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Birmanie: "désescalade" encore possible selon l'émissaire de l'ONU

L'émissaire de l'ONU sur la Birmanie Christine Schraner Burgener estime être la seule à pouvoir parler à toutes les parties pour trouver une solution à la crise dans ce pays (archives). © KEYSTONE/ANTHONY ANEX
L'émissaire de l'ONU sur la Birmanie Christine Schraner Burgener estime être la seule à pouvoir parler à toutes les parties pour trouver une solution à la crise dans ce pays (archives). © KEYSTONE/ANTHONY ANEX
L'émissaire de l'ONU sur la Birmanie Christine Schraner Burgener estime être la seule à pouvoir parler à toutes les parties pour trouver une solution à la crise dans ce pays (archives). © KEYSTONE/ANTHONY ANEX
L'émissaire de l'ONU sur la Birmanie Christine Schraner Burgener estime être la seule à pouvoir parler à toutes les parties pour trouver une solution à la crise dans ce pays (archives). © KEYSTONE/ANTHONY ANEX


Publié le 03.03.2021


L'émissaire de l'ONU sur la Birmanie Christine Schraner Burgener est "consternée" par les nouvelles victimes mercredi de la répression dans ce pays. Mais la Zurichoise veut dire à la junte "qu'il n'est pas trop tard pour une désescalade".

"C'est le moment pour la junte d'agir" vers un apaisement, affirme dans un entretien à Keystone-ATS Mme Schraner Burgener. "Il n'est pas trop tard", insiste-t-elle, tout en relayant son inquiétude et sa "consternation", partagée selon elle par le secrétaire général Antonio Guterres.

Elle a convoyé cet appel lors de son dernier contact unilatéral avec l'armée dimanche dernier. Depuis, pas de dialogue avec son interlocuteur habituel, le numéro deux Soe Win. Mais les militaires "prennent souvent plusieurs jours" avant de répondre, ajoute l'émissaire du secrétaire général de l'ONU.

Mme Schraner Burgener demande aux manifestants de rester pacifiques, même si elle comprend "leur colère". "L'armée n'attend qu'un débordement pour justifier la répression", ajoute-t-elle.

La journée de mercredi a été "la plus sanglante" en Birmanie depuis le coup d'Etat du 1er février, avec "38 morts", a déclaré Mme Schraner Burgener. Nous avons maintenant plus de 50 morts depuis le début du coup d'Etat et de multiples blessés", a-t-elle ajouté.

Après son appel vendredi dernier à l'Assemblée générale de l'ONU à "ne pas légitimer, ni reconnaître" les dirigeants du coup d'Etat, elle espère que l'armée ne changera pas d'attitude à son égard. "J'ai une relation de confiance avec elle depuis des années. Mais je me dois d'être ferme" face à la répression, explique la diplomate zurichoise.

Appel à des "mesures plus fermes"

Un discours clair auquel s'ajoute une polémique à l'ONU sur qui doit représenter la Birmanie à New York après la défiance de l'ambassadeur Kyaw Moe Tun contre la junte. Celui-ci affirme représenter le gouvernement élu d'Aung San Suu Kyi, détenue par l'armée. Mais les militaires ne le reconnaissent plus. "J'imagine qu'ils sont fâchés", admet Mme Schraner Burgener qui considère toujours M. Kyaw comme son interlocuteur pour le moment.

A l'ONU, une nouvelle réunion du Conseil de sécurité aura probablement lieu vendredi. Le scénario de sanctions semble improbable avec l'opposition de la Chine, mais l'émissaire les a réclamées mercredi. Après une première déclaration il y a quelques semaines, "j'espère que les membres décideront de mesures plus fermes", dit Mme Schraner Burgener. "Seule la pression peut faire changer d'avis l'armée".

Certes, le commandant en chef de l'armée birmane et chef de la junte Min Aung Hlaing est celui qui aura la solution. Mais Pékin et Moscou ont une influence.

"J'image qu'il est important pour la Chine de garder une stabilité dans la région" et d'éviter une guerre entre l'armée birmane et 21 groupes ethniques prêts à combattre, dit-elle. De même, les Etats voisins ne veulent pas d'un afflux de réfugiés en pleine pandémie.

De son côté, la Zurichoise reste convaincue de l'importance de se rendre sur place "le plus rapidement possible", malgré un refus de la junte pour le moment. "Je suis la seule qui ait encore de bons contacts avec l'armée et avec toutes les parties", dit-elle. En dehors d'elle, les militaires ne parlent qu'avec leurs homologues, pas avec des responsables politiques.

Dialogue récent avec la société civile

Selon elle, son arrivée pourrait faciliter un climat pour l'établissement de mesures de confiance. Il faudra trouver une solution qui permette à l'armée "de ne pas perdre la face", ajoute-t-elle.

La Zurichoise a pu dialoguer de la situation actuelle la semaine dernière avec 200 représentants de la société civile. Et elle maintient des contacts avec tous les acteurs.

L'émissaire conditionnera une visite à la possibilité de voir Aung San Suu Kyi et le président Win Myint. La cheffe du gouvernement élu semble aller bien et être résolue, selon son avocat. "Mais nous ne savons pas où elle est", dit l'émissaire qui avait parlé avec elle de réformes pour cette année, avant le coup d'Etat.

De son côté, la Suisse peut continuer à oeuvrer de manière "importante en arrière-plan avec ses bons offices", selon Mme Schraner Burgener, qui tient à faire remarquer qu'elle ne s'exprime pas au nom du gouvernement suisse mais comme représentante de l'ONU. Berne avait facilité les discussions avant les élections remportées par la Ligue nationale pour la démocratie (LND) d'Aung San Suu Kyi et qui ont poussé l'armée à son coup d'Etat.

Mme Schraner Burgener est aussi inquiète pour les Rohingyas, dont des centaines de milliers avaient fui des exactions en 2017. Les récentes déclarations du chef de la junte contre des rapports internationaux sur cette crise font redouter à l'émissaire de nouvelles menaces pour la minorité musulmane.

ats

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