La Russie et la diagonale du foot

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Éditorial

La Russie sera dès jeudi l’épicentre de la planète foot pendant un mois. Vladimir Poutine ne pouvait rêver meilleure vitrine pour exposer à la face du monde la grandeur retrouvée du pays. Rien à voir avec l’équipe nationale russe qui a très peu de chance de remporter la Coupe du monde, même si le ­président lui en donnait l’ordre. Peu importe le résultat de toute ­façon, puisqu’il est couru d’avance, comme à l’élection présidentielle: Poutine sortira vainqueur de la compétition, sauf accroc majeur (boycott, attentat, hooliganisme…).

Cet adepte du «soft-power sportif» va braquer les projecteurs sur «sa Russie», moderne et diverse, à travers les onze villes-hôtes. Bienvenue dans ses villages Potemkine! Mais cette Coupe du monde offre surtout l’occasion de (re)découvrir une réalité négligée, à l’ombre du leader: une richesse culturelle, ethnique et géographique qui a forgé une civilisation millénaire. A force de traiter la Russie à travers le prisme poutinien, nous en oublierions presque ses 144 millions d’habitants. Qui sont les Russes? Des barbares assoiffés de conquêtes et de vodka, quand ils ne se battent contre des ours à mains nues? Des patriotes attachés à un Etat fort qui votent les yeux ­fermés pour le sauveur de la nation? Une chose est sûre: ce pays est tellement immense et complexe qu’il nous échappe. D’ailleurs, ses connaisseurs ne se privent pas de ­reprocher aux médias occidentaux une vision unilatérale, biaisée, pour ne pas dire russophobe.

Devant ce fossé d’incompréhension entre Russes et Européens, La Liberté tente de lancer une passerelle. Cette édition spéciale est consacrée à la Russie et aux Russes d’ici et là-bas. Intellectuels, sportifs, artistes, ­expatriés nous parlent de «leur» pays. Loin du vacarme des jets Sukhoi Su-22 en Syrie, des vociférations des pontes du Kremlin, des cris des Femen, il vaut la peine d’écouter les Russes, pour peu qu’on tende l’oreille. Ils ont des choses à dire. Thierry Jacolet