La Liberté

Les djihadistes ratent une échéance à Idleb, l'accord en danger

L'accord russo-turc prévoit une zone démilitarisée pour séparer les territoires du régime Assad de ceux encore tenus par les rebelles et djihadistes dans la province d'Idleb. Les premiers l'ont officiellement endossé; les seconds refusent de cesser les combats. © KEYSTONE/AP/UGUR CAN
L'accord russo-turc prévoit une zone démilitarisée pour séparer les territoires du régime Assad de ceux encore tenus par les rebelles et djihadistes dans la province d'Idleb. Les premiers l'ont officiellement endossé; les seconds refusent de cesser les combats. © KEYSTONE/AP/UGUR CAN


Publié le 15.10.2018


Le principal groupe djihadiste à Idleb a ignoré le délai pour son retrait d'une future zone tampon dans cette province de la Syrie en guerre. De quoi jeter un doute lundi sur un accord censé prévenir un nouveau bain de sang.

L'accord a été conclu le 17 septembre par la Turquie, soutien des rebelles, et la Russie, alliée du régime Bachar al-Assad, pour éviter une offensive de l'armée contre cet ultime grand fief insurgé et djihadiste du pays, qui risquerait selon l'ONU de provoquer une "catastrophe humanitaire".

L'accord prévoit une "zone démilitarisée" pour séparer les territoires du régime de ceux tenus par les rebelles et djihadistes. Une première échéance sur le retrait de toutes les armes lourdes de secteurs qui doivent former cette zone avant le 10 octobre, a été respectée. Mais celle du retrait des djihadistes de ces mêmes secteurs avant le 15 octobre ne l'a pas été.

"Les djihadistes ne se sont retirés d'aucun secteur de la zone démilitarisée" qui comprend, outre des secteurs d'Idleb, des parties des provinces voisines d'Alep, de Hama et de Lattaquié, a indiqué lundi à l'AFP le directeur de l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), Rami Abdel Rahmane.

Le groupe Hayat Tahrir al-Cham (HTS), issu de l'ex-branche syrienne d'Al-Qaïda et qui contrôle la majorité de la province d'Idleb (nord-ouest), a promis de poursuivre le combat, à quelques heures de l'expiration du délai pour son retrait. "Nous n'abandonnerons pas le choix du djihad et du combat pour réaliser les objectifs de notre révolution bénie, en premier lieu faire tomber le régime criminel", a écrit le groupe. "Nous n'abandonnerons pas nos armes".

Il n'a toutefois pas clairement dit s'il rejetait l'accord russo-turc, alors qu'il avait retiré ses armes lourdes de la future zone tampon en application de l'accord selon l'OSDH.

"Donner du temps"

Dans une référence implicite à la Turquie, HTS a dit "apprécier les efforts de tous ceux qui luttent à l'intérieur et à l'extérieur de la Syrie pour protéger les zones libérées (du régime) et empêcher leur destruction ou des massacres". HTS ainsi que d'autres groupes djihadistes contrôlent plus des deux tiers de la future zone tampon.

Semblant ne pas trop accorder d'importance au délai, le régime syrien, par la voix de son chef de la diplomatie Walid Mouallem, a affirmé lundi que son pays avait besoin de "temps" pour vérifier la mise en oeuvre de l'accord. Il avait précédemment dit que celui-ci pourrait prendre jusqu'à décembre pour être exécuté.

Craintes ravivées

La semaine dernière, Moscou a semblé dire qu'elle pourrait accepter un bref retard dans l'application de l'accord. Son ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov avait ainsi dit qu'un retard d'un ou deux jours dans la mise en place de la zone tampon ne ferait aucune différence.

Vendredi dernier, des habitants autour d'Idleb avaient reçu des messages d'avertissement sur leurs téléphones portables envoyés par l'armée syrienne. "Eloignez-vous des combattants. Leur destin est scellé", disait l'un des messages.

Le risque d'un effondrement de l'accord russo-turc a d'ailleurs ravivé les craintes parmi la population et des ONG locales. Celles-ci ont affirmé craindre, dans un communiqué publié ce week-end, "une résurgence de la spirale de violences si l'accord échoue".

Le régime Assad, qui a repris plus de la moitié du pays avec l'aide militaire cruciale de la Russie, se dit déterminé à reconquérir la totalité du territoire. Le marché Ankara-Moscou est le dernier en date d'une série d'accords de trêve conclus au cours des sept années de guerre en Syrie, qui ont fait plus de 360'000 morts et des millions de déplacés et réfugiés.

ats, afp

Articles les plus lus
Dans la même rubrique
La Liberté - Bd de Pérolles 42 / 1700 Fribourg
Tél: +41 26 426 44 11