Un chat dans ses bottes-château
L’Opéra des champs poursuit sa création et planche sur son visuel et ses supports graphiques
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Elisabeth Haas
18 mars 2021 à 02:01
Série art lyrique (2) » Une création lyrique n’existerait pas sans toutes les personnes actives dans l’ombre, qu’on n’imagine pas forcément quand on voit les chanteurs sur scène. L’affiche par exemple, en tout cas pour L’Opéra des champs, est elle-même le résultat d’une réflexion et d’un travail artistiques. Rien n’est laissé au hasard: le visuel sert à défendre une idée, laisse deviner une orientation artistique, définit l’image d’un projet encore à l’état de gestation.
Son importance n’échappe pas à Jérôme Maradan, qui aime soigner les détails. C’est le premier élément auquel le directeur artistique s’attelle, avant de se lancer dans la production scénique. Et dans ce domaine aussi, le metteur en scène cultive les fidélités. «Yannik Rossier a créé toutes les affiches de L’Opéra des champs, sauf une», sourit Jérôme Maradan, qui fait à nouveau confiance au graphiste de Pont-la-Ville. Mais pour son nouvel opéra, Le Chat botté, qui s’adressera au printemps 2022 aux enfants, un nouveau venu a rejoint l’équipe: l’illustrateur jurassien Gautier Rebetez. Des affiches illustrées? L’idée ravit Jérôme Maradan: «Je trouvais que sa technique de collage allait bien avec l’univers de l’enfance.» Il cite notamment ses Citadelles, au stylo noir, dont les motifs l’ont marqué.
Sur le modèle du teasing
Le premier rendez-vous est pris par visioconférence début février. Le metteur en scène plante le décor: «C’est la première fois que nous faisons un spectacle pour enfants. Une création.» Il montre l’évolution des affiches de L’Opéra des champs. Il tient au noir et blanc, avec une troisième couleur. Le rouge s’était imposé jusqu’ici, mais Jérôme Maradan est prêt à faire un pas de côté: «C’est imaginable de casser le code couleurs, tout en gardant une ligne sobre. Je ne veux pas d’affiche en couleurs, insiste-t-il. Il faudra sortir les rames pour me convaincre de faire de la quadrichromie, mais vous pouvez essayer.»
«Est-ce qu’il faut que l’affiche tape dans l’œil des enfants?» interroge Gautier Rebetez. «Oui, mais je ne veux pas de chat portant des bottes. Eventuellement qu’on voie des bottes, une queue ou des moustaches, je trouverais intéressant qu’il y ait un jeu de devinettes.» C’est que les affiches placardées au format «mondial» n’apparaîtront dans les rues bulloises et fribourgeoises que dans un second temps. L’Opéra des champs commencera en principe sa communication avec la première «amorce», dans les programmes de saison du théâtre La Malice et de la salle CO2, qui soutiennent conjointement ce projet de création. La compagnie édite également un marque-page, des flyers et des affiches au format A4. De quoi susciter progressivement l’intérêt du public, sur le modèle du teasing, et éventuellement imaginer une déclinaison de motifs. «Nous pouvons imaginer différents niveaux, dévoiler des choses au fur et à mesure des supports jusqu’au visuel final», propose Yannik Rossier.
Durant ce premier échange, Gautier Rebetez est prêt à partir de cette idée de «puzzle», qui résonne avec son goût du collage. Mais Jérôme Maradan nuance: «Il faut que les visuels aient du sens en eux-mêmes. Qu’ils soient percutants, compréhensibles et cohérents. Il ne faudrait pas que ce soit un rébus.» D’autant que les enfants doivent pouvoir saisir que le spectacle s’adresse à eux, même s’ils ne lisent pas encore.
A affiner?
Fin février, le dessinateur arrive déjà avec des premières ébauches, discutées à trois débuts mars durant une nouvelle réunion Zoom. Le mélange de dessin et de découpage, le caractère «espiègle et malicieux» du chat visent la bonne direction. Gautier Rebetez a tenté de remplacer le rouge habituel de L’Opéra des champs par du jaune doré, qui fait ressortir les yeux et la couronne. Il a imaginé un chat dans des «bottes-château». L’idée botte le metteur en scène, c’est le cas de le dire. Mais à ce stade, l’illustrateur doit revoir sa copie, le château semble bien identifiable par un enfant, moins le contour des bottes. Yannik Rossier propose de creuser dans ce sens, en accentuant le talon et la semelle.
L’illustrateur s’engage à dessiner un château moins symétrique, aux contours plus accidentés, avec des tourelles par exemple. Jérôme Maradan de son côté testera le succès des images auprès de son entourage et du comité de L’Opéra des champs. La troisième réunion est une discussion de détails, sur l’épaisseur de la semelle blanche, la visibilité des tours, le caractère plus ou moins «massif» ou «stable» du château-bottes comme on le voit ci-contre. Il apparaît que les bottes sautent aux yeux, avant que, dans une deuxième «couche de lecture», le château ne se laisse deviner. A affiner?
Yannik Rossier planchera sur la typographie en attendant les dernières améliorations du dessin. Il faudra attendre fin mars, voire avril, pour un projet abouti et le premier teaser à voir, espérons-le, sur les marque-pages et dans les programmes des saisons 2021-2022 de La Malice et de la salle CO2…
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