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Déjà-vu sur vos écrans

BLOG - Cinéma - Vos soirées-films ont un goût de réchauffé? Ça n’est pas qu’une impression. Trop accroché aux formules sans risques, Hollywood pourrait commencer à lasser.

Sherlock Holmes a été adapté quelque 250 fois. © Aurélie Bavaud/DR
Sherlock Holmes a été adapté quelque 250 fois. © Aurélie Bavaud/DR

Aurélie Bavaud

Publié le 27.02.2015

Temps de lecture estimé : 5 minutes

Il y a un tout petit peu moins de trois semaines, lors des BAFTAs (les «Oscars»britanniques), Anthony McCarten, vainqueur de la meilleure adaptation, blaguait durant son discours de remerciement : «Best unoriginal screenplay» (Meilleur scénario «non-original»), disait-il. De l’autre côté de l’écran, en entendant ça, on rit un peu jaune. En effet, on a parfois l’impression, lorsqu’on parcours les programmes cinéma ces dernières années, d’avoir le droit à pas mal de réchauffé.

Le phénomène n’est pas nouveau, on compte un nombre impressionnant de films qui sont adaptés à partir de romans. Et il existe souvent plusieurs versions des grands classiques. Ce qui peut être une bonne chose: Qui parmi vous n’a pas découvert l’un de ses romans préférés par l’intermédiaire de son adaptation ? D’autant plus qu’aujourd’hui, quand il s’agit de science fiction ou de roman fantastique, les effets spéciaux donnent des résultats bluffants. Sans parler du fait qu’il est rare qu’une adaptation, même d’un grand livre, soit unanimement appréciée par ses fans.

Les vieux classiques des années 1940 ont eu eux aussi droit à leur lot de remakes, avec des succès variables (pourquoi regarder Adam Sandler dans  «Les Aventures de Mr Deeds», quand on peut avoir le légendaire Gary Cooper dans «L'Extravagant Mr. Deeds» ?). Certaines de ces adaptations sont parfois de vraies poupées russes, comme c’est le cas de «Vous avez un mess@ge» de Norah Ephrone, provenant d’un film d’Ernst Lubitsch, «Rendez-vous», lui-même adaptation d’une pièce hongroise. Cela dit, une fois encore ces remakes sont parfois utiles car il peut être difficile de saisir le contexte d’un film produit un demi-siècle plus tôt comme c’est le cas dans le récent «Annie» (qui sort le 25 février en Suisse romande), adaptation moderne d’un film sorti en 1982. Le choix de la jeune Quvenzhané Wallis pour incarner l'héroïne de cette histoire a fait scandale aux Etats-Unis en raison de la peau noire de cette actrice, bien loin du cliché des Irlandais rouquins qui sont au centre de l'intrigue originale. Ce changement est pourtant adéquat lorsque l'on sait que dans les années 1930, période où a originellement lieu l’action, ce sont les Irlandais qui étaient victimes de xénophobie. 

Mais on retrouve aussi au cinéma un nombre incalculable de films qui semblent être, à quelques détails près, la copie conforme d’une production sortie à peine quelques mois plus tôt. Un exemple au hasard : qui n’a pas vu cette année (et l’année précédente, et sûrement l’année d’avant), un film dont le héros est un adolescent ordinaire catapulté dans un monde fantastique où il est l’Élu. Apparement, cela s’expliquerait par la crise, qui a rendu les studios frileux. Ils préférent désormais assurer un revenu plutôt que l’originalité. 

Les séries également sont maintenant victimes de la mode barbante des adaptions depuis la fin des années 1990. Il s’agissait parfois de «bouquet final», après la fin de la série, comme ce fut le cas pour «Firefly» ou «Sex and the City» (mais était-il nécessaire d’en faire un second ?). Mais des séries comme «Starsky et Hutch», «La Famille Adams ou encore «Mission : Impossible», ou la dernière en date, «21 Jump Street», ont aussi été dépoussiérées. Les Français, ne sont d’ailleurs pas en reste, avec «Belphégor» et autres «Brigades du Tigre». Mais le phénomène inverse existe aussi, avec «Fargo», par exemple, qui est en train de se développer sous forme de série. Et il n’y a pas moins de vingt-huit projets du genre en préparation. Attendez-vous à retrouver bientôt sur petit écran cette année «School of Rock», «Marley and Me», «Scream» ou encore «Big». Dans le même genre, on citera bien sûr «Game of Thrones», «Outlander» ou encore «Hannibal» (précédemment adapté au cinéma), qui viennent de séries de livres, se déclinant ainsi aisément en de nombreux épisodes télévisés. A l'inverse «Sleepy Hollow», qui a déjà été adapté par Tim Burton en 1999 (mais aussi en 1949), vient d’une nouvelle de moins de cent pages. Pas grand chose à se mettre sous la dent, donc, mais, cela a le mérite de forcer les scénaristes à faire preuve d’imagination pour combler les blancs et créer quelque chose d’original.

Car il faut tout de même l'avouer,  ces adaptations, reboots ou remakes ne sont pas tous des copies conformes de l’œuvre précédente. Les scénaristes jonglent avec les lieux, les époques et les médias, nous donnant des résultats parfois très intéressants. Mais tout ne se renouvelle pas à l’infini et cette abondance de projets similaires donne un peu le tournis. Et on souhaiterait ne pas avoir cette fâcheuse impression que les grands studios se foutent de nous, notamment avec leurs adaptations paresseuses de best-sellers médiocres, à l’image d’un «50 Shades of Grey» qui montre déjà tous les signes d’un désastre.

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