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L’ancêtre d’Halloween, enterré?

Page Jeune - Tradition • Avant la fête de la citrouille régnait Samhain, une grande fête celtique automnale. Aujourd’hui, elle renaît grâce à un mouvement particulier: les néopaïens.

Samhain, un retour aux traditions celtiques. © Lucas Michelot
Samhain, un retour aux traditions celtiques. © Lucas Michelot

Lise-Marie Piller

Publié le 31.10.2014

Temps de lecture estimé : 3 minutes

Attestée en Irlande et en Gaule, Samhain était liée à une symbolique de renaissance par la mort. Comme l’explique Thierry Luginbühl, professeur d’archéologie: «Les trois journées de cette fête constituaient une sorte de porte ouverte sur l’autre monde.» Samhain dut sa survie à la chrétienté, qui en récupéra des éléments pour les intégrer à la Toussaint. Mais l’histoire ne s’arrête pas là, Samhain traverse l’océan: «De nombreux Irlandais ont émigré en Amérique, explique Emeline, 23 ans, passionnée de traditions anciennes. Ils ont emporté avec eux leurs rites. La citrouille a remplacé le navet de Jack O’Lantern.» La fête, «américanisée et popularisée», termine son odyssée en Europe sous le nom d’Halloween.

Rituels dépoussiérés

Cependant, dans la société actuelle, certains s’en souviennent encore: les néopaïens. Kesako? Emeline explique: «Le néopaganisme est un ensemble de croyances et traditions liées à la nature, survivances des civilisations préchrétiennes.» Samhain, les néopaïens la fêtent chaque année. «Je la célèbre à la fois seule et avec des amis, raconte Emeline. Seule, j’aime allumer des bougies, manger des plats de saison comme la célèbre tarte à la courge, aller marcher dans la nature tout simplement, tisser, peut-être faire une petite cérémonie pour me souvenir des ancêtres.»

En groupe, les choses ne sont pas si différentes: «Parfois nous nous racontons des histoires, nous partageons un repas, nous discutons de projets ou de souvenirs. Il nous est arrivé de nous entraîner à reconnaître les étoiles.» Le côté nature est également omniprésent: «Nous avons une clairière où nous aimons allumer un feu, danser, jouer du tambour, ou juste rester assis ensemble et réfléchir. Parfois nous sommes douze, d’autres fois deux», conclut Emeline. Elle tient à préciser que même si les pratiques actuelles ne sont certainement pas les mêmes qu’autrefois, «l’essence reste identique».

Du côté du Banshee’s Lodge, célèbre pub irlandais niché dans la Vieille-Ville fribourgeoise, on se souvient aussi de Samhain. «J’avais, il y a quelques années, organisé la fête de Samhain au Banshee’s, explique Brigitte Mouthon, la patronne du bar. J’avais mis à disposition un texte expliquant les origines de la fête. Certains s’y étaient intéressés, d’autres la connaissaient via les jeux de rôle ou par intérêt pour la mythologie. Mais la grande majorité ne s’y attardait pas vraiment.» Même discours chez Emeline, qui déplore le manque d’enthousiasme des Helvètes: «La Suisse romande est très peu représentée au niveau du paganisme. La francophonie est déjà considérée comme mineure au regard des Anglo-Saxons, et la Suisse est souvent simplement oubliée.»

Elle avoue connaître plus ou moins personnellement une vingtaine de personnes qui se revendiquent du paganisme et qui célèbrent régulièrement Samhain en Romandie. «Il y a beaucoup de cultes néopaïens, wiccans ou néodruidiques qui fêtent Samhain en Grande-Bretagne, mais je ne connais rien de tel en Suisse», confirme Jacques Eltschinger, un autre passionné fribourgeois. Il raconte d’ailleurs avoir vécu en Irlande, pas très loin la colline de Tara et de la tombe de Newgrange, deux lieux imprégnés de tradition celtique. Peut-être un farfadet ou un lutin y apparaîtra-t-il aujourd’hui?

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