La Liberté

Il tue un sexagénaire par overdose d’héroïne, comme il le lui demandait

Lausanne • C’est une histoire hors du commun entre deux marginaux logés dans le même établissement médico-social psychiatrique. L’un, Claude*, trentenaire, est rentier AI en raison d’une schizophrénie et de consommation de drogues. L’autre, Henri*, sexagénaire, souffre aussi de problèmes personnels et aimerait en finir avec la vie...

C’est à la place de la Riponne que les deux hommes ont acheté les doses d'héroïne. © Keystone (photo prétexte)
C’est à la place de la Riponne que les deux hommes ont acheté les doses d'héroïne. © Keystone (photo prétexte)

Christian Humbert

Publié le 01.09.2014

Temps de lecture estimé : 2 minutes

Henri en a parlé au personnel de l’EMS. Il s’est renseigné sur les associations d’aide au suicide. Et il en a surtout beaucoup débattu avec son copain de chambrée depuis l’automne 2012. Ils ont tissé des liens. Et la pression du sexagénaire est forte: il veut qu’il lui achète une arme. La demande devient pesante, incessante. Mais une mort par coup de feu, c’est douloureux et risqué, conviennent les deux hommes. «Plus doux serait un décès par overdose» suggère Claude.

En mars 2013, Claude, se procure trois doses d’héroïne avec l’argent remis par Henri, un kit d’injection et des sédatifs pour endormir son ami avant de le piquer. Les deux amis acquièrent encore des gants, pour ne pas laisser d’empreintes sur la seringue. Henri loue une chambre dans un hôtel du centre de Lausanne. Claude l’y rejoint.

Le sexagénaire absorbe neuf comprimés du sédatif. Claude prépare et lui injecte une première dose d’héroïne. Il en prend aussi et attend. Mais Henri ne ressent aucun effet et réclame d’autres doses pour être certain de mourir. C’est à la place de la Riponne que les deux hommes les achètent. Retour à l’hôtel.

Dans la deuxième seringue qu’il prépare, Claude met deux doses d’héroïne et les injecte dans le bras d’Henri. Il en consomme aussi. C’est l’overdose: Claude aide son pote Henri à s’allonger sur le lit et quitte la chambre. Claude est conscient qu’Henri va mourir. Il n’alerte pas les secours, par respect pour ses dernières volontés. Henri est retrouvé mort le 12 mars 2013, peu après midi.

Le poids de ce qui s’est joué est trop lourd. Claude finira par raconter l’histoire au personnel de l’EMS psychiatrique, qui alerte la police. Ces derniers jours, le procureur Alexandre Vanzo a conclu son enquête: Claude n’est pas renvoyé devant un tribunal, mais condamné à six mois de prison avec un sursis de trois ans pour «meurtre à la demande de la victime» - un cas très rare - et consommation de stupéfiants. La peine maximale aurait pu être de trois ans.

Pour le procureur, Claude «a fait face à une demande constante et sérieuse de la victime, laquelle en a parlé autour d’elle» et «a cédé à un mobile honorable, par amitié, sans aucune intention égoïste». D’autres éléments ont justifié cette importante atténuation de la peine: son état mental qui diminue fortement sa responsabilité pénale, l’expression de ses remords sincères et le fait qu’il en a parlé autour de lui.

*Prénoms d’emprunt

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