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Plus question d'échapper à une peine en retournant dans son pays

Laurent Ségalat lors du procès en appel au Tribunal cantonal vaudois en novembre 2012 (archives). © KEYSTONE/LAURENT GILLIERON
Laurent Ségalat lors du procès en appel au Tribunal cantonal vaudois en novembre 2012 (archives). © KEYSTONE/LAURENT GILLIERON


Publié le 23.05.2018


Les étrangers ne devraient plus pouvoir échapper à une peine en retournant légalement dans leur pays d'origine. Le Conseil fédéral a soumis à l'aval du Parlement un amendement. Il fait référence au cas d'un Français qui n'est autre que Laurent Ségalat.

Il faut "éviter que des personnes condamnées restent impunies." La Suisse a participé "activement" à l'élaboration de l'amendement au Protocole additionnel à la Convention du Conseil de l'Europe sur le transfèrement des personnes condamnées, souligne mercredi le Conseil fédéral.

Affaire retentissante

Dans son message, le gouvernement se réfère à une affaire qui a fait grand bruit dans le canton de Vaud et au-delà. S'il parle d'un Français sans le nommer, il s'agit en fait de Laurent Ségalat condamné à 14 ans de prison pour avoir tué sa belle-mère à Vaux-sur-Morges (VD) en janvier 2010, ce qu'il a toujours nié.

Blanchi en première instance, le généticien français a été condamné en appel fin 2012. Il ne s'est pas présenté au tribunal lors de l'annonce du verdict, regagnant la France où il vit libre depuis, même s'il est officiellement recherché par la Suisse. Précision d'importance: il n'avait pas fui le territoire helvétique, mais l'avait quitté tout à fait légalement.

Refus de Paris

Après de nombreux épisodes juridiques, la France a annoncé en mai 2015 son refus de faire exécuter la peine infligée à Laurent Ségalat. Elle jugeait que "les conditions n'étaient pas réunies." Autrement dit: faute de base légale.

Face à cette situation, le conseiller national Olivier Feller (PLR/VD) a déposé une motion. Il demandait précisément au Conseil fédéral d'oeuvrer à la révision de la Convention. A ses yeux, l'issue de l'affaire Ségalat n'était "pas tolérable". Aujourd'hui, il se félicite que son intervention ait été finalement prise au sérieux et que Berne ait "agi".

Coopération internationale

Avec son texte, le Conseil fédéral entend "corriger les insuffisances constatées et améliorer la coopération internationale." L'amendement crée les bases légales nécessaires pour qu'une affaire Ségalat ne se reproduise plus. Il rappelle que le ressortissant français ne s'était pas enfui et qu'il s'était "rendu en toute légalité dans son pays alors que la procédure d'appel était en cours".

L'avancée judiciaire reste pourtant relative. L'amendement, comme la convention sur le transfèrement, ne sera pas contraignant. Il ne crée "aucune obligation pour les parties" et le Conseil fédéral table sur "la bonne foi". Il considère que les Etats ratifiant le texte "seront a priori disposés à l'appliquer et à donner suite aux demandes."

Pas d'effet rétroactif

Concernant l'affaire Ségalat elle-même, l'Office fédéral de la justice répond ainsi à l'ats. "La demande suisse a été refusée formellement en 2015 et le nouvel instrument n'a pas d'effet rétroactif". Toutefois, la Suisse pourrait en principe transmettre une nouvelle demande à la France pour autant que cette dernière se soit engagée dans la voie d'une application provisoire de l'amendement,

Plus généralement, Berne insiste sur sa volonté de lutter contre l'impunité et "d'instaurer le respect du droit dans un contexte élargi". C'est "un objectif prioritaire de la politique pénale suisse": éviter qu'une personne condamnée en Suisse puisse se soustraire à l'exécution en retournant dans son Etat d'origine, quelle que soit la façon dont elle s'y prend, martèle le Conseil fédéral.

Encore du chemin

L'Office fédéral de la justice précise que la Suisse devrait ratifier l'amendement durant la première partie de 2019. Le texte n'entrera en vigueur que lorsque toutes les parties auront exprimé leur consentement, une application provisoire restant possible à certaines conditions, relève l'office.

ats

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