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Ils assument leur discrétion

Page Jeunes - Psychologie • Discrets et prudents, les introvertis sont souvent vus comme des ermites excentriques, mais la vérité est plus complexe et bien moins préoccupante.

Ils assument leur discrétion © Isabelle Clément
Ils assument leur discrétion © Isabelle Clément

Aurélie Bavaud

Publié le 05.02.2016

Temps de lecture estimé : 3 minutes

Ils représentent la moitié de la population. Vous ne les remarquez pas, mais eux voient tout, entendent tout. Ils se terrent dans l’ombre, lors des fêtes les plus animées, n’attendant qu’une chose: filer à l’anglaise et retrouver le confort de leur foyer. Ce sont les introvertis.

Le concept d’extraversion et d’introversion a été développé par Carl Jung dans les années 1920 et a été repris et affiné depuis. Et bien qu’il en existe plusieurs définitions, on peut résumer leur différence par le fait que les extravertis sont «énergisés» par les contacts humains et autres stimuli, tandis que cela épuise les introvertis. Il est cependant important de noter que chaque tempérament a ses propres avantages et inconvénients et que les deux se complètent souvent. Le psychologue Emilio Pitarelli résume: «Nous pourrions dire que les extravertis auraient tendance à être plus sociables, amicaux, impulsifs. Au contraire, les introvertis seraient davantage réservés, réfléchis et prudents.»

Le culte de l’extraversion

Dans nos sociétés occidentales, l’extraversion est devenue un idéal à poursuivre. Et ce, dès l’enfance, où la participation en classe et les travaux de groupes sont encouragés. «Si je dois travailler dans un groupe avec des personnes que je ne connais pas, je parlerai moins», raconte Kimberley Caillet-Bois, 12 ans. Pour Héloïse Coutaz, 20 ans, les oraux sont une véritable épreuve: «Je stresse tellement que je dois tout apprendre par cœur.»

Souvent vue comme un défaut, l’introversion peut compter sur plusieurs ouvrages récents pour lui rendre ses lettres de noblesse. C’est le cas de «La force des discrets», de Susan Cain. Le livre insiste notamment sur l’importance de pousser un introverti hors de sa zone de confort tout en le laissant prendre son temps, car c’est avant tout de la nouveauté qu’il se méfie. «Une fois que j’ai appris à connaître une personne, tout va plus facilement», confirme Luc Gilliéron, 22 ans.

Mais certains parents, pleins de bonnes intentions, poussent leurs rejetons à aller contre leur nature. Ce faisant, explique Emilio Pitarelli, «on peut tomber dans une perspective normative de la personnalité»: on donne le message qu’il faut être comme ceci et non comme cela. Ce qui peut mener une personne à se demander s’il n’y a pas quelque chose qui cloche chez elle.

«Un conseil que nous pourrions donner serait de choisir un environnement qui convient à la personnalité de l’individu», explique le psychologue. «Chacun a besoin de ses moments de calme, précise Luc. Et à ce niveau, je n’ai pas eu de soucis car je suis fils unique et j’ai eu beaucoup de temps seul à la maison.»

Une chose est sûre, les introvertis peuvent avoir une vie sociale tout à fait saine. S’il est vrai que l’on observe chez eux une tendance à la timidité, cela n’est pas systématique. Toujours selon l’ouvrage de Susan Cain, un introverti peut ne pas se sentir bien dans une pièce bondée mais apprécier une conversation dans un endroit plus calme. Plus à l’aise à l’écrit, il pourra aussi se créer des contacts en ligne. Il lui est aussi beaucoup plus facile de s’exprimer quand un sujet le passionne. Au final, pour Emilio Pitarelli, il y a toute une palette de caractères entre «très extraverti» et «très introverti»: «L’important est de pouvoir situer son degré d’introversion ou d’extraversion et d’en tirer les avantages.» 

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