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Des mesures pour sauver la filière du bois

Bois Le franc fort soumet la filière de la forêt et du bois à une rude concurrence étrangère. «Scieurs et exploitants doivent tirer à la même corde», selon Gilles Schorderet, président de l’Association fribourgeoise d’économie forestière.

La santé des forêts fribourgeoises pourraient pâtir du manque d'entretien découlant de la chute du prix de vente du bois brut. © Vincent Murith/«La Liberté»
La santé des forêts fribourgeoises pourraient pâtir du manque d'entretien découlant de la chute du prix de vente du bois brut. © Vincent Murith/«La Liberté»
La santé des forêts fribourgeoises pourrait pâtir du manque d’entretien découlant de la chute du prix de vente du bois brut. © Alain Wicht-a
La santé des forêts fribourgeoises pourrait pâtir du manque d’entretien découlant de la chute du prix de vente du bois brut. © Alain Wicht-a

Propos recueillis par Christine Wuillemin

Publié le 03.03.2015

Temps de lecture estimé : 5 minutes

L’abandon soudain du taux plancher par la Banque nationale suisse, en janvier dernier, a frappé de plein fouet toute la filière du bois suisse. Concurrencés par des entreprises étrangères - majoritairement allemandes et autrichiennes - qui proposent des produits de construction jusqu’à 25% moins chers, les scieurs de bois suisse sont contraints de baisser leurs prix de vente. Une pression qu’ils reportent directement sur les propriétaires forestiers en leur soumettant des tarifs moins élevés pour l’achat de leur bois brut.

Pour faire face à cette crise du bois indigène, la filière de la forêt et du bois suisses met en œuvre, depuis fin février, onze mesures de rationalisation et demande à la Confédération de meilleures conditions-cadres. Des dispositions que soutient l’Association fribourgeoise d’économie forestière (AFEF), réunissant les propriétaires fribourgeois de forêts. Le point sur la situation dans le canton de Fribourg avec son président, le député sarinois Gilles Schorderet (udc).

- En quoi le renforcement du franc suisse menace-t-il les forêts fribourgeoises?

Après l’annonce de l’abandon du taux plancher d’un euro à 1,20 franc, le prix du bois brut a immédiatement chuté. Le sapin blanc, que les scieries achetaient entre 90 et 95 francs le m3 aux propriétaires forestiers, se négocie aujourd’hui à environ 75 fr./m3. Même constat pour l’épicéa (bois le plus utilisé dans la construction) dont le prix est passé de 115 ou 120 fr./m3 à 100 fr./m3. Le risque est que les propriétaires forestiers ne veulent plus abattre et vendre leurs arbres. La gestion durable des forêts serait alors remise en question, avec le risque de les voir vieillir et se fragiliser sans coupes régulières. De plus, cela mettrait en danger la survie des scieries qui souffrent déjà de la concurrence étrangère. Scieurs et exploitants doivent tirer à la même corde.

- Que faire pour éviter le manque d’approvisionnement des scieries?

Au sein de l’AFEF, nous incitons nos membres à vendre leur bois aux quelque 16 scieries fribourgeoises malgré les prix d’achat peu avantageux. Cela est parfaitement envisageable pour 60% des propriétaires forestiers qui sont des collectivités publiques (bourgeoisies, communes, corporations). En effet, ces collectivités peuvent se permettre de livrer momentanément du bois sans le rentabiliser, car les coûts d’entretien des forêts sont financés par les impôts. En revanche, le danger plane sur les propriétaires privés qui ne peuvent pas se permettre de baisser leurs prix s’ils veulent continuer à effectuer des coupes.

- Quelles sont les onze mesures prises en février par la filière de la forêt et du bois suisses?

Il y a tout d’abord des mesures internes de rationalisation comme l’intensification de la promotion du bois suisse et fribourgeois auprès des professionnels (charpentiers, architectes), des particuliers et des collectivités publiques, comme pour l’école de Vaulruz ou le futur siège de la police cantonale, à Granges-Paccot. Mais cela ne suffit pas, il est indispensable que la politique et l’administration améliorent les conditions-cadres de la forêt et du bois suisses. Plusieurs interventions parlementaires visant des réductions de charges et de coûts liés à l’économie forestière et à la transformation du bois sont prévues lors de la session de printemps 2015.

- Trois revendications concernent plus particulièrement le canton de Fribourg. Quelles sont-elles?

La première concerne les coûts d’infrastructure. La Confédération avait supprimé l’aide à l’entretien des chemins forestiers. La filière demande aujourd’hui l’extension des subventions fédérales aux dessertes situées également hors des forêts protectrices. Cela permettrait en priorité de remettre en état et d’améliorer la desserte existante sur le territoire fribourgeois, soit environ 1100 km de chemins forestiers.

- Et pour la seconde?

La deuxième mesure vise à favoriser l’utilisation de grues à câbles. Le canton possède un grand potentiel de forêt encore inexploité. Situé essentiellement dans les Préalpes, il est en effet difficile d’accès. Un soutien de la Confédération permettrait d’améliorer fortement l’effet de cet outil déjà en place au niveau cantonal. L’utilisation du câble a l’avantage de mettre à portée de camion des bois provenant de massifs forestiers non desservis par des chemins.

- La dernière mesure touche un secteur qui n’est pas l’exploitation du bois…

Oui, elle demande l’instauration de conditions-cadres pour mettre en valeur d’autres prestations forestières comme l’accueil du public en forêt, la protection des sources d’eau potable ou l’entretien de biotopes. En effet, le public profite de ces prestations, mais ne participe pas aux coûts générés. Ces derniers devraient être inclus dans la péréquation financière.

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