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L'homophobie doit être combattue comme le racisme

Le National veut combattre l'homophobie au même titre que le racisme (archives). © KEYSTONE/SALVATORE DI NOLFI
Le National veut combattre l'homophobie au même titre que le racisme (archives). © KEYSTONE/SALVATORE DI NOLFI


Publié le 25.09.2018


L'homophobie devrait être combattue en Suisse au même titre que le racisme. Le National a complété mardi en ce sens la norme pénale antiraciste. Le Conseil des Etats doit encore se prononcer.

L'homophobie n'est pas une opinion. L'homophobie tue, a lancé Mathias Reynard (PS/VS), dont l'initiative parlementaire est à l'origine du projet. Un homosexuel sur cinq a tenté de se suicider, la moitié avant l'âge de vingt ans.

La législation actuelle ne permet pas de s'attaquer aux propos homophobes exprimés en termes généraux, comme "tous les homos dans des camps". Le Tribunal fédéral refuse la qualité pour agir aux associations de protection des droits des personnes homosexuelles dans le domaine des infractions à l'honneur.

Un gay ou une lesbienne ne peut pas non plus se prévaloir d'une infraction à l'honneur à son encontre lorsque des propos homophobes sont proférés envers la communauté homosexuelle. Le caractère homophobe d'une attaque physique n'est pas reconnu comme tel, a poursuivi le Valaisan.

Pour pallier le problème, la norme antiraciste doit être complétée pour y ajouter l'orientation sexuelle. Cette extension ne vaudra pas pour les déclarations et les actes visant des préférences sexuelles pathologiques comme la pédophilie.

Opposition à droite

La nécessité de légiférer a été remise en cause à droite. Ce problème de discrimination est derrière nous, a estimé Yves Nidegger (UDC/GE). Pas question d'agir via le droit pénal.

Pour l'UDC, qui conteste la validité de la norme antiraciste, il est exclu de vouloir la compléter. Et le Genevois d'affirmer que la Suisse allait devoir affronter de nouveaux revers devant les tribunaux internationaux.

Selon les opposants au projet, l'arsenal juridique actuel permet déjà d'agir, que ce soit dans le droit civil (atteinte à l'honneur) ou pénal (diffamation, calomnie, menaces, désagréments causés par la confrontation à un acte d'ordre sexuel, lésions corporelles).

Identité du genre

L'opposition frontale a échoué par 115 voix contre 60. Malgré le soutien du Conseil fédéral, la droite n'a pas réussi à restreindre la portée du projet. Par 98 voix contre 83, le National a accepté d'ajouter également l'identité du genre dans la norme antiraciste.

Ce dernier critère doit permettre de protéger les transgenres et les personnes au sexe non déterminé. Ces individus sont en effet souvent confrontés aux mêmes actes haineux ou discriminatoires que les gays, les lesbiennes ou les bisexuels, a plaidé Laurence Fehlmann Rielle (PS/GE) au nom de la commission.

A l'étranger aussi, des normes ont été prévues pour protéger cette catégorie de personnes, a ajouté Giovanni Merlini (PLR/TI). Le gouvernement estime quant à lui que cette notion, qui fait référence à un sentiment individuel et profondément intime, est trop floue.

Le droit pénal deviendrait dès lors trop imprévisible, a commenté Philippe Bauer (PLR/NE). Selon Yves Nidegger, une interdiction de discrimination basée sur le genre pourrait même être utilisée contre des propositions féministes (parking pour femmes) ou homosexuelles (EMS pour gay).

Poursuivi d'office

Les infractions sont poursuivies d'office. Les autorités devront donc intervenir dès qu'elles ont connaissance d'actes de haine et de discriminations à raison de l'orientation sexuelle et à l'identité du genre. Les associations continueront par contre d'être privées de la qualité de partie et de voies de recours.

Comme c'est le cas aujourd'hui avec le racisme, les déclarations homophobes devront être faites publiquement et rabaisser les personnes auxquelles elles s'adressent d'une manière contraire à la dignité humaine pour être punies.

Ce critère est rempli, d'après la jurisprudence du Tribunal fédéral, lorsqu'elles s'adressent à un large cercle de personnes qui n'ont aucun lien personnel. Autrement dit, si elles n'ont pas lieu dans le cadre de la famille, dans un cercle d'amis ou auprès de personnes entre lesquelles il existe des liens personnels ou un rapport de confiance.

L'appréciation de ce critère dépend des circonstances concrètes. Le nombre de destinataires a son importance, mais n'est pas déterminant en soi. Le critère de la commission en public ne s'applique en revanche pas pour la préparation et la participation à des actions haineuses, ni pour le refus d'une prestation destinée à l'usage public.

Sanction

La sanction encourue pour les infractions prévues dans la norme antiraciste est une peine de privation de liberté de trois ans au plus ou une peine pécuniaire. L'Autriche, la France, les Pays-Bas et le Danemark comptent parmi les pays qui punissent pénalement les appels à la haine, à la violence ou à la discrimination en raison de l'orientation sexuelle.

ats

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