La Liberté

Aiguilleur du ciel condamné à des jours-amende avec sursis

L'employé de Skyguide avait donné le feu vert quasi simultané à deux décollages sur deux pistes se croisant. © KEYSTONE/ENNIO LEANZA
L'employé de Skyguide avait donné le feu vert quasi simultané à deux décollages sur deux pistes se croisant. © KEYSTONE/ENNIO LEANZA


Publié le 12.12.2018


Un contrôleur aérien de Skyguide qui avait été acquitté en première instance a été condamné mercredi en appel suite à une collision évitée de justesse entre deux avions de Swiss en mars 2011 à l'aéroport de Zurich. Il écope de 90 jours-amende à 210 francs avec sursis.

Le Tribunal cantonal de Zurich a reconnu l'homme de 36 ans coupable d'entrave à la circulation publique par négligence. La durée de la période probatoire est de deux ans.

L'aiguilleur du ciel avait donné le feu vert quasi simultané à deux décollages sur deux pistes se croisant. Les deux Airbus en question transportaient 260 passagers au total.

L'un des pilotes s'était rendu compte du danger et avait spontanément interrompu le démarrage de l'appareil. Le contrôleur aérien avait aussitôt ordonné une interruption de décollage, mais seulement après qu'une alarme s'était déclenchée. L'équipage du second avion, qui a lui décollé comme prévu, ne s'était rendu compte de rien.

Vue d'ensemble perdue des yeux

L'accusé a déclaré durant le procès qu'il avait perdu des yeux durant un court instant la vue d'ensemble, car il s'occupait de vols techniques - dits "de mesure" - en attente. "Il y a toutefois un devoir de surveillance permanente", a considéré le juge. Un contrôleur aérien doit en tous temps conserver une vue d'ensemble. Il a mal fixé ses priorités.

Pour le tribunal, le drame n'a pu être évité que grâce au pilote qui a vu l'autre avion s'approcher par la fenêtre du cockpit. La peine infligée est toutefois en deçà de celle exigée par le Ministère public, qui réclamait 180 jours-amende.

Plusieurs circonstances atténuantes ont été retenues. Parmi elles figure la charge de travail élevée à laquelle était confronté l'aiguilleur du ciel. Il était en service depuis de nombreuses heures. En outre, l'ergonomie de sa place de travail n'était pas optimale et le système d'alarme défaillant.

Compréhension du juge

Le juge a exprimé de la compréhension. Il s'est dit conscient que le contrôle aérien est une activité "extrêmement exigeante". Mais étant donné que même de petites erreurs peuvent conduire à des catastrophes, des actions dangereuses doivent être punies même si elles sont commises par négligence. Des règles similaires valent par exemple pour la construction.

En première instance, le Tribunal de district de Bülach (ZH) n'avait pas été du même avis. Il avait suivi la défense qui demandait l'acquittement. La Cour avait estimé que le prévenu ne pouvait pas être condamné pour un fait qui ne s'est pas réalisé concrètement.

Ce deuxième jugement n'est pas encore entré en force. Il peut faire l'objet d'un recours auprès du Tribunal fédéral.

Critiques de Skyguide

Skyguide a réagi avec véhémence à cette condamnation. La société qui assure les services de la navigation aérienne en Suisse estime dans un communiqué que cela "met la culture de sécurité en péril".

"Si nous voulons améliorer la sécurité aérienne de façon continue, il faut que les contrôleurs, techniciens et pilotes qui accomplissent consciencieusement leur mission puissent signaler tout incident de leur propre initiative, sans craindre des sanctions", écrit Skyguide. "Les taux de signalement aujourd’hui très élevés en Suisse pourraient chuter." Et de rappeler que depuis l'incident, diverses mesures visant à réduire les risques ont été introduites.

L'employé concerné, lui, ne travaille plus au "front" de la sécurité aérienne. Il a été affecté au développement de celle-ci. Il suit actuellement une formation pour pouvoir réintégrer son ancienne fonction. La question de savoir si cela reste possible après ce jugement reste ouverte.

Autre contrôleur aérien condamné

Ce n'est pas la première fois qu'un aiguilleur du ciel de Skyguide est condamné. Fin novembre, le Tribunal pénal fédéral a confirmé la peine pécuniaire avec sursis d'un autre contrôleur aérien, pour avoir causé un rapprochement dangereux entre deux avions en raison d'une communication peu claire. L'affaire sera jugée en dernière instance par le Tribunal fédéral.

ats

Articles les plus lus
Dans la même rubrique
La Liberté - Bd de Pérolles 42 / 1700 Fribourg
Tél: +41 26 426 44 11