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Les arbres souffrent de stress hydrique

Une succession d'étés chauds et secs - ici l'Emme à Aefligen (BE) fin juillet - pourrait accélérer les changements déjà en cours dans la répartition des espèces d'arbres (archives). © KEYSTONE/PATRICK HUERLIMANN
Une succession d'étés chauds et secs - ici l'Emme à Aefligen (BE) fin juillet - pourrait accélérer les changements déjà en cours dans la répartition des espèces d'arbres (archives). © KEYSTONE/PATRICK HUERLIMANN


Publié le 07.08.2018


Avec la canicule, les arbres souffrent de stress hydrique, et une mortalité accrue n'est pas à exclure pour certaines espèces. Mais pour qu'une modification de leur répartition sur le Plateau intervienne, de telles chaleurs devraient se répéter sur plusieurs années.

Le stress hydrique chez les arbres se manifeste à différents degrés, a indiqué à Keystone-ATS Roman Zweifel, de l'Institut fédéral de recherche sur la forêt, la neige et le paysage (WSL). Dans un premier temps, l'arbre économise de l'eau en fermant ses stomates, soit les pores situés sur les feuilles principalement. Il perd moins d'eau et assimile moins de carbone.

Dans une deuxième phase, l'arbre stoppe sa croissance. Si la sécheresse persiste, les feuilles jaunissent ou brunissent. Dans des cas extrêmes, chez le chêne ou le hêtre notamment, des branches entières peuvent tomber, et des résineux peuvent complètement sécher.

"Mais pour qu'un arbre meure, il faut souvent des facteurs secondaires comme le bostryche, des champignons ou des tempêtes. Chez les feuillus, nous partons du principe que les mécanismes de défense sont dans la plupart des cas suffisants pour résister à la sécheresse actuelle", explique M. Zweifel.

Mélanges d'espèces

Un avis partagé par Sabine Augustin, collaboratrice scientifique à la section Protection et santé des forêts de l'Office fédéral de l'environnement (OFEV). Sur le plus long terme, l'élément décisif sera la météo de 2019.

Une "année normale" avec suffisamment de précipitations permettrait aux arbres de se rétablir, ce qui ne sera pas le cas si elle est de nouveau inhabituellement sèche et chaude. En tout état de cause, on en saura plus d'ici septembre, avec les résultats de l'inventaire forestier pour cette année, selon Mme Augustin.

A plus longue échéance, il faut s'attendre à ce que certaines espèces indigènes soient contraintes de se retirer dans des lieux plus adaptés à leurs besoins. "Nous misons de plus en plus sur des mélanges d'espèces qui réduisent ce type de risque", ajoute la spécialiste.

Le pin cède la place

Selon le WSL, des modifications de la composition des forêts sont en cours dans toute l'Europe. En Suisse, elles sont spécialement visibles en Valais, où le pin sylvestre cède la place au chêne en de nombreux endroits.

"Sur le Plateau, un changement aussi rapidement visible n'est pas attendu", selon M. Zweifel. Il faudrait des étés chauds et secs sur plusieurs années, voire décennies. Néanmoins, des études ont montré que le sapin blanc est mieux armé que le sapin rouge - ou épicéa - et le hêtre face au réchauffement.

L'épicéa pourrait ainsi se voir repoussé dans les régions subalpines ou de montagne, et le chêne prendre la place du hêtre parmi les feuillus. Ce dernier a une certaine tolérance à la chaleur, pour autant qu'il trouve suffisamment d'eau dans le sol.

"Mais lorsque la sécheresse s'ajoute à la chaleur comme ces dernières semaines, le hêtre souffre, ainsi qu'en témoignent ses feuilles brunies", note M. Zweifel.

Une étude réalisée dans le cadre du Programme de recherche "Forêts et changements climatiques" de l'OFEV et du WSL avait montré l'an dernier que le patrimoine génétique des arbres n'est pas en mesure de s'adapter assez vite à l'évolution actuelle.

Cet été 2018 caniculaire fait suite à celui de 2017, qui avait déjà été le troisième plus chaud depuis le début des mesures, après 2003 et 2015.

ats

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