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Syrie: le jeu trouble d’Erdogan

Syrie: le jeu trouble d’Erdogan
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Syrie: le jeu trouble d’Erdogan

Paul

Publié le 11.01.2017

Temps de lecture estimé : 2 minutes

Le président turc Erdogan joue actuellement, dans le conflit syrien, un jeu difficile à comprendre. Allié traditionnel des Etats-Unis, ennemi juré de l’Iran, voici qu’il a récemment signé avec la Russie et l’Iran, en l’absence des Etats-Unis, un accord de cessez-le-feu très vacillant en Syrie.

Pour mesurer la portée de ce revirement, revenons sur l’évolution de la position turque dans le conflit syrien. En 2011, au moment de l’éclatement de la guerre civile, Erdogan se veut le champion de la cause sunnite et promet de pourfendre l’alaouite Bachar al-Assad. C’est pourquoi il soutient financièrement et militairement tous les mouvements d’opposition, qu’ils soient composés de musulmans modérés, d’islamistes ou de djihadistes extrêmes comme Jabhat al-Nusra (devenu Jabhat al-Sham). Et, lorsqu’en 2014 Abu Bakr al-Baghdadi proclamait à Mossoul le califat de l’Etat islamique (EI), Erdogan jouait un double jeu, par exemple en fermant les yeux sur la contrebande vers la Turquie du pétrole de l’EI, l’une de ses principales sources de revenus.

Cette politique de soutien plus ou moins clandestin à l’Etat islamique n’empêche pas Erdogan de participer à la grande alliance anti-Daech qui se constitue en 2015. Membre important de l’OTAN, la Turquie pouvait difficilement faire autrement. Cependant, dans sa participation à la lutte anti-terroriste, Erdogan vise en priorité les Kurdes du PKK et non Daech, et les analystes s’accordent à souligner la tiédeur de son entrain à annihiler l’EI.

Pourquoi donc le président turc signe-t-il subitement à Ankara, le 29 décembre, un accord de cessez-le-feu avec Moscou et Téhéran, tous deux proches du régime de Damas, alors qu’il soutenait jusqu’ici tous les groupes d’opposition à Bachar al-Assad? On ne se l’explique pas. En outre, la Turquie participera ce mois de janvier à Astana à des pourparlers de paix avec la Russie et l’Iran. Ses anciens ennemis régionaux deviennent donc ses partenaires dans l’imbroglio syrien. Fin décembre, l’aviation russe est même allée jusqu’à couvrir des bombardements turcs sur des positions de l’EI à al-Bab. Parallèlement et selon le chercheur Charles Lister, la Turquie envoie encore des armes à des groupes comme Ahrar al-Sham (pourtant considéré comme terroriste par la Russie et l’Iran) dans la région d’Idlib.

Clairement, Erdogan n’est pas gêné par les grands écarts, ni par les doubles/triples jeux dans le conflit syrien. Y a-t-il des explications à ces revirements d’alliance de la part du maître d’Ankara? Pour certains experts, une des causes de ces zigzags serait son obsession de la menace kurde. En s’alliant à la Russie et à l’Iran, il éviterait la création d’un grand Kurdistan. Néanmoins, il semble surtout qu’Erdogan n’a pas de politique cohérente et qu’il réagit au coup par coup en tentant d’une manière ou d’une autre de préserver un rôle régional pour la Turquie. Mais à ce jeu le président turc prend aussi beaucoup de risques en multipliant ses ennemis dans la zone moyen-orientale: Daech, les Kurdes, les gülenistes, les kémalistes et même les Etats-Unis.

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