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Les fabricants d'armes et la NRA sous pression

Toute une génération de jeunes Américains en croisade contre les armes à feu, comme ici en Floride © KEYSTONE/AP/GERALD HERBERT
Toute une génération de jeunes Américains en croisade contre les armes à feu, comme ici en Floride © KEYSTONE/AP/GERALD HERBERT


Publié le 25.02.2018


Montrés du doigt après le carnage au fusil d'assaut qui a fait 17 morts il y a dix jours dans un lycée de Floride, les fabricants d'armes subissent la défiance de grandes entreprises qui ont commencé à s'en distancer. Plusieurs contrats ont été cassés depuis vendredi.

Sous la pression populaire exprimée sur les réseaux sociaux, les loueurs de voitures Hertz et Enterprise, les assureurs Metlife et Chubb, ainsi que la société de sécurité informatique Symantec ne veulent plus être associés à la NRA, le puissant lobby des armes.

L'une après l'autre, ces sociétés ont officiellement mis fin à leurs partenariats respectifs. Dans la plupart des cas, ces partenariats reposaient sur de multiples avantages accordés à des membres de la NRA souhaitant par exemple louer une voiture, prendre l'avion ou obtenir une assurance spécifique.

"Les réactions des clients nous ont poussés à revoir nos relations avec la NRA", a tweeté ce week-end First National Bank of Omaha, un des plus gros émetteurs de cartes de crédit aux Etats-Unis.

Bank of America hésite encore

Samedi, ce sont les compagnies aériennes Delta Air Lines et United Airlines qui ont annoncé sur Twitter supprimer les réductions accordées jusqu'ici aux membres de la NRA. Elles ont demandé dans des communiqués distincts au lobby des armes aux Etats-Unis de supprimer de son site les informations sur leurs tarifs préférentiels.

Et l'une des plus grosses banques du pays, Bank of America, va réexaminer ses relations avec les fabricants d'armes. "Nous nous joignons à d'autres groupes de notre secteur pour voir ce que nous pouvons faire pour arrêter la tragédie des fusillades meurtrières", a indiqué la banque. Elle va "contacter le nombre limité de ses clients qui fabriquent des fusils d'assaut à usage non-militaire pour voir comment ils peuvent contribuer à cette responsabilité partagée".

"Il y a actuellement beaucoup de réactions hostiles" envers l'industrie des armes, explique Jeff Pistole, un vendeur d'armes de l'Arkansas. "Au départ, les fabricants se disaient avec Trump président, nous ne sommes pas inquiets d'un durcissement de la réglementation sur les armes".

Mais la dynamique a changé, selon lui, après l'attaque menée le 14 février par un jeune homme de 19 ans contre son ancien lycée à Parkland, là où 17 personnes ont perdu la vie, surtout des ados.

Sous la pression des jeunes

Traditionnellement, les ventes d'armes bondissent aux Etats-Unis après une fusillade, ceci par crainte d'un resserrement de la règlementation, mais la demande retombe souvent aussitôt parce que les condamnations politiques ne sont pas suivies par des mesures concrètes, résume M. Pistole.

Mais cette fois-ci, certains élèves rescapés sont devenus les figures d'un mouvement national spontané qui interpelle les élus afin qu'ils agissent pour durcir la législations sur les armes.

Sous pression, Donald Trump a demandé au ministère de la Justice d'améliorer les vérifications d'antécédents psychiatriques et judiciaires des acquéreurs d'armes à feu. Il s'est dit en faveur d'un relèvement de l'âge légal pour acheter certaines armes.

Dépôt de bilan chez Remington

Les actions des fabricants d'armes en sont affectées à Wall Street: le titre de Sturm Ruger a perdu 4% de sa valeur en Bourse depuis le 14 février, celui d'American Outdoor Brands, connu par le passé sous le nom Smith & Wesson, a abandonné 5,8%, et Vista Outdoor Inc, spécialiste des munitions, 6,1%.

Ces pressions tombent mal pour le secteur qui traverse une période déjà difficile, marquée par des suppressions d'emplois et des réductions d'activité dans les usines.

Plombée par une dette colossale, Remington Outdoor, société fondée il y a plus de 200 ans, envisage de déposer le bilan dans les prochains jours. Sturm Ruger a supprimé en 2017 environ 700 emplois, soit 28% de ses effectifs. Son chiffre d'affaires a chuté de 22% et son bénéfice de 40%, en raison d'une baisse du prix des armes.

L'industrie pâtit de stocks importants amassés avant novembre 2016 dans la crainte d'une victoire de la démocrate Hillary Clinton, favorable à des lois plus restrictives sur les armes, selon des experts.

ats, afp

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