mettre rapidement l'ouvrage sur le métier. © KEYSTONE/PETER SCHNEIDER


Publié le 25.09.2017


"Tout est à refaire" estime la presse lundi, au lendemain du "non" à la prévoyance vieillesse 2020, un compromis négocié pendant huit ans. Pointant l'urgence de la situation, les commentateurs jugent que la Suisse n'a pas d'autre choix que de trouver une solution.

Le rejet dimanche du projet de réforme du premier et du deuxième pilier par 52,7% des Suisses "touche à la débâcle". C'est un "fracassant désaveu pour Alain Berset et le Conseil fédéral", affirme La Tribune de Genève. C'est de "l'imprévoyance vieillesse", s'inquiète Le Quotidien Jurassien.

Ce troisième échec en vingt ans d'une réforme des retraites devant le peuple pousse L'Express et L'Impartial à se demander si "la démocratie suisse est capable de mener à bien l'assainissement de la principale assurance sociale du pays, alors même que cet objectif est jugé indispensable par l'ensemble des acteurs politiques et économiques".

Un bazar

Pour Le Quotidien Jurassien, le compromis du ministre de l'intérieur Alain Berset a été coulé par des "vents contraires (...) soufflés par la droite et une frange du patronat ainsi que la gauche revendicatrice. Contradictoires, les arguments de ces alliés improbables ont été entendus (...) L'émotion a triomphé sur la raison".

"Chacun a pensé à lui", en votant sur la prévoyance vieillesse 2020, remarque Le Nouvelliste. "Chacun y a cherché son avantage parce que la réforme était présentée comme un bazar dans lequel, en fouillant bien, tout le monde dénicherait la bonne affaire". Or, à ce jeu-là, chacun a remarqué que "les 45-65 ans ne participaient pas comme les autres à l'effort de guerre, alors que ce sont eux qui ont les moyens", relève le journal valaisan.

Mais "que veut le peuple?", s'interroge pour sa part Le Temps. "Le non des Genevois n'est pas le même que le non des Uranais", remarque le quotidien lémanique, précisant que "les uns ne voulaient pas d'une augmentation d'une année de l'âge de la retraite des femmes, les autres n'ont pas compris cet arrosage de 70 francs de la rente AVS à l'heure où les comptes doivent être consolidés".

Tempus fugit

Le résultat ne va en tout cas pas aider Alain Berset qui doit remettre l'ouvrage sur le métier. "Le besoin de réforme est incontesté. Simple question de vie ou de mort du système des retraites, écrit La Tribune de Genève. Car "le temps presse", remarque Le Temps. "Les comptes de l'AVS sont à l'orange" et "le deuxième pilier ne va pas mieux".

"Les faits sont encore plus têtus que les doctrines politiques ou les politiciens eux-mêmes", rappelle 24 Heures. "La Suisse vieillit inéluctablement. Le déséquilibre entre actifs et retraités va se creuser, comme le trou de l'AVS et la pression sur le 2e pilier. Réformer n'est donc pas une option, mais une obligation. Et chaque année qui passe promet des lendemains qui déchantent".

Pour l'avenir, à l'image de La Liberté, de nombreux commentateurs estiment que "réformer de front les premier et deuxième piliers s'avère illusoire". Si "la retraite à 65 ans pour les femmes ne se fera vraisemblablement pas sans compensation", "le peuple semble (...) ouvert à affecter un peu de TVA supplémentaire au financement de l'AVS", note le quotidien fribourgeois. Quant aux 70 francs de plus sur les nouvelles rentes, ils ne sont plus d'actualité.

Un durcissement

Allant plus loin, le Journal du Jura juge, qu'"au vu de la composition des chambres fédérales", les Suisses peuvent s'attendre à "un sérieux durcissement par rapport au compromis qui était proposé". Pointant une élévation progressive et automatique de l'âge de la retraite à 67 ans comme "une probabilité", la retraite flexible "jetée par-dessus bord" et une baisse du taux de conversion du deuxième pilier, le journal voit une prochaine réforme, "qui promet d'être bien plus douloureuse".

Pour Le Courrier, le nouveau projet devra être appréhendé en matière de répartition des richesses produites. "Depuis la fin des trente glorieuses, une part croissante des richesses produites va au capital et non plus aux revenus du travail. Si cette question n'est pas posée, on passe à côté de la solution", écrit le commentateur. "Mais cela suppose l'inversion d'un rapport de forces, pour l'heure, en défaveur de celles et ceux qui produisent ces richesses", remarque-t-il.

Le Matin estime, lui, que "le blocage politique semble prêt à durer". "Bien malin qui saura relancer un processus de réforme évitant les écueils" de la prévoyance vieillesse 2020, "trop chargée", explique le journal lémanique. "Finalement, le Conseil fédéral devra prendre un jour des mesures urgentes".

Retraite à 67 ans

"Trop compliqué", "surchargé", "avec des impacts difficilement estimables" et "surtout un grand nombre de défauts": la Neue Zuercher Zeitung n'a pas de mots assez durs pour qualifier le projet de réforme qui "cumulait ainsi les motifs de rejet". "Maintenant, la balle est clairement dans le camp bourgeois du Parlement", poursuit le grand quotidien zurichois, qui appelle à ne plus retarder le débat sur le relèvement de l'âge de la retraite.

Même si une multitude d'acteurs, allant de l'UDC à la gauche extrême romande, en passant par les associations économiques alémaniques, ont milité pour le rejet du projet, la responsabilité de l'échec revient avant tout au PLR, qui a mené la contre-campagne, accusent le Tages-Anzeiger et le Bund. "Ceux, à droite et dans les milieux économiques, qui espèrent que le peuple acceptera sous la pression d'une crise financière de l'AVS d'élever l'âge de la retraite à 67 ans, font un calcul cynique et dangereux, car une hausse générale de l'âge de la retraite n'obtiendra pas de majorité dans un proche avenir".

La Luzerner Zeitung et le St. Galler Tagblatt appellent le PDC "à réviser ses idées" pour "débloquer le dossier rapidement". "Le parti du centre s'est, sous la direction de son président Gerhard Pfister, mis à la traîne de la gauche sans nécessité et a imposé un projet, qui n'était à l'évidence pas un compromis solide".

Berset fragilisé

Le Blick voit dans le "non" des citoyens une défaite personnelle pour M. Berset, qui le fragilise. Le ministre socialiste "a tout mis sur la table et a appâté le Parlement avec ruse et tactique, sans tenir compte des partis de droite et des associations économiques", note le journal populaire.

Lui emboîtant le pas, la Basler Zeitung affirme que "c'est une défaite qu'Alain Berset a méritée. Jamais un conseiller fédéral n'a été aussi offensif, pour ne pas dire envahissant".

ats

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