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L'hôpital public français de retour dans la rue, "le coeur brisé"

Onze mois après le début de la grève des urgences en France, les syndicats et collectifs désespèrent d'obtenir gain de cause sur les hausses de salaires et d'effectifs qu'ils revendiquent (archives). © KEYSTONE/AP/BOB EDME
Onze mois après le début de la grève des urgences en France, les syndicats et collectifs désespèrent d'obtenir gain de cause sur les hausses de salaires et d'effectifs qu'ils revendiquent (archives). © KEYSTONE/AP/BOB EDME


Publié le 14.02.2020


Trois mois après le "plan d'urgence" du gouvernement français, les personnels hospitaliers ont manifesté vendredi leur amour du service public, mais aussi leur colère. Les syndicats estiment que les mesures annoncées ne répondent pas à leurs revendications.

"Nous avons le coeur brisé": Saint-Valentin oblige, les collectifs Inter-Hôpitaux et Inter-Urgences, à l'origine de cette nouvelle mobilisation, avaient demandé aux soignants d'"apporter une fleur blanche" pour "témoigner (leur) amour à l'hôpital public". A Paris, quelques milliers de soignants - plus de 10'000, selon la CGT - ont défilé dans l'après-midi de l'hôpital Necker (XVe arrondissement) à celui de la Pitié-Salpêtrière.

Coeurs peints sur le visage et ballons roses à la main, l'ambiance animée tranchait avec la gravité des témoignages. Comme celui de Florian, 55 ans, aide-soignant à l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris, racontant sa "course quotidienne pour répondre aux sonnettes des patients", avec seulement "une infirmière pour deux étages et deux aides-soignants pour 28 patients".

"Deuil difficile de l'hôpital public"

A Grenoble, 220 personnels du CHU, des travailleurs sociaux, des étudiants et usagers ont marché depuis l'hôpital pour aller déposer symboliquement à la Caisse de Sécurité sociale des arrêts maladie, notamment pour "dépression" ou "deuil difficile de l'hôpital public".

A Strasbourg, une cinquantaine de personnes se sont rassemblées devant l'agence régionale de santé (ARS), déposant au sol chaussures et blouses blanches pour dénoncer le "manque de moyens et de personnel". Selon Jean-Claude Matry, responsable de la CFTC locale, "il manque 88 infirmières" dans le CHU alsacien.

Onze mois après le début de la grève des urgences, les organisateurs désespèrent d'obtenir gain de cause sur les hausses de salaires et d'effectifs qu'ils revendiquent. "Ce mouvement n'a obtenu aucun résultat en termes d'embauches et d'attractivité", estime le neurologue François Salachas, membre du Collectif Inter-Hôpitaux.

"Climat mortifère"

Le gouvernement français a pourtant fait des concessions en novembre, après une première journée de grève et de manifestation assez largement suivie. Rallonge budgétaire, primes à foison, reprise massive de dette... Pour le Premier ministre, Edouard Philippe, ce "plan d'urgence" doté de "moyens considérables" devait "redonner de l'oxygène" aux soignants.

Mais dans le "climat mortifère" du secteur, "ces propositions ne sont pas porteuses d'espoir", estime Hugo Huon, président du collectif Inter-Urgences. Eclipsées depuis décembre par la mobilisation contre la réforme des retraites, les blouses blanches ont ramené l'attention sur leur cause avec une série de démissions collectives.

Depuis trois semaines, environ 800 médecins-chefs ont renoncé à leurs fonctions administratives, désertant les instances de direction pour se consacrer exclusivement aux soins. Ils en avaient averti Agnès Buzyn lors d'une rencontre mi-janvier, mais la ministre de la Santé souhaite "d'abord qu'on fasse un état des lieux de la façon dont les réformes s'appliquent".

Certaines promesses ont en effet été concrétisées depuis janvier, ou sont en passe de l'être: crédits pour l'achat de matériels, nouvelles primes, revalorisation des tarifs hospitaliers... Un peu d'argent et de pouvoir, mais trop peu pour contenter les intéressés.

ats, afp

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