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Féminicides: des militants à Paris exigent des mesures immédiates

74 femmes sont mortes depuis le début de l'année sous les coups d'un conjoint ou ex-compagnon en France. © KEYSTONE/EPA/CHRISTOPHE PETIT TESSON
74 femmes sont mortes depuis le début de l'année sous les coups d'un conjoint ou ex-compagnon en France. © KEYSTONE/EPA/CHRISTOPHE PETIT TESSON


Publié le 07.07.2019


"Plus jamais ça!": 2000 personnes selon les organisateurs, 1200 d'après la police, se sont rassemblées samedi à Paris pour réclamer des mesures immédiates contre les féminicides. L'appel avait été lancé par un collectif de familles et proches de victimes.

Parmi elles - des femmes, mais aussi des hommes -, 74 portaient des couronnes de fleurs. 74, soit le nombre de meurtres de femmes par leur compagnon ou ex recensés par un collectif depuis le 1er janvier. "Féminicides = arme de destruction machiste", pouvait-on lire sur une pancarte.

Dans un message publié sur Facebook tard samedi soir, le président Emmanuel Macron a lui-même égrené les prénoms d'une cinquantaine de victimes, avant de reconnaître: "Mesdames, la République n'a pas su vous protéger".

"Des solutions existent déjà, il faut les faire connaître, et les utiliser au moindre doute. Si vous êtes victime de violence, si vous savez que l'une de vos proches est victime de violence, ne fermez pas les yeux, élevez la voix", supplie le chef de l'Etat. Et de renvoyer vers la plateforme de signalement en ligne du ministère de l'Intérieur et le 3919, la ligne téléphonique consacrée aux violences faites aux femmes.

"Je veux une réponse"

Dans l'assistance, place de la République, figuraient la chanteuse Yael Naim et les actrices Julie Gayet, compagne de l'ancien président François Hollande, et Muriel Robin.

Cette dernière a appelé les manifestants à observer symboliquement "74 secondes de bruit et de colère", et vigoureusement interpellé le président Emmanuel Macron. "Vous avez parlé de cause nationale: où en êtes-vous ? Combien coûte la vie d'une femme ?"

"Je veux une réponse", a martelé la comédienne, qui a incarné à l'écran Jacqueline Sauvage, condamnée - avant d'être graciée par François Hollande - pour le meurtre de son mari violent.

"Pourquoi vous restez silencieux ? Les féminicides ne sont pas une fatalité. Nous n'avons plus le temps, nous attendons des réponses maintenant", a abondé la militante féministe Caroline De Haas à l'adresse du chef de l'Etat.

Grenelle contre les violences conjugales

Interrogée par l'AFP, la députée MoDem Maud Petit a elle aussi souhaité une prise de parole d'Emmanuel Macron: "C'est important pour toutes ces personnes d'entendre le président, un homme, sur ce sujet". Dans un tweet, la secrétaire d'Etat à l'Egalité femmes-hommes, Marlène Schiappa, a dit "saluer chaleureusement" la manifestation.

"Les conjoints violents gâchent la vie de femmes et d'enfants depuis trop longtemps", a-t-elle observé, réaffirmant la "détermination du gouvernement" à prévenir les féminicides. Dans le Journal du dimanche, un hebdomadaire français, elle a par ailleurs annoncé que le gouvernement lancera en septembre à Matignon un "Grenelle des violences conjugales" afin d'enrayer le phénomène des féminicides. "Brigitte Macron s'engagera" personnellement dans ce dossier.

Le "Grenelle contre les violences conjugales", qui sera introduit par Edouard Philippe "et réunira les ministres concernés, acteurs de terrain, services publics, associations, familles de victimes", s'ouvrira le 3 septembre, "le 3/9/19, en écho au numéro 3919", la ligne téléphonique consacrée aux femmes victimes de violences, relève Marlène Schiappa.

Bracelets électroniques

Réuni dernière le mot d'ordre "Protégez-les", le collectif à l'origine du rassemblement avait signé une tribune dans Le Parisien dimanche dernier. Il appelait Emmanuel Macron à "mettre fin à ce massacre" et réclamait justement la convocation d'un débat réunissant des représentants du gouvernement et d'associations professionnelles sur le sujet.

Le collectif souhaite aussi le traitement systématique des plaintes, l'octroi de l'aide juridictionnelle dès le dépôt de plainte, un hébergement d'urgence et des ordonnances de protection pour les victimes. Mais aussi des bracelets électroniques pour les conjoints violents, un dispositif que la ministre de la Justice, Nicole Belloubet a annoncé vouloir "généraliser".

"Carences du système"

Dans une tribune également publiée par le Journal du dimanche, 18 avocates de la Fédération nationale Solidarité Femmes (FNSF), qui gère le 3919, dénoncent de leur côté "les carences du système judiciaire" et regrettent que le parcours des victimes s'apparente toujours à "un parcours de combattante".

Si l'on prend en compte les couples officiels comme les non-officiels (de l'époux à la relation épisodique), 130 femmes sont mortes en 2017 en France, tuées par leur conjoint ou ex, contre 123 en 2016, selon les dernières données de la délégation aux victimes du ministère de l'Intérieur. Le nombre de féminicides a été compris entre 122 (en 2015) et 157 (2010) ces dernières années.

A la fin du rassemblement place de la République, samedi en début de soirée, une quarantaine de personnes se sont couchées au sol, aux cris de "Plus jamais ça !"

ats, afp

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