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Petit poisson n'éclora pas: la faute à la pollution lumineuse

La pollution lumineuse menace les poissons-clowns. des oeufs qui avaient été soumis à la lumière artificielle la nuit dans le cadre d'une étude n'ont pas éclos (archives). © KEYSTONE/EPA/AHMAD YUSNI
La pollution lumineuse menace les poissons-clowns. des oeufs qui avaient été soumis à la lumière artificielle la nuit dans le cadre d'une étude n'ont pas éclos (archives). © KEYSTONE/EPA/AHMAD YUSNI


Publié le 10.07.2019


Les poissons-clowns, popularisés par le dessin animé "Le monde de Nemo", sont confrontés à un ennemi sournois: la pollution lumineuse. Cette dernière menace leur éclosion, alerte mercredi une étude australienne.

Facilement reconnaissable à sa livrée orange et ses bandes blanches bordées d'un trait noir, le poisson-clown commun, Amphiprion ocellaris, vit près des récifs coralliens, où la lumière artificielle ne cesse de se renforcer.

De fait, le littoral bordant les récifs de corail est de plus en plus exposé à de l'éclairage LED avec l'essor des constructions le long des côtes, le développement des ports et des docks, pointent des chercheurs de l'université Flinders (Australie), auteurs de l'étude. Les navires de croisière et les hôtels flottants éclairent eux aussi la surface des eaux marines qui attirent les touristes.

Pour connaître l'impact de cette lumière artificielle la nuit sur les poissons clowns, l'équipe de scientifiques a étudié en laboratoire dix couples reproducteurs, dont cinq, constituant le groupe témoin, étaient exposés à une luminosité classique, avec alternance de jour et de nuit.

Taux d'éclosion nul

Les aquariums des cinq autres couples - au centre de l'expérience - étaient éclairés par le haut pendant la nuit avec une lumière LED d'intensité modérée (25 à 28 lux), comparable à celle qui éclaire la surface de l'océan près des rivages habités.

Les premières étapes de la reproduction se sont passées normalement. "Il n'y a pas eu de différences significatives sur la fréquence du frai entre le groupe témoin et le groupe soumis à la lumière artificielle nocturne", note l'étude publiée dans Biology Letters (Royal Society).

Les femelles ont pondu leurs oeufs, qui ont été ensuite fécondés par les mâles. Pendant la période embryonnaire, les parents se sont occupés ensemble des oeufs. Normalement, l'éclosion doit avoir lieu le soir du huitième jour environ.

Mais pour les oeufs qui avaient été soumis à la lumière artificielle la nuit, "le taux d'éclosion a été de 0%", constate l'étude. Il n'y a eu aucune progéniture...

"Repère"

"J'ai été surprise d'obtenir des résultats aussi nets", déclare à l'AFP Emily Fobert, chercheuse associée en biodiversité et conservation à l'université Flinders et co-auteur de l'étude.

"Notre étude montre clairement que la pollution lumineuse a le potentiel d'interférer avec le succès reproducteur des poissons-clowns, estime-t-elle.

Les chercheurs n'ont pas étudié le mécanisme précis qui a inhibé l'éclosion des poissons-clowns en présence de lumière artificielle la nuit. "Mais nous pensons que ces oeufs n'ont jamais expérimenté l'obscurité, qui pourrait être un repère nécessaire pour déclencher l'éclosion", avance Emily Fobert.

Pour autant il est difficile pour les chercheurs de prédire comment cette pollution lumineuse nocturne est susceptible d'affecter la dynamique des populations de poissons-clowns sur le terrain.

Des larves mobiles

Car contrairement à ce que fait croire "Le monde de Nemo", le film des studios Pixar, produit par Disney, sorti en 2003, "les bébés poissons clowns ne restent pas dans l'anémone (urticante) dans laquelle ils sont nés" et qui les protège de leurs prédateurs, relève Emily Fobert. "Ils peuvent trouver une nouvelle maison à des dizaines voire des centaines de kilomètres de leurs parents".

"Cela veut dire que même dans une zone frappée d'une forte pollution lumineuse, empêchant l'éclosion, la population locale pourrait être renforcée par des larves arrivant d'autres récifs coralliens", note-t-elle.

La pollution lumineuse touche 23% de la superficie terrestre (hors pôles), selon une étude de 2016. Et 22% des régions côtières expérimentent à des degrés divers une illumination artificielle, selon une autre étude parue en 2014.

ats, afp

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