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Société

Jean-Christophe Aeschlimann, un homme kaléidoscopique

Ancien journaliste, Jean-Christophe Aeschlimann a consacré un essai aux relations femmes-hommes.

Jean-Christophe Aeschlimann a notamment été rédacteur en chef du magazine Coopération.

 Stéphanie Schroeter

Stéphanie Schroeter

11 juin 2022 à 19:58

Livre » Un homme de lettres. Sa dernière est adressée à Yaël et Léah. C’est d’ailleurs le nom de son récent essai. Jean-Christophe Aeschlimann y évoque la question des genres, des relations entre femmes et hommes sur fond de développement numérique. «A toute vitesse», peut-on lire sur la couverture. A son image. Celle de sa conversation, de ses pensées, dont le débit est insoupçonnable. Kaléidoscopique, comme il se définit aussi. Eclectique, c’est certain. Car cet ancien rédacteur en chef du magazine Coopération, qui n’aime rien tant que de multiplier les points de vue, reconverti dans la communication d’entreprise, possède des goûts et intérêts plus que diversifiés. Un homme de lettres, amateur de hockey sur glace, qu’il faut suivre donc, à l’instar d’un puck sur une patinoire toute fraîche… 

«J’ai toujours pensé que pour comprendre ce qu’a écrit une personne, il faut la rencontrer.»
Jean-Christophe Aeschlimann

Jean-Christophe, quand avez-vous commencé à écrire?

Le premier livre que j’ai écrit, c’était avec Emmanuel Levinas. J’avais vingt-cinq ans, j’étais étudiant à Genève et je suis allé l’écouter. Je n’ai pas tout compris, mais j’aime parfois ne pas toujours tout comprendre, et j’ai été ébloui par ce grand philosophe. J’ai ensuite pris ma plus belle plume et je lui ai écrit. Il nous a reçus, avec un ami, à Paris, et c’était extraordinaire. J’ai toujours pensé, et c’était également valable par la suite dans ma vie de journaliste, que pour comprendre ce qu’a écrit une personne, il faut la rencontrer. J’ai ensuite fait la même chose avec Paul Ricœur.

Votre dernier livre, quelle est sa finalité?

Explorer tant soit peu le mystère et le secret, merveilleux, insondables et éternels, des relations entretenues par l’homme et la femme, relations à l’origine de tout et qui sont probablement la chose la plus importante qui soit. J’ai longuement parlé, au fil d’entretiens menés sur trois ans, avec une psychanalyste freudienne établie à New York, qui observe, depuis plusieurs années, l’évolution des relations entre hommes et femmes mais aussi les relations au corps, soumis à toutes sortes de révolutions dans le basculement numérique que nous sommes en train de vivre. C’est elle que j’appelle, dans le livre, Eliza Upchink ou la voix, car elle ne souhaitait pas apparaître sous son vrai nom. Le genre, aujourd’hui souvent remis en cause, pose de nombreuses questions, qui en entraînent d’autres sur les relations et l’identité. Car «si une femme sur deux est une femme», comme disait Groucho Marx, la différence sexuelle, elle, existe. Tout cela est adressé sous forme de lettre, un message à deux jeunes filles en référence à un siècle qui se féminise. Le livre comporte une cinquantaine de petits chapitres évoquant aussi bien le fantasme que le désir et la pulsion et ce qui les distingue (il détaille son propos en citant notamment Freud, ndlr).

Famille

Né le 6 février. A grandi à Bienne auprès de ses parents Michèle et Samuel, industriel. Aîné de deux frères. Marié à Denise. Deux filles: Salomé et Noémie. Habite à Bâle et Verbier.

Hobbies

Ski, musique, histoire et hockey sur glace. 

Formation

A étudié la littérature et l’histoire à Genève. A notamment été rédacteur en chef du magazine Coopération. Travaille actuellement dans la communication d’entreprise. A écrit plusieurs livres dont Répondre d’autrui – Emmanuel Levinas ou L’Océan des émotions, Fragments.

Vous affectionnez particulièrement les citations, non?

Oui, surtout si elles sont drôles…

Les utiliser, c’est aussi pour cacher ce que vous pensez?

Non, car les citations que j’utilise représentent ce que je pense.

Vous pourriez avoir les vôtres, non?

Il y en a plusieurs dans mon livre. Vous pouvez d’ailleurs me citer (nous rions), ça me fera plaisir. Et écrire, c’est aussi se citer soi-même, non?

Vous mettez souvent en exergue des contradictions dans votre essai. Et les vôtres, quelles sont-elles?

Je n’en manque pas. En tant que Suisses, nous sommes déjà dans un contexte culturel un peu contradictoire, car ce pays est constitué de langues différentes. Comme Biennois d’origine, je comprends et me sens aussi proche de Genève que de Zurich. Mais je ne cache pas que j’aime l’idée des empires et des constructions complexes comportant plusieurs nationalités et religions. L’autre contradiction qui m’habite est celle qui existe entre l’homme que j’essaie d’être et la femme. On ne comprend rien à ce que dit l’autre (l’auteure de ces lignes rit, ndlr). C’est justement ce qui fait le charme, on n’y comprend rien alors on est attiré par l’autre. C’est un des plus beaux cadeaux de la vie.

«Je suis en quête d’intensité.»
Jean-Christophe Aeschlimann 

Ecrire, c’est un besoin?

C’est peut-être essayer de comprendre ce qu’on dit soi-même. C’est entreprendre des voyages par la pensée dans divers univers. Et j’aime le fait de pouvoir les partager.

Vous écrivez aussi sur le hockey sur glace…

Ce sport est fascinant, magique. Il concrétise l’imprévisibilité absolue du présent, ses déchirures soudaines, et j’adore ça car je suis en quête d’intensité.

L’écriture pour vous, c’est aussi une façon de lutter contre la banalité du quotidien?

Sans doute, un peu, oui. La banalité du mal, comme disait Hannah Arendt.

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