La Liberté

«Cet homme est un Martien»

Agé de 105 ans, le Français Robert Marchand a parcouru 22,528 kilomètres en une heure sur piste

Publié le 05.01.2017

Temps de lecture estimé : 4 minutes

Cyclisme sur piste » Robert Marchand, un cycliste âgé de 105 ans, a réalisé l’exploit de parcourir 22,528 kilomètres en une heure sur piste. Cette performance est assez proche de son précédent record de 26,927 kilomètres, accompli à l’âge de 102 ans. «C’est bien! Je n’ai pas vu l’affiche des dix dernières minutes, sinon j’aurais été un peu plus vite, j’aurais fait mieux», a déclaré le Français, très souriant, juste après la ligne d’arrivée.

Visiblement en forme malgré une douleur au bras due selon lui à des rhumatismes, le vieil homme a dit son intention de «casser la croûte avec tous les copains, tous les amis» pour fêter sa performance. A la question de savoir s’il pensait retenter une telle prouesse à l’âge de 107 ans, il est en revanche resté philosophe. «On met neuf mois pour arriver au monde, et puis on met 30 secondes pour claquer», a-t-il dit à un journaliste.

«C’est phénoménal»

Robert Marchand s’est entraîné pendant six mois pour ce défi, relevé sous les applaudissements de supporters réunis dans le vélodrome de Saint-Quentin-en-Yvelines. Cet habitué des prouesses tardives, qui vit en région parisienne, avait signé le 28 septembre 2012 à Lyon le record du centenaire le plus rapide sur 100 kilomètres à vélo: 4 heures 17 minutes et 27 secondes, soit une moyenne de plus de 23 km/h.

Ceux qui le croisent régulièrement au vélodrome, le pas alerte, ne tarissent pas d’éloges: «C’est un Martien», lance Jean Ridel, jeunot de 84 ans, qui tentera dans un an de s’attaquer au record des plus de 85 ans. «Faut tenir l’équilibre sur le vélo, pouvoir anticiper les virages», c’est «phénoménal» à 105 ans, estime-t-il. Le centenaire a enchaîné les tours de piste sur un léger dénivelé, avec un vélo sur mesure et bardé de capteurs sous son maillot jaune et violet – les couleurs de L’Ardéchoise, populaire course qui organise l’événement avec la Fédération française de cyclisme. A la veille de sa tentative, Robert Marchand estimait pouvoir parcourir 23 ou 24 kilomètres en une heure. «Si je faisais 30, on dirait que j’étais dopé!»

Son secret alors? Il donne quelques pistes: «Toute ma vie j’ai fait du sport», «beaucoup de fruits et légumes», «pas trop de café», «pas de cigarettes», «très peu d’alcool». La physiologiste et professeure d’université Véronique Billat, qui le suit depuis ses 100 ans, complète: «Sa surface corporelle est petite mais il a un cœur qui pulse autant de sang à la minute que celui de quelqu’un de plus grand. Son corps est super-irrigué.» Sa personnalité joue aussi: «Il a une forte détermination, il ne doute pas, il n’a pas peur de tenter des choses.»

Pour Gérard Mistler, président de L’Ardéchoise, Robert Marchand est un «bel exemple pour l’humanité». «Cela aurait été dommage qu’il reste incognito alors qu’il donne beaucoup de joie de vivre aux gens.» Robert Marchand, né le 26 novembre 1911 à Amiens, habite en région parisienne après une vie marquée par les deux conflits mondiaux, la guerre froide et des années à bourlinguer au Venezuela et au Canada.

Comme les pros du Tour

Aux visiteurs de son modeste studio, l’ancien pompier de Paris (entre autres) qui «commence à prendre de la bouteille» n’hésite pas à montrer les exercices d’assouplissement auxquels il se plie tous les matins. Ou à faire une démonstration sur son appareil d’entraînement, le même que les coureurs du Tour de France. «Va moins vite!» lance un copain cycliste, en haussant la voix pour se faire entendre.

Cette ouïe défaillante est l’un des rares maux dont souffre le centenaire, avec un peu de tension (son «seul cachet» quotidien) et des rhumatismes dans les mains, qui le gênent pour tenir le guidon. «Mais les jambes ça va bien», dit-il en pédalant toujours. Des tests ont montré qu’il avait gagné en vélocité, mais perdu en puissance. «Tant pis! Je me contente de la vélocité.»

Sans se départir de son rire, il raconte ressentir depuis peu une forme de «déchéance». Il ne craint pas la mort, assure-t-il, seulement la paralysie. En attendant, il roule. ATS/Reu/AFP

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