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Une Odyssée romaine sur les bords du Nil

Blog - Critique BD • Fiers dans leurs cuirasses, les membres de l'expédition du centurion Marcus Livius prennent part à une épopée que les dessins de Frusin Marcelo rendent épique. Critique.

En deux tomes, Marazano et Marcelo initient une série de BD qui promet une grande épopée, à la romaine. © DR
En deux tomes, Marazano et Marcelo initient une série de BD qui promet une grande épopée, à la romaine. © DR

Pierre Gumy

Publié le 12.09.2014

Temps de lecture estimé : 3 minutes

Nous sommes en 30 avant Jesus Christ. Toute l'Egypte est occupée par les romains... Toute? Non! Car sur le Nil, une embarcation remplie de richesses transporte un guerrier, mort, venu d'une contrée encore inconnue de la puissante république. Appâtée par les promesses de gloire et de richesses, une escouade de soldats menée par le centurion Marcus Livius s'aventure sur les bords du Nil pour remonter à la source de ce trésor. Mais «l'Expédition», la série de bandes dessinés lancée par le scénariste Richard Marazano et le dessinateur Frusin Marcelo, n'a rien d'une promenade de santé. La discipline romaine est mise à rude épreuve à travers le désert. En chef charismatique, Marcus Livius parvient à mener sa troupe à travers les dunes égyptiennes et pose un pied conquérant dans la dangereuse forêt tropicale subsaharienne. Passant de Charibde à Scylla, ils sont pris dans les tourments de guerres tribales et faits prisonniers. Ils pioches dans une mine d'or, rongeant leur frein et leur fierté en attendant l'occasion de se libérer. Mais la captivité ne sied guère aux romains, ce qui rend la tâche encore plus ardue à Marcus Livius pour mener à bien la «Révolte de Niangara», qui est aussi le nom du deuxième opus de la série, sorti fin août chez Dargaud.

Alors que René Goscinny a raconté avec humour comment quatre garnisons romaines peine à venir à bout d'un irréductible village gaulois, Richard Marazano conte l'histoire épique d'une poignée de soldats qui s'en vont conquérir l'Afrique tout entière. Le tout sans potion magique. Le scénario, qui se déroule dans un univers peu connu, l'antique Afrique noire, est palpitant. Si la trame de l'histoire promet de belles choses, la psychologie des personnages se contente du strict nécessaire pour faire transparaître l'ambiance qui règne parmi ces guerriers avides de sang et de gloire. Les légionnaires qui suivent Marcus Livius n'ont donc rien de charismatiques. Leur caractère est dépourvu de nuances et leurs dialogues servent trop souvent à expliquer l'évidence. En forçant un peu le trait, on aurait pu lire: «Faisons du feu pour se réchauffer» ou encore «Ma gourde est vide, je vais mourir dans le désert!». De plus, l'exercice est superflu puisque les dessins de Frusin Marcelo sont si parlants qu'ils se suffisent à eux-mêmes. Plus le tempérament des protagonistes est singulier, plus Marcelo leur accorde de signes distinctifs. Si parmi la vingtaine de légionnaires la plupart ont des traits effacés, le héros, Marcus Livius, a le regard perçant, la cuirasse ornée d'un lion et un casque à la crinière flamboyante. Impossible de le manquer!

Deux volumes juste pour lancer l'aventure? Une si longue introduction amène cette «Expédition» à se muer en une véritable Odyssée. Marcus Livius, comme Ulysse, brave les dangers et cumule les exploits. Apparemment, l'analogie vaut aussi pour ses compagnons sans visage qui connaîtront le même destin tragique que l'équipage du roi d'Itaques. La trame du scénario se dévoile avec retenue et, lorsque l'épisode de la «Révolte de Niangara» prend fin, l'histoire commence réellement. Maintenant que le lecteur a toutes les cartes en main, on peut espérer que Mazarano fasse de cette série une épopée! 

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