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Petter Northug, ce provocateur

Coupe du mondeLe fondeur norvégien ne laisse pas indifférent dans son pays. Capable de toutes les frasques, il sera au centre de tous les regards à Lillehammer.

Marcel Hauck, Lillehammer

Publié le 05.12.2014

Temps de lecture estimé : 3 minutes

Ski de fond

Petter Northug sera le centre de l’attention ce week-end aux épreuves de Coupe du monde de Lillehammer. Comment le public norvégien va-t-il accueillir son fantasque nonuple champion du monde, avec lequel il entretient une relation ambivalente, une sorte d’admiration teintée d’indignation eu égard à l’attitude parfois peu respectueuse du skieur?

Selon un récent sondage du journal «Aftenposten», 60% des Norvégiens s’intéressent au ski de fond (contre 43% au football). Et Northug arrive en troisième position des sportifs les plus populaires, derrière Marit Björgen et Therese Johaug, spécialistes de ski de fond elles aussi. La question reste posée de savoir si Northug - le skieur de fond le plus décoré dans l’histoire aux Mondiaux - serait plus starifié encore ou moins s’il n’avait de cesse de faire parler de lui pour ses frasques.

Le sommet avait été atteint à l’arrivée du relais des Mondiaux 2011 à Oslo. Northug avait débordé le Suédois Marcus Hellner dans le finish pour foncer vers le titre, avant de freiner brusquement avant la ligne, franchie ostensiblement au ralenti et presque à reculons, alors que Hellner s’épuisait à revenir (en vain) comme un boulet.

Chambreur

L’homme aime bien se moquer des voisins suédois. Lors d’un sprint, après avoir tenté vainement de dépasser Thobias Fredriksson, il avait déclaré au sujet du Suédois: «Il est à moitié gros, c’est presque impossible de le déborder!» Plus jeune déjà, Northug se plaisait à narguer ses rivaux. Son côté égocentrique et sa façon de montrer mais aussi de dire «je suis le meilleur» tranche avec le caractère plus contenu et toujours très «correct» de la plupart de ses compatriotes, fussent-ils eux aussi de grands champions comme Björn Dählie, Aksel Lund Svindal ou Kjetil Jansrud.

En Norvège, le sport est conçu comme une école d’humilité, qui valorise le travail et enseigne le respect de l’autre. Ainsi, les compétitions scolaires, jusqu’à l’âge de onze ans, ne décernent aucun trophée, mais des médailles identiques pour tous les participants, indépendamment du résultat. Dans ce contexte égalitariste, le comportement d’un Northug tranche radicalement.

Le fondeur a pourtant grandi au sein d’un milieu traditionnel, dans une ferme isolée située à 15 km du village (de 800 âmes) le plus proche. Mais Northug n’aime pas se fondre dans le décor. Il a de nombreux sponsors personnels, et ses intérêts sont parfois contraires à ceux de sa fédération, au point qu’il songerait à quitter le circuit de la Coupe du monde pour s’aligner sur celui des très longues distances, très lucratif.

Condamné à de la prison

Le dernier grand rebondissement en date a bien sûr fait la «une» de tous les quotidiens lorsque, aux petites heures du 4 mai dernier à Trondheim, l’Audi A7 conduite par le champion est allée dans le décor. Northug a quitté les lieux de l’accident pour se réfugier dans une maison voisine, où la police l’a vite retrouvé. Il avait 1,65 pour mille d’alcool dans le sang. Le skieur a mis l’accident sur le compte de son passager - qui a eu la clavicule cassée -, ce qui s’est avéré être une fausse accusation. La justice l’a condamné à 50 jours de prison ferme - à purger probablement à la fin de la saison -, 26 000 francs d’amende, le tout assorti d’un retrait de permis «à vie» (minimum cinq ans).

Mais apparemment, toujours selon un sondage, 69% des Norvégiens lui ont pardonné, après que Northug eut présenté ses excuses. L’homme, aujourd’hui, est motivé à bloc, prêt à de nouveaux exploits. Il a annoncé la couleur le week-end dernier à Kuusamo avec une 2e place sur le sprint. Et les prochains Mondiaux de Falun, au pays de ses meilleurs ennemis les Suédois, ne font qu’aiguiser son ambition… SI

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