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A Zurich, ils luttent contre l'exploitation animale avec des coeurs

Les militants antispécistes se réunissent chaque vendredi devant l'abattoir de Zurich. © Jamani Caillet
Les militants antispécistes se réunissent chaque vendredi devant l'abattoir de Zurich. © Jamani Caillet
Ils attendent les camions qui transportent les animaux avec des coeurs et du café. © Jamani Caillet
Ils attendent les camions qui transportent les animaux avec des coeurs et du café. © Jamani Caillet
Objectif: pouvoir observer et filmer les animaux sous les bâches. Les vidéos sont ensuite diffusées sur les réseaux sociaux. © Jamani Caillet
Objectif: pouvoir observer et filmer les animaux sous les bâches. Les vidéos sont ensuite diffusées sur les réseaux sociaux. © Jamani Caillet
Les activistes filment avec leur téléphone ou utilisent des caméras équipées de lampes spéciales pour ne pas effrayer les animaux. © Jamani Caillet
Les activistes filment avec leur téléphone ou utilisent des caméras équipées de lampes spéciales pour ne pas effrayer les animaux. © Jamani Caillet
Silvano Lieger (le bras levé), 28 ans, a mis sur pied les veillées zurichoises. © Jamani Caillet
Silvano Lieger (le bras levé), 28 ans, a mis sur pied les veillées zurichoises. © Jamani Caillet


Publié le 24.03.2019


Pour protester contre l'exploitation animale, des militants antispécistes organisent chaque vendredi une veillée devant l'abattoir d'Altstetten à Zurich, l'un des plus grands de Suisse. Une approche douce qui tranche avec les méthodes musclées des activistes romands.

"Camion! Camion!": à chaque fois qu'un véhicule franchit le portail, c'est le même rituel. Réunis dans l'enceinte de l'abattoir, des militants en gilet jaune se placent en ligne devant les phares, font le signe de la paix et brandissent des pancartes avec des coeurs.

L'un d'entre eux est ensuite envoyé pour parlementer avec le chauffeur et lui demander s'il est d'accord de s'arrêter durant trois minutes en échange de café et de gâteaux véganes. Objectif: pouvoir observer et filmer les animaux sous les bâches.

Document la réalité

"Nous voulons documenter la réalité, montrer ce qu'il y a derrière la pièce de viande que l'on achète au supermarché", explique Silvano Lieger, l'un des organisateurs. Les vidéos sont ensuite diffusées sur les réseaux sociaux.

Il est 05h00 et derrière les vitres de l'abattoir, on aperçoit les employés en blanc déjà occupés à découper des carcasses. Ce vendredi de mars, une cinquantaine de personnes sont venues signaler leur opposition à cette industrie, malgré l'heure matinale, le froid et la pluie. Des familles avec enfants sont là. "La moitié des participants sont des nouveaux", constate Silvano Lieger.

Les quatre premiers chargements continuent leur chemin. Vers 06h00, les efforts des militants sont finalement récompensés. Un jeune camionneur accepte de couper son moteur. Pas de café, merci. Le sourire aux lèvres, il allume tranquillement une cigarette dans l'habitacle en remplissant des papiers.

Dans le calme, les activistes déploient trois échelles contre le flanc du véhicule et grimpent dessus les uns après les autres, qui pour filmer les animaux - à l'aide de lampes spéciales pour ne pas les effrayer - qui pour simplement les regarder. A l'intérieur de la remorque, trois veaux bruns attendent la mort. Encore trois chauffeurs s'arrêteront d'ici la fin de l'opération vers 08h00.

"Certains chauffeurs nous remercient"

Une partie des chauffeurs sont les éleveurs eux-mêmes, mais la plupart sont employés par des entreprises spécialisées dans le transport d'animaux. Ils les collectent dans différentes exploitations et les conduisent à l'abattoir.

"On finit par connaître un peu les chauffeurs", confie Silvano Lieger. "Certains nous remercient, car ils n'aiment pas forcément ce travail. D'autres sont moins réceptifs. L'important, c'est de ne pas les forcer. S'ils disent non, c'est non." L'anonymat est garanti. Les chauffeurs et les plaques d'immatriculation ne sont pas filmés.

Soucieux de rester dans la légalité, Silvano Lieger a obtenu l'accord de l'abattoir pour effectuer ces veillées. Ses responsables viennent toutefois de révoquer l'autorisation.

Après la diffusion d'un reportage à la télévision alémanique SRF le 6 mars dernier, l'abattoir a été submergé de coups de fil, certains injurieux, a indiqué le directeur Hans Rudolf Hofer à Keystone-ATS. "Les conditions d'une manifestation pacifique ne sont plus remplies." Silvano Lieger dit vouloir continuer à faire des veillées à l'extérieur de l'abattoir, en insistant sur le fait qu'il prône la non-violence, le dialogue et le respect mutuel.

Ancien publicitaire

Agé de 28 ans, le Zurichois a effectué sa première veillée au Canada - "une expérience transformative" - lors de deux mois passés à faire de l'activisme en Amérique du Nord. Il travaillait auparavant dans la publicité, mais s'est dit un beau jour qu'il n'était pas venu au monde pour vendre de la bière.

Se demandant constamment quelle est la méthode la plus efficace pour arriver à ses fins - l'abolition de l'exploitation animale - il rejoint le Save Movement, un réseau international visant à témoigner de la souffrance animale, et met sur pied les veillées zurichoises. La première a lieu le 6 août 2018.

Mais le jeune homme ne s'est pas arrêté à la ville de la Limmat. Il a étendu le mouvement à d'autres villes suisses. Des actions similaires ont désormais lieu à Bâle, Lucerne, Schwyz, St-Gall, Oensingen (SO) et Thoune (BE). Et bientôt en Suisse romande, promet Silvano Lieger. Reste à savoir si la sauce va prendre de ce côté-ci de la Sarine.

Romands plus radicaux

Les antispécistes romands et alémaniques fonctionnent en effet différemment. Le mouvement romand est plus radical. Les nombreuses vitrines de boucheries et de restaurants caillassées l'an dernier en témoignent, tout comme les occupations illégales d'abattoirs ou les libérations d'animaux qui se sont produites en Suisse romande.

En vue de bâtir des ponts entre les organisations antispécistes et animalistes de toute la Suisse, mais aussi de l'étranger, une nouvelle plateforme va être lancée en mai par Silvano Lieger et Sophie Benker, une militante zurichoise. Le but est de donner des outils à ceux qui veulent s'engager. Son nom? Those Who Love Peace. Ceux qui aiment la paix.

ats

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