Logo

Politique

Grande-Bretagne. Loi sur l'aide à mourir: oui des députés britanniques

Les députés britanniques ont approuvé vendredi en première lecture lors d'un vote historique la légalisation d'une aide à mourir pour certains malades en phase terminale, à l'issue d'un débat chargé d'émotion.

Malgré les protestations devant le Parlement vendredi, la Chambre a adopté en première lecture la loi sur l'aide à mourir.KEYSTONE/AP/Alberto Pezzali

ATS
AFP

ATS et AFP

29 novembre 2024 à 15:40, mis à jour à 16:32

Temps de lecture : 1 min

Le projet de loi, qui a mobilisé les parlementaires au-delà des clivages politiques classiques, devra encore franchir plusieurs étapes au Parlement avant son adoption définitive.

Mais neuf ans après le rejet d'un précédent texte par la chambre des Communes, les députés se sont cette fois alignés à 330 voix pour (275 contre) sur le soutien croissant de la population britannique envers la légalisation du suicide assisté, après presque cinq heures de débat.

La députée travailliste Kim Leadbeater qui portait la proposition de loi avait déclaré avant le vote que son texte, qui concerne l'Angleterre et le Pays de Galles, donnerait "le choix, l'autonomie et la dignité" aux adultes en phase terminale d'une maladie, n'ayant que six mois ou moins à vivre. Elle a souligné qu'il était encadré par des "critères très stricts".

Selon le texte, les malades devront être capables d'exprimer un choix éclairé et de prendre eux-mêmes la substance provoquant leur décès. Deux médecins et un juge devront donner leur accord.

Sondage pour, manif contre

Le premier ministre Keir Starmer, qui ne s'était pas exprimé jusqu'ici, a voté en faveur du texte, comme lors du précédent vote de 2015.

Selon un récent sondage YouGov, les trois quarts des habitants d'Angleterre et du Pays de Galles soutiennent ce changement de loi.

Des dizaines de partisans et opposants au texte s'étaient rassemblés vendredi devant le Parlement.

A l'issue du vote, l'ancienne présentatrice vedette de la BBC Esther Rantzen, atteinte d'un cancer en phase terminale et qui avait contribué à relancer le débat sur le suicide assisté, s'est dite "absolument ravie".

L'association Care Not Killing, opposée au suicide assisté, s'est dite elle "déçue", dans un communiqué, tout en soulignant un résultat "extrêmement serré".

Questionnements éthiques

Actuellement, le suicide assisté est illégal et fait encourir une peine de 14 ans de prison en cas d'aide ou d'incitation.

La loi actuelle "n'est pas claire et ne protège pas les malades, les familles et le personnel de santé, ce qui pousse les gens à des actions désespérées", a défendu Kim Leadbeater, durant ce débat lourd en questionnements éthiques.

Nombreux ont évoqué, parfois au bord des larmes, l'expérience d'un proche pour appuyer leur soutien ou leur opposition au texte.

Kim Leadbeater a ainsi raconté l'histoire de Norman, un homme atteint d'un cancer de la prostate pendant 15 ans: "quand la maladie s'est répandue et que la douleur n'était plus supportable (...), il est allé dans son jardin et s'est tiré une balle dans la tête".

Depuis plusieurs semaines, la perspective du vote a soulevé un débat sur des fondements éthiques, financiers et religieux.

Une trentaine de chefs spirituels avaient fait part de leur "profonde préoccupation", s'inquiétant que les personnes fragiles ressentent un "devoir de mourir" pour soulager leurs proches.

"Comment peut-on garantir qu'une personne âgée dans une maison de retraite, à qui on a donné six mois à vivre, ne se dira pas: 'je suis un fardeau (...) si je mets fin à mes jours maintenant, ma famille pourra économiser 25'000 à 55'000 livres'?", s'est interrogé Richard Burgon, un député indépendant.

Plutôt qu'une aide à mourir, de nombreux opposants ont réclamé un meilleur financement des soins palliatifs, alors que le système public de santé traverse une profonde crise.

"Garanties et protections"

Kim Leadbeater a assuré que ce texte de loi contenait "les garanties et protections les plus solides au monde", et n'avait "rien à voir" avec ceux du Canada ou de la Belgique, des pays où les critères sont beaucoup plus larges.

Même si ce texte émane de ses rangs, le parti travailliste au pouvoir n'avait pas donné de consigne, et le gouvernement avait demandé à ses ministres de rester discrets sur leur vote.

Le texte doit désormais être examiné en commission, avant d'être à nouveau soumis à l'approbation des deux chambres du Parlement britannique.

L'Ecosse, qui dispose de pouvoirs délégués en matière de santé, doit voter sur son propre projet de loi en 2025. L'Ile de Man examine également un texte, tandis que Jersey, autre île anglo-normande, a validé la préparation d'une loi d'ici à 2027.