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Pas de condamnation sur la base des images d'une GoPro

Pour le Tribunal fédéral, une caméra GoPro accrochée au guidon d'un cyclomoteur doit être assimilée à une dashcam en matière d'admission des preuves (archives). © KEYSTONE/CHRISTIAN BEUTLER
Pour le Tribunal fédéral, une caméra GoPro accrochée au guidon d'un cyclomoteur doit être assimilée à une dashcam en matière d'admission des preuves (archives). © KEYSTONE/CHRISTIAN BEUTLER


Publié le 25.11.2020


Le Tribunal fédéral annule la condamnation d'un conducteur après une manoeuvre jugée hasardeuse. La justice vaudoise s'était basée sur les images enregistrées par une caméra GoPro accrochée au guidon du cyclomoteur dépassé.

L'automobiliste avait été condamné pour violation simple et grave des règles de la circulation routière. Il avait écopé d'une peine de 30 jours-amendes à 300 francs et d'une amende de 3000 francs. L'incident s'était déroulé à l'avenue du Denantou, à Lausanne: l'enregistrement montrait que l'automobiliste avait klaxonné, dépassé et fait une queue de poisson au cyclomotoriste.

Dans un arrêt publié mercredi, le Tribunal fédéral admet le recours du conducteur qui estimait que l'enregistrement vidéo avait été obtenu illégalement, sans son consentement. Les juges rappellent que de telles preuves produites par des particuliers doivent être traitées de la même manière que celles recueillies par les autorités: seule la résolution d'infractions graves permet de les exploiter.

Décourager les "apprentis shérifs"

Pour la Cour de droit pénal, la jurisprudence en matière de caméra fixée au tableau de bord ("dashcam") est applicable également à la GoPro. Dans un arrêt récent, le Tribunal fédéral a souligné que les autres usagers sont filmés à leur insu et que de tels enregistrements sont illicites. En effet, l'intérêt privé du "maître des données" (qui filme la scène) cède le pas sur les intérêts de la personne atteinte dans sa personnalité.

Les juges de Mon Repos ajoutent que de tels enregistrements se font en continu et sans discrimination, sur tout le parcours effectué par le conducteur. En ce sens, les caméras de bord s'apparentent à des systèmes de surveillance de l'espace public, une compétence réservée à l'Etat pour assurer la surveillance du trafic.

La cour rejoint ainsi l'avis du Préposé fédéral à la protection des données qui estime que de tels enregistrements "ne devraient être utilisés ni comme divertissement, ni comme moyen de preuve en cas de délits mineurs, comme des manoeuvres risquées mais banales". Pour le tribunal comme pour le préposé, "il faut éviter de jouer à l'apprenti shérif".

En l'espèce, les magistrats relèvent que les infractions retenues et le fait que le dépassement n'ait pas entraîné d'accident excluent tout motif justificatif dans la pesée des intérêts. Autrement dit, le dépassement n'atteint pas une gravité telle que l'enregistrement puisse être retenu devant la justice.

En revanche, la demande du recourant qui exigeait que le rapport de police et les auditions soient déclarés aussi inexploitables car dérivés de la vidéo est rejetée. Ces preuves auraient pu être recueillies indépendamment mais les passages évoquant l'enregistrement devront être écartés lorsque la justice vaudoise se saisira à nouveau du dossier. (arrêt 6B_1282/2019 du 13 novembre 2020)

ats

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