La Liberté

Le rejet de Sion 2026 ou la leçon de démocratie valaisanne

"Trop de bruit (politique), trop d'inconvénients, trop d'incertitudes. Le "non" valaisan est le résultat simple d'un calcul coût-bénéfices", juge la Neue Zürcher Zeitung. (image symbolique). © KEYSTONE/OLIVIER MAIRE
"Trop de bruit (politique), trop d'inconvénients, trop d'incertitudes. Le "non" valaisan est le résultat simple d'un calcul coût-bénéfices", juge la Neue Zürcher Zeitung. (image symbolique). © KEYSTONE/OLIVIER MAIRE


Publié le 11.06.2018


La presse suisse est unanime: le rejet des Valaisans à Sion 2026 est une leçon de démocratie... et la somme de plusieurs raisons. Elle invoque tour à tour la prudence helvétique, un désaveu de ses leaders et des initiateurs du projet ou encore l'image du CIO.

"Le peuple n’a pas vu ce qu’il avait à gagner dans un projet surtout perçu comme à l’avantage d’élites politiques et économiques", tranche La Liberté dans son édition du jour. Et avec presque 54% des voix, la sentence est claire: la république alpine ne veut pas d'un événement avec une telle impondérabilité, souligne le Tages-Anzeiger.

"Trop de bruit (politique), trop d'inconvénients, trop d'incertitudes. Le "non" valaisan est le résultat simple d'un calcul coût-bénéfices", explique la Neue Zürcher Zeitung. Pour preuve, invoque à l'autre bout de la Suisse et de l'autre lac, La Tribune de Genève: les résultats des différentes communes valaisannes suivent la ligne du porte-monnaie.

"Dans le Val d’Illiez, seul Champéry, qui devait accueillir des épreuves, a soutenu les JO. Les communes voisines, Troistorrents et Val-d’Illiez, se sont désolidarisées", illustre le quotidien lémanique. Bref, l'argent reste le nerf de la guerre. Les contribuables valaisans ont craint de devoir passer à la caisse à la fin des comptes, "reportant aux calendes grecques d’autres investissements nécessaires", analyse le Journal du Jura.

"Auto-suffisance" épinglée

Avec ce "non", c'est aussi la seconde fois, après le vote sur la Constituante - que le Valais désavoue ses leaders et va à l’encontre de la majorité politique. "Une claque", affirme Le Nouvelliste. Le Courrier espère que la classe politique prenne "enfin la mesure d’un Valais ouvert et durable que beaucoup appellent de leurs voeux".

24 heures tire aussi sur la "communication frelatée portée par certaines personnalités liées au comité d’organisation". Et de lister Christian Constantin et son baril en feu au sommet du Cervin ou encore Jean-Philippe Rochat englué dans les "Panama papers". Le Valais ne veut plus de l'image d'un canton dirigé par les promoteurs devenus des personnages clivants, complète Le Nouvelliste.

L'image du Comité international olympique (CIO), entachée par des affaires de dopage et de corruption, n'a pas aidé le projet non plus, souligne la presse helvétique."Une démocratie fonctionnelle ne pardonne pas l'auto-suffisance", écrit, cinglante, la NZZ. Les promesses du CIO, qui a "fait mariner son agenda 2020 avec un peu de durabilité", n'étaient pas suffisantes, résume le Tages-Anzeiger.

Le Quotidien Jurassien est encore plus mordant: "Le non valaisan est toutefois et avant tout une gifle adressée au CIO. Car le seul et véritable coupable de cette déconfiture, c'est bien lui". "En clair, le bon peuple refuse désormais d'accorder son blanc-seing à une institution qui multiplie les choix douteux et les affaires de corruption depuis bien trop longtemps (...)".

"Chance ratée"

Et personne n'a cru aux promesses des promoteurs qui assuraient que le Valais inventerait les premiers Jeux durables, constate La Tribune de Genève. Parmi les commentateurs helvétiques, seul le Blick se montre bien amer et considère ce refus comme une "chance ratée" de montrer au monde "qu'il est possible de faire des JO autrement".

Le CIO a perdu toute crédibilité. Non seulement en Valais, mais aussi dans la plupart des autres démocraties, conclut le Walliser Bote, qui regrette toutefois l'issue du scrutin: le Hauts-Valais est la seule des trois régions du canton à avoir appuyé le projet.

La Liberté relève toutefois que les partisans du "non" ne manqueront pas de regarder quand même les compétitions à la télévision. Les Jeux je les veux, mais chez eux, surtout pas chez moi...", résume le quotidien fribourgeois. Il ne nous reste donc plus qu'à ronchonner sur la propagande russe de Vladimir Poutine devant les mondiaux de football, selon cette morale équivoque "que nous aimons bien entretenir", souligne le Blick.

Quel projet valaisan?

"Bien sûr, les JO "brutalement enterrés hier, sont apparus aux yeux de la population comme un vieux truc sorti du chapeau 'pour faire bouger le canton'", analyse le Temps. Mais ils "auraient eu le mérite de relancer l’investissement et de donner un coup de projecteur salutaire sur la région".

Le Matin ne cache pas un certain soulagement, après une campagne délétère: "S'arrêter ici, c'est éviter le point de non-retour dans l'invective". "Et plus profondément, ce résultat montre aussi que le Valais s'est affranchi d'un certain tourisme à l'ancienne avec les "lattes" pour seule raison d'être. Tout reste à faire dans le calme retrouvé", conclut le quotidien orange.

En refusant les Jeux, les Valaisans donnent un signal: "ils souhaitent que l’Etat investisse dans des projets qui leur soient plus utiles", enchaîne La Liberté. Le Valais doit maintenant trouver un grand projet fédérateur, après ce vote qui a divisé les chaumières, "un projet ambitieux en adéquation avec les valeurs qu’il porte aujourd’hui", souligne 24 heures. Reste à savoir lequel.

ats

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