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La Confédération épinglée sur le contrôle des sanctions économiques

La commission de gestion du Conseil des Etats épingle le Secrétariat d'Etat à l'économie et l'Administration fédérale des douanes sur l'application des sanctions économiques décidées par l'ONU ou par l'UE (archives). © KEYSTONE/MARTIAL TREZZINI
La commission de gestion du Conseil des Etats épingle le Secrétariat d'Etat à l'économie et l'Administration fédérale des douanes sur l'application des sanctions économiques décidées par l'ONU ou par l'UE (archives). © KEYSTONE/MARTIAL TREZZINI


Publié le 23.10.2018


La Confédération ne contrôle pas suffisamment l'application des sanctions économiques. La commission de gestion du Conseil des Etats demande un renforcement de la surveillance exercée par le Secrétariat d'Etat à l'économie (SECO).

Les sanctions économiques sont du ressort du Conseil fédéral. Elles sont contraignantes quand elles émanent du Conseil de sécurité de l'ONU. Le gouvernement les applique au cas par cas, selon une pesée des intérêts, lorsqu'elles proviennent de l'Union européenne.

La politique menée par le Conseil fédéral en la matière est claire et la préparation des ordonnances est appropriée, indique un rapport de la commission de gestion du Conseil des Etats publié mardi. En revanche, la mise en oeuvre des sanctions est lacunaire.

Le SECO ne surveille que ponctuellement l’exécution de ces mesures. Il n'exploite pas pleinement les instruments dont il dispose, relève une évaluation commandée au Contrôle parlementaire de l'administration (CPA).

Ainsi, les contrôles ne sont effectués qu'en cas d'indices de délit et la procédure n'est engagée qu'en présence de preuves suffisantes. Le SECO prévient l’entreprise concernée des rares contrôles sur site. Il n'a encore jamais effectué de contrôle sans préavis.

Difficultés aux douanes

L'application des sanctions aux frontières est du ressort de l'Administration fédérale des douanes (AFD). Mais les marchandises interdites sont difficiles à contrôler. Les douaniers ne recherchent pas toujours les biens concernés, leur priorité allant plutôt aux importations ordinaires et à la perception de taxes.

L'application des sanctions financières pose problème, en raison de sa complexité. Les activités visées par les sanctions ne sont pas toujours facilement détectables. Les contrôles sont quasi inexistants dans ce domaine, tout comme pour les produits de luxe, note le Contrôle parlementaire de l'administration.

La surveillance des restrictions de voyages est quant à elle compliquée par les systèmes de visa, cette mesure ne s'appliquant qu'aux personnes obligées d'avoir un visa pour entrer en Suisse. S'ajoute aussi la difficulté d'interdire des échanges commerciaux dans des régions à l'intérieur d'un Etat, comme la Crimée.

Coordination à revoir

Le cas de l'Ukraine, précisément, montre que la coordination n'est pas toujours optimale entre le SECO et l'AFD. L'Administration fédérale des douanes n'a rédigé aucune circulaire concernant l'Ukraine. Le respect des sanctions n'a pas du tout été contrôlé, ce dont le Secrétariat d'Etat ne s'est pas rendu compte, selon le rapport du CPA.

Les données douanières ne permettent toutefois pas de conclure à une violation systématique des sanctions contre la Crimée par des entreprises suisses. Aucun indice ne montre que la Suisse a été utilisée comme plateforme pour contourner les sanctions de l'UE contre la Russie. Après l’entrée en vigueur de l’ordonnance sur l’Ukraine, les importations suisses à partir de la Crimée ont totalement cessé. Les exportations ont suivi le même mouvement.

Recommandations

Si les sanctions commerciales sont largement respectées par les entreprises, le CPA a néanmoins aussi identifié quelques importations et exportations de biens visés par une sanction. Il s'agit de 11 cas d'exportations de biens vers la Crimée, 14 exportations d'objets de luxe interdits vers la Syrie et 39 cas de métaux précieux envoyés vers l'Iran. Ni l'AFD, ni le SECO n'ont pu expliquer comment les cas ont pu survenir, note le CPA.

Sur cette base, la commission de gestion du Conseil des Etats émet plusieurs recommandations à l'intention du Conseil fédéral. Elle demande que les informations recueillies lors de la mise en oeuvre des sanctions soient systématiquement exploitées. Une base de données douanières adéquate doit être mise en place.

La commission de gestion du Conseil des Etats demande au Conseil fédéral de vérifier si les instruments de contrôle existants sont pertinents et d'agir pour qu'ils soient utilisés de manière appropriée. Il devrait également être plus transparent sur les critères utilisés pour appliquer les sanctions de l'UE.

Le pilotage et l’activité de coordination du SECO doit être renforcé. Celui-ci est prié de créer un organe de pilotage ad hoc.

Le Conseil fédéral a jusqu'au 18 janvier pour prendre position.

ats

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