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Boycott du référendum renforçant les pouvoirs du président aux Comores

Depuis des mois, l'opposition dénonce les "dérives autoritaires" du président comorien Azali Assoumani (archives). © KEYSTONE/EPA AFPI/SIMON MAINA
Depuis des mois, l'opposition dénonce les "dérives autoritaires" du président comorien Azali Assoumani (archives). © KEYSTONE/EPA AFPI/SIMON MAINA


Publié le 30.07.2018


Les Comoriens se sont peu mobilisés lundi lors d'un référendum constitutionnel, destiné à permettre au président Azali Assoumani de se représenter pour un deuxième mandat consécutif. Ce scrutin était boycotté par l'opposition.

Le projet, qui a contribué à la détérioration du climat politique dans l'archipel, renforce considérablement les pouvoirs du chef de l'Etat. Il l'autorise à se présenter pour un deuxième mandat consécutif de cinq ans, un cas de figure interdit par l'actuelle Constitution, qui date de 2001 et a permis de ramener un peu de stabilité dans un pays secoué par une longue série de crises séparatistes et de coups d'Etat.

Le texte supprime aussi les postes de vice-présidents et la Cour constitutionnelle, la plus haute instance judiciaire de l'archipel peuplé de moins de 800'000 habitants.

Affluence faible

L'affluence est restée faible lundi dans les bureaux de vote visités par l'AFP sur l'île de la Grande-Comore, à l'exception de celui où a voté Azali Assoumani. Une heure avant la fermeture des bureaux et le dépouillement, qui a débuté peu après 16h00 (15h00 suisses), moins d'un quart des électeurs avaient voté dans les cinq bureaux où se sont rendus des journalistes de l'AFP.

Sur l'île d'Anjouan, les Comoriens ont aussi boudé les urnes dans la principale ville de Mutsamudu, mais pas dans deux villages avoisinants, a constaté l'AFP. Un entrepreneur a expliqué, sous couvert de l'anonymat, ne pas avoir effectué son devoir électoral car ce référendum "sent l'arnaque".

L'issue du référendum fait peu de doute compte tenu du boycott de l'opposition, qui dénonce un scrutin "taillé sur mesure" pour le chef de l'Etat.

Climat tendu

Dans ces conditions, le vote s'est déroulé dans un climat tendu. Lundi, les urnes en plastique ont été saccagées dans deux bureaux de vote situés dans une école du quartier de Hankounou à Moroni, a constaté l'AFP. Lors de cet incident, un gendarme a été blessé à l'arme blanche, un acte rapidement condamné par le chef de l'Etat et l'opposition.

"Ce sont des cas isolés", a assuré Azali Assoumani, faisant aussi état d'"un cas" de troubles sur l'île d'Anjouan. "Mais ce n'est pas de nature à faire en sorte que le référendum ne se passe pas dans les meilleures conditions", a-t-il ajouté. "Si le référendum passe, on va aller vers un développement du pays", a-t-il lancé.

Pour l'opposition, qui a jugé le référendum "illégal", le pouvoir a d'ores et déjà "enregistré un échec", a réagi lundi soir le secrétaire général du parti Juwa, Ahmed el-Barwane.

"Le peuple lui a envoyé un message fort en ne se rendant pas aux urnes", a-t-il estimé. "Azali ne peut pas se référer à ce prétendu référendum pour imposer" un changement constitutionnel, a-t-il ajouté à l'AFP.

Election anticipée dès 2019

Si le "oui" l'emporte, M. Azali, élu de justesse en 2016, compte organiser dès 2019 une élection anticipée. Il a déjà occupé la fonction suprême de 1999 à 2006 à la suite d'un putsch, avant de céder démocratiquement le pouvoir.

Depuis des mois, l'opposition dénonce les "dérives autoritaires" du président, qui culminent avec le référendum. Des opposants ont été arrêtés, des manifestations réprimées, l'ancien chef de l'Etat Ahmed Abdallah Sambi assigné à résidence et la Cour constitutionnelle suspendue.

Signe des tensions dans l'archipel, l'un des vice-présidents, Abdou Moustoidrane, a été victime il y a une semaine d'une tentative d'assassinat. Sa voiture a essuyé plusieurs rafales d'arme automatique, il s'en est miraculeusement sorti indemne.

ats, afp

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