La Liberté

Pékin adopte à marche forcée une loi sur la sécurité sur Hong Kong



Publié le 30.06.2020


La Chine a adopté mardi une loi controversée sur la sécurité nationale à Hong Kong, suscitant des condamnations au niveau international. Ce texte est perçu par ses détracteurs comme une manière de museler l'opposition dans le territoire autonome.

Ignorant les appels des Occidentaux, le parlement national a voté à l'unanimité ce texte qui intervient un an après le début des manifestations monstres dans l'ex-colonie britannique contre l'influence du gouvernement central.

Échaudé par ces évènements, Pékin aura imposé en quelques semaines cette loi qui contourne le conseil législatif local et fait craindre à l'opposition hongkongaise un recul inédit des libertés depuis la rétrocession de Hong Kong à la Chine en 1997.

La nouvelle législation a été promulguée dans la foulée par le président chinois Xi Jinping et incorporé dans la "Loi fondamentale", qui sert depuis 1997 de mini-constitution à Hong Kong.

Le texte devait entrer en vigueur mardi déjà, a précisé la cheffe de l'exécutif hongkongais Carrie Lam. Dans un message vidéo diffusé à l'ouverture de la 44e session du Conseil des droits de l'Homme de l'ONU à Genève, Mme Lam a encore affirmé que la nouvelle loi ne visait qu'une "très petite minorité" de personnes.

Plus explicite, le bureau des affaires de Hong Kong et Macao a parlé d'"un glaive" suspendu au-dessus de la tête de ceux qui menacent la sécurité nationale. "Pour la grande majorité des habitants de Hong Kong (...) la loi est un ange gardien qui défend leurs libertés", selon un communiqué.

Quatre types de crimes

Pour le gouvernement central, il s'agit avec cette loi d'assurer la stabilité, de mettre fin au vandalisme ayant émaillé les manifestations de 2019 dans la ville de 7,5 millions d'habitants, ainsi que d'y réprimer le courant pro-indépendance. Pour l'opposition pro-démocratie de Hong Kong et pour plusieurs pays occidentaux dont les Etats-Unis, cette loi constitue une attaque contre l'autonomie et les libertés du territoire.

La nouvelle loi permet de réprimer quatre types de crimes contre la sécurité d'Etat: les activités subversives, la sécession, le terrorisme et la collusion avec des forces étrangères visant à mettre en danger la sécurité nationale.

Dans ce domaine, la Chine continentale peut directement prendre en charge les dossiers dans trois hypothèses : s'il s'agit d'affaires complexes d'ingérence étrangère, si les cas sont "très graves" et si des "menaces graves et réelles" pèsent sur la sécurité nationale.

"A la fois l'agence de sécurité nationale et (les autorités de) Hong Kong peuvent demander de renvoyer l'affaire en Chine continentale et les poursuites seront engagées par le Parquet populaire suprême (chinois) et le procès se déroulera à la Cour suprême" de Chine, d'après le texte.

"Peu importe qu'il ait été recouru à la violence ou qu'il y ait eu une menace d'en faire usage, les leaders ou les auteurs de (crimes) graves seront condamnés à la prison à vie ou à un minimum de dix ans d'emprisonnement", toujours en vertu de la nouvelle législation. "Le gouvernement de Hong Kong n'a pas autorité sur l'agence de sécurité nationale à Hong Kong et son personnel lorsqu'ils s'acquittent de leurs obligations prévues dans cette loi".

"La fin"

"Cela marque la fin de Hong Kong tel que le monde la connaissait. Avec des pouvoirs étendus et une loi mal définie, la ville se transformera en un #étatdepolicesecrète", a twitté mardi Joshua Wong, l'une des figures du mouvement pro-démocratie hongkongais.

Le parti politique Demosisto, qu'il a fondé avec d'autres militants en 2014, a annoncé mardi sa dissolution. Cette formation appelait notamment à l'auto-détermination du territoire - une position qui pouvait potentiellement tomber sous le coup de la nouvelle loi.

Depuis sa rétrocession, Hong Kong jouit d'une large autonomie par rapport à la Chine continentale, en vertu du principe "Un pays, deux systèmes". Les Hongkongais bénéficient ainsi de la liberté d'expression, de la liberté de la presse et d'une justice indépendante.

L'UE condamne

Les gouvernements occidentaux s'inquiétent pour le statut international de la ville, l'une des principales places financières mondiales. Cette loi "risque de miner sérieusement le principe 'Un pays, deux systèmes' et le haut degré d'autonomie ainsi que la prospérité de Hong Kong", a réagi mardi pour l'AFP Nicolas Chapuis, ambassadeur de l'Union européenne (UE) en Chine.

Les ministres des Affaires étrangères du G7 avaient également appelé à revenir sur ce projet. Anticipant le vote, Washington avait annoncé lundi la fin des ventes d'équipement de défense sensible à Hong Kong pour éviter "qu'il tombe aux mains" de l'armée chinoise. Pékin a promis mardi des "représailles".

Mardi, ce sont 27 pays, dont la Suisse, qui ont demandé à Pékin de "réexaminer" la nouvelle législation qui "menace" les libertés à Hong Kong, dans un communiqué au Conseil des droits de l'homme à Genève.

ats, afp

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