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Le policier qui a tiré sur un jeune à Nantes a été inculpé

Depuis la mort de ce jeune de 22 ans, des violences urbaines ont éclaté dans les quartiers sensibles de Nantes et se répètent chaque nuit. Dénonçant une "bavure policière", les émeutiers ont détruit plusieurs bâtiments et commerces et incendié des dizaines de voitures. © KEYSTONE/AP/FRANCK DUBRAY
Depuis la mort de ce jeune de 22 ans, des violences urbaines ont éclaté dans les quartiers sensibles de Nantes et se répètent chaque nuit. Dénonçant une "bavure policière", les émeutiers ont détruit plusieurs bâtiments et commerces et incendié des dizaines de voitures. © KEYSTONE/AP/FRANCK DUBRAY


Publié le 07.07.2018


Le policier qui a tué un jeune homme mardi soir lors d'un contrôle à Nantes, dans l'ouest de la France, a été inculpé et placé sous contrôle judiciaire, a annoncé vendredi soir son avocat. Il a reconnu un tir accidentel après avoir changé de version.

Le juge d'instruction l'a "mis en examen (inculpé, ndlr) pour coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner", a précisé Me Laurent-Franck Lienard dans un message à l'AFP. Le policier auteur du coup de feu a finalement admis avoir tiré "par accident" et non en légitime défense.

Il avait auparavant indiqué "avoir tiré en raison de la dangerosité du conducteur et pour protéger les personnes qui pouvaient se trouver à proximité sur la trajectoire du véhicule", selon le procureur de Nantes, Pierre Sennès.

Depuis la mort de la victime âgée de 22 ans, des violences urbaines ont éclaté dans les quartiers sensibles de Nantes et se répètent chaque nuit. Dénonçant une "bavure policière", les émeutiers ont détruit plusieurs bâtiments et commerces et incendié des dizaines de voitures.

Trois hommes âgés de 20 à 31 ans ont été condamnés vendredi à quatre mois de prison avec sursis pour des violences commises contre les forces de l'ordre. Ces condamnations sont les premières prononcées depuis le début des violences urbaines.

Trois phases

Selon le procureur de Nantes, les faits se sont déroulés en trois phases. D'abord, un contrôle de police d'environ "10 à 15 minutes", initié parce que la victime ne porte pas de ceinture. Constatant qu'il possède de faux papiers, les agents lui demandent de se garer et de les suivre au commissariat.

Puis il y a la deuxième phase, lorsque le jeune homme de 22 ans tente de fuir en reculant. Dans sa course, le conducteur frôle un fonctionnaire de police" avec "à ses côtés deux enfants". Le policier "se projette sur le bas-côté" et emporte avec lui "une fillette qui aurait pu être heurtée par le véhicule du fuyard", précise le procureur. Le jeune homme lui percute un véhicule en stationnement.

Enfin, après ce choc, celui qui était sous le coup d'un mandat d'arrêt pour "vol en bande organisée, recel et association de malfaiteurs", tente à nouveau de fuir en marche arrière. C'est alors que le policier inculpé va tirer sur le conducteur. Blessé au cou, le jeune homme est décédé à l'hôpital.

Autopsies prévues

Entendu une première fois le mercredi matin, le CRS a d'abord dit avoir tiré en légitime défense. Mais à la fin de sa garde à vue, vendredi matin, il a expliqué "qu'en réalité il a tenté de se pencher dans l'habitacle du véhicule pour saisir le volant et essayer d'arrêter la manoeuvre", a relaté le procureur. "C'est à ce moment là, indique-t-il, dans le cadre de ce qu'il appelle un corps-à-corps, que le coup de feu est parti accidentellement pour toucher mortellement le conducteur".

Une première autopsie a montré qu'une seule balle avait été tirée, "légèrement de haut en bas". D'autres autopsies et expertises seront diligentées, notamment pour déterminer la distance à laquelle le coup de feu a été tiré.

La famille de la victime va pour sa part pouvoir se constituer partie civile, consulter le dossier, être entendue par le juge et solliciter des investigations.

"Justice pour Abou"

De nouvelles violences ont éclaté dans la nuit de jeudi à vendredi à Nantes, pour le troisième jour consécutif, à la suite de la mort du jeune homme et se sont étendues à huit quartiers.

Cinquante-deux voitures, dont le véhicule de la maire de Nantes, Johanna Rolland, ont été incendiés, ainsi que huit bâtiments publics associatifs et commerciaux, dont un centre commercial et une école maternelle. Quatre personnes ont été interpellées et mises en garde à vue.

La préfète de la Loire-Atlantique a pris vendredi un arrêté interdisant toute "vente de carburant au détail et d'artifices de divertissement" jusqu'au 13 juillet sur l'ensemble de la métropole afin de limiter la fabrication de cocktails Molotov.

Une marche a réuni jeudi soir plusieurs centaines de personnes, qui ont défilé aux cris de "Justice pour Abou" et "police assassins" dans le quartier du Breil.

ats, afp

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