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Des jeunes redynamisent une distillerie plus que centenaire

En reprenant la Distillerie de Saconnex-d'Arve, à Plan-les-Ouates (GE), en 2015, Nicolas Bloch a voulu redynamiser la production d'alcools forts locaux. Le lieu fondé vers 1895 permet toujours aux particuliers de transformer leurs fruits en eau-de-vie. © KEYSTONE/MARTIAL TREZZINI
En reprenant la Distillerie de Saconnex-d'Arve, à Plan-les-Ouates (GE), en 2015, Nicolas Bloch a voulu redynamiser la production d'alcools forts locaux. Le lieu fondé vers 1895 permet toujours aux particuliers de transformer leurs fruits en eau-de-vie. © KEYSTONE/MARTIAL TREZZINI


Publié le 28.07.2018


De jeunes passionnés s'investissent pour produire des alcools dans une des deux dernières distilleries du canton de Genève. Ces petits entrepreneurs apprécient de maîtriser leur outil de travail en misant sur le local.

En ce mois de juillet, le vaste hangar de 800 m2 est calme. Une légère odeur d'eau-de-vie flotte dans l'air. Penché sur des bidons remplis de cerises, Nicolas Bloch laisse sortir l'air en détachant le couvercle, tandis que des hirondelles des cheminées dessinent des figures sous la toiture. Selon la chaleur, la fermentation dure de dix jours à deux mois. "Plus elle est lente, plus l'arôme ressort", relève-t-il.

Ce Genevois de 37 ans, licencié en philosophie et détenteur d'un brevet de distillateur, a repris la production en avril 2015. Cette année-là, la Distillerie de Saconnex-d'Arve, qui date de 1895, a été rachetée par la commune de Plan-les-Ouates après avoir failli disparaître. Une pétition demandait de sauver ce lieu de rencontre dans un hameau qui ne compte ni café ni épicerie.

Une eau-de-vie locale

Sur les 900 clients de la distillerie, environ 600 par an font transformer leurs fruits en eau-de-vie. Bientôt, ils apporteront des prunes et des prunelles, plus rarement des abricots et des pêches de vigne. Puis des mirabelles, dès le 15 août. Cette distillation, dite "à façon", représente 2000 litres d'alcool annuels.

Mais Nicolas Bloch a voulu dynamiser l'activité en produisant ses propres breuvages. Il pense atteindre quelque 2000 litres cette année, contre 1000 en 2015. "Face à la baisse de la consommation d'alcool, l'idée de terroir fonctionne bien, explique-t-il. Je cherche à encourager les trentenaires à boire une eau-de-vie locale plutôt qu'une vodka produite à grande échelle."

Variétés anciennes

Pommes, poires, coings, raisins, cerises, mirabelles, prunes, pruneaux, pêches de vigne, mûres: 80% des fruits proviennent de vergers genevois, à l'exception des framboises, des abricots et des poires William. Nicolas Bloch fait fermenter une seule variété de fruits à la fois pour obtenir un "produit très pur qui exprime sa typicité, son arôme."

Le trentenaire veut aussi valoriser les variétés anciennes négligées. "Elles se conservent mal, mais elles sont très bonnes transformées." Dans le cadre d'un projet avec le WWF et l'association Rétropomme, cent fruitiers anciens seront plantés sur une parcelle voisine appartenant au canton. "La distillerie constitue une plate-forme idéale pour discuter de politique agricole", note-t-il.

La qualité des échanges est une des motivations de Nicolas Bloch, qui se satisfait d'un petit salaire. "J'ai peu de charges, je fais du troc avec des paysans", indique-t-il. S'il dit apprécier la qualité de vie que lui procure ce travail, il aimerait réussir à baisser son taux d'occupation à 80%.

Organisation horizontale

Produire à échelle humaine pour une distribution locale est une philosophie que partage la Brasserie du Virage. Créée par cinq amis en 2015, cette microbrasserie occupe un espace de 100 m2 au fond du hangar. "Après avoir brassé notre propre bière en amateur pendant une dizaine d'années, nous nous sommes dit que nous voulions essayer d'en vivre", raconte Jamal Al-Amine, dans le cliquetis des flacons.

Entre 2015 et 2018, la production de bière a plus que doublé pour atteindre près de 50'000 litres. L'eau provient de Genève, une partie du malt aussi, tandis que le houblon est importé d'Allemagne, de France mais aussi de Nouvelle-Zélande. S'il n'est pas possible d'avoir un produit entièrement local, les clients, des cavistes et de plus en plus de restaurateurs, se situent surtout à Genève.

La brasserie produit cinq bières principales, "pas trop fortes en alcool et qui se boivent facilement avec un repas. On fait les bières qu'on aime." Même si leurs salaires sont encore bas, les cinq jeunes trentenaires de la Brasserie du Virage apprécient une organisation du travail horizontale "où tout le monde fait tout".

ats

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