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Guide de l'Euro: le soyeux frisé et le supplice romain

Chaque lendemain de match, nos spécialistes football vous concoctent un résumé des points cruciaux des rencontres de la veille, et vous mettent en appétit avant ceux du jour, histoire de ne pas être perdu dans les discussions à la machine à café ou autour d’un apéro.

Jérémy Rico

Publié le 17.06.2021

Temps de lecture estimé : 6 minutes

Ce qu’il ne fallait pas louper

 

Soyons bons joueurs. Plutôt que de pointer les errances individuelles des Suisses, ce que Pierre Schouwey fait d’ailleurs très bien ici, soulignons LA prestation qu’il ne fallait pas louper hier: celle de Manuel Locatelli. Le joueur de l’AS Sassuolo, bon 8e du championnat italien cette saison, a d’abord été impressionnant sur le premier but italien. Oui, oui, c’est lui qui lance en une touche de balle son coéquipier en club Domenico Berardi avant d’avaler 60 mètres pour conclure dans le but vide. Changement de registre: c’est ensuite avec un calme olympien qu’il a planté Yann Sommer dans le gazon romain d’une frappe pied gauche depuis l’entrée de la surface. Un doublé, une ovation debout du public comme de ses coéquipiers à sa sortie à la 86e minute et un prix d’homme du match: que demander de mieux?

Et dire que Manuel Locatelli ne doit ses deux titularisations qu’à l’absence de Marco Verratti, habituel maître de l’entre-jeu italien dont le retour au jeu est annoncé imminent. Roberto Mancini tentera-t-il d’associer le «petit hibou» parisien et le grand frisé dans l’entre-jeu de la Nazionale? L’idée semble en tout cas germer dans la tête de Leonardo. Les rumeurs font en effet état d’un intérêt du directeur sportif parisien pour l’une des révélations de ce début d’Euro.

 

Ce que vous avez bien fait de louper

 

15h hier, l’heure de la sieste, pas un nuage dans le ciel fribourgeois. Ne mentez pas: au coup d’envoi de Russie – Finlande, vous étiez soit sur une terrasse, soit en pleine réunion professionnelle. Et vous avez bien fait. Cette rencontre – l’affiche la moins alléchante de cet Euro? –  n’a pas franchement fait de publicité au football. Un but finlandais annulé en tout début de rencontre pour un léger hors-jeu, des imprécisions, des duels physiques, un joli but (appréciez la rapidité de l’enchaînement contrôle – frappe) dans les arrêts de jeu de la première mi-temps, des imprécisions, des joueurs cuits, des duels physiques, et retour au vestiaire. Score final: victoire 1-0 de la Russie, qui relance la course à la deuxième place dans ce groupe promis à la Belgique. Même Vladimir Poutine, bien trop occupé à Genève, n’a pas regardé ce match. Et il a bien fait.

 

Ce dont vous allez entendre parler

 

Pas besoin d’être un grand sorcier pour deviner ce dont vous allez entendre parler toute la journée: la défaite de la Suisse évidemment. Défaite? Seulement? Ah! Non! C’est un peu court, jeune homme! Outre les classiques «naufrage», «désastre» et «déroute», accordons une mention spéciale à notre journaliste Pierre Schouwey et à son «supplice romain», bien plus évocateur. Âmes sensibles, s’abstenir de rechercher cette formule sur Google.

Vous en voulez d’autres? Et bien il n’y en a pas tellement. Et c’est peut-être ça le plus révélateur: la presse romande, à l’image de Lionel Pittet dans Le Temps, voit dans la défaite d’hier une preuve des limites de la sélection suisse plutôt qu’un simple passage à vide. Alors que la Nati clame depuis plusieurs tournois continentaux ou mondiaux qu’elle fait partie de la cour des grands, ses insuffisances d’hier la renvoie à son véritable reflet: celui d’une équipe de seconds couteaux européens, encore trop bien justes pour prétendre manger à la table des tout grands. De là à quitter cet Euro lors de la phase de groupes? N’oublions pas qu’une victoire face à la Turquie offrira certainement une place en 8e de finale à la Suisse. Et une occasion de me faire mentir.

 

Ce que vous pourrez ressortir à l’apéro

 

Les plus rabat-joie aiment bien le rappeler, surtout lorsque le programme télé du soir leur est imposé par un fan de football: dans le monde du ballon rond, l’argent est roi. Ah oui? Alors parlons fric et valeur marchande. Ne nous attardons pas sur l’équipe la plus chère (L’Angleterre, et sa valeur marchande cumulée d’1,37 milliards de francs), ni sur le joueur à la plus forte valeur marchande (Kylian Mbappé, 174 millions de francs) pour s’intéresser aux petits, ceux dont personne ne connaît le nom et qui font la poésie de cet Euro.

Pour 109’000 francs, vous pouvez ainsi vous offrir le joueur le moins cher de cette compétition. Krste Velkoski, puisque c’est son nom, est un honnête attaquant de la Macédoine du Nord. Il n’a pas joué lors de la première rencontre des rouges et jaune, mais pourrait faire son entrée en fin d’après-midi face à l’Ukraine. A 33 ans, le Macédonien arrive en tout cas au terme d’une carrière exotique qui l’a vu passer par les championnats roumains, chypriotes, thaïlandais et coréens. Il fait actuellement les beaux jours du FK Sarajevo, vice-champion de Bosnie.

David Marshall, victime du lob génial de Patrik Schick lors de la première journée, a fait le bonheur des internautes avec ce saut de cabri. Keystone

Vous préférez miser sur des titulaires? Vous avez le choix entre deux joueurs, estimés à 272’000 francs chacun. Aux buts d’abord, je vous présente David Marshall. Le vétéran de 36 ans a gardé la cage écossaise face à la République tchèque (bonjour Patrik Schick) et peut se targuer d’une belle carrière, d’abord au Celtic Glasgow puis dans le championnat anglais. Il évoluait cette saison à Derby County en 2e division anglaise. Vous êtes plutôt joueur de champ? Alors misez sur Tim Sparv, 34 ans, milieu défensif de la Finlande. Formé en partie à Southampton, en Angleterre, le Finlandais a ensuite bourlingué en Suède, en Allemagne, aux Pays-Bas, au Danemark, et en Grèce. Et vous voulez une bonne nouvelle? Son contrat avec l’AE Larissa, en Grèce, arrive à échéance à la fin du mois. Un joueur de l’Euro gratuit, alors, on dit toujours que le football est affaire de gros sous?


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