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Tribunal cantonal: Lionel Girardin demande l'acquittement

L'ancien municipal veveysan Lionel Girardin se retrouve mercredi devant les juges du Tribunal cantonal de Lausanne pour son procès en 2e instance (archives). © KEYSTONE/LAURENT GILLIERON
L'ancien municipal veveysan Lionel Girardin se retrouve mercredi devant les juges du Tribunal cantonal de Lausanne pour son procès en 2e instance (archives). © KEYSTONE/LAURENT GILLIERON
L'avocat de Lionel Girardin, Ludovoc Tirelli, a demandé l'acquittement de son client mercredi au Tribunal cantonal à Lausanne. © KEYSTONE/JEAN-CHRISTOPHE BOTT
L'avocat de Lionel Girardin, Ludovoc Tirelli, a demandé  l'acquittement de son client mercredi au Tribunal cantonal à Lausanne. © KEYSTONE/JEAN-CHRISTOPHE BOTT


Publié le 08.12.2021


Lionel Girardin a comparu mercredi devant la Cour d'appel du canton de Vaud. Condamné en mai pour gestion déloyale des intérêts publics à un an de prison avec sursis, l'ancien municipal veveysan a demandé son acquittement, tandis que le Parquet veut aggraver sa peine.

En première instance, le Tribunal d'arrondissement de l'Est vaudois avait jugé la culpabilité de Lionel Girardin "relativement lourde". Il avait conclu qu'entre 2013 et 2018, l'ex-municipal avait occasionné un préjudice de plusieurs dizaines de milliers de francs à la Fondation Apollo, active dans le logement social pour des personnes en difficulté.

Externalisation en faveur de sa société

Dès 2014, alors que l'institution lancée tout d'abord à Vevey se développait dans d'autres villes en bénéficiant de subventions cantonales et communales, celui qui était son président bénévole avait externalisé certaines tâches. Parmi elles, les ressources humaines (RH) et la gestion d’un espace de coworking dans les locaux trop grands de la fondation Apollo.

Lionel Girardin avait attribué ces mandats à sa propre société, Operation Project (OP), dont il était associé gérant, sans appel d'offres, ni accord clair et protocolé du Conseil de fondation, avait-il été relevé en première instance.

Pas quittancé

Si aucun élément nouveau n'est apparu mercredi, la Cour d'appel a essayé de clarifier certains points. Son président a notamment interrogé Lionel Girardin sur le tarif horaire pratiqué pour son appui à Apollo lors de l'externalisation des RH, à savoir 180 francs de l'heure. N'était-il pas excessif pour une micro-entreprise quasi familiale? "Ce tarif correspondait au prix du marché", a répondu Lionel Girardin.

Un contrat avec soi-même était-il de bon aloi? Le Conseil était au courant du principe, a-t-il répondu. "Il était opportun de procéder ainsi au vu de sa proximité avec ma fondation. Il y avait une continuité dans mon esprit de l'activité publique vers l'activité privée", a-t-il expliqué.

Quant à l'engagement de sa femme, non quittancé par le conseil, il était aussi transparent, selon lui. Pour le coworking géré également par sa société, une activité commerciale n'était pas antinomique avec celles de la fondation. Elle devait à terme fournir des rentrées financières à Apollo.

Nourri par Apollo

"C'est comme si vous vous étiez nourri, ainsi que votre famille, de cette fondation", a lancé le président. "Pour moi, il n'y a pas eu de conflit d'intérêts. Tout a toujours été transparent et documenté" a affirmé l'ancien municipal. Et de souligner que cela répondait aux exigences des collectivités publiques et a été réalisé à leur satisfaction.

L'homme décrit comme "alerte" par la Cour a expliqué sa situation actuelle: plus de revenus, une réputation détruite, l'impossibilité de retrouver un logement, un travail. Sans compter le traitement médicamenteux pour dépression et des poursuites de la Ville de Vevey à hauteur d'un million.

Pas d'évolution

Le Ministère public est revenu lui sur le mandat des RH attribué à Operation Project. "On a entendu un flou peu artistique", a-t-il remarqué. Il n'y a jamais eu d'appels d'offres, ni d'information au Conseil, encore moins une validation. "Conclure un contrat avec soi-même est de nature à altérer la confiance. Lionel Girardin aurait dû se récuser avant de favoriser sa société".

En court-circuitant les règles de bonne gouvernance, l'octroi de ce mandat a terni la réputation de la fondation. Elle constitue une atteinte à un intérêt public idéal.

Selon le procureur, Lionel Girardin se pose toujours en "victime expiatoire. Il n'y a pas eu d'évolution", a-t-il estimé, demandant une aggravation de sa condamnation à quatorze mois avec sursis, assortis de la même peine pécuniaire de 40 jours-amende avec du sursis

Château de cartes

Pour Ludovic Tirelli, défenseur de Lionel Girardin, toute l'accusation est un "fascinant château de cartes". "On veut savoir exactement ce qui est reproché à Lionel Girardin. Les prestations ont été effectuées. Toute personne qui viole les règles de bonne gouvernance ne tombe pas sous le coup de la gestion déloyale des intérêts publics", a-t-il argué.

Aucune disposition légale n'oblige à un appel d'offres, ce sont seulement de bonnes pratiques, a-t-il établi. Un contrat avec soi-même? Le règlement du conseil de fondation le permet. Quant à l'externalisation, elle s'est faite de manière naturelle, à la vaudoise.

Victime de son succès

Lionel Girardin était très actif sur tous les fronts. Personne n'y a vu de problème, résume-t-il. La fondation a cru trop vite et a été victime de son succès. Lionel Girardin voulu bien faire, il a fait des erreurs non pénales. Puis la boule de neige médiatique n'a pas pu être arrêtée.

S'il avait été un simple quidam, ces faits ne seraient jamais arrivés sur le bureau d'un procureur, a relevé l'avocat qui a demandé la libération de son client du chef d'accusation de gestion déloyale qualifiée. Le jugement sera rendu jeudi après-midi.

Atteinte à l'image

L'affaire a plongé Vevey dans une crise sans précédent. Pas encore chiffrée, "l'atteinte à l'image a été considérable, car en 2016, Lionel Girardin était municipal", a rappelé l'avocate de la Ville. Exclu du Parti socialiste, suspendu, l'ex-élu de 47 ans n'a plus siégé à la Municipalité depuis juin 2018. Il a toutefois été rémunéré jusqu'à la fin de la législature.

ats

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