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St-Gall devient le deuxième canton à interdire la burqa

Pour les partisans de l'interdiction à St-Gall, "il appartient à notre culture et nos valeurs de pouvoir se regarder mutuellement et non dissimulé dans les yeux" (archives). © KEYSTONE/PETER KLAUNZER
Pour les partisans de l'interdiction à St-Gall, "il appartient à notre culture et nos valeurs de pouvoir se regarder mutuellement et non dissimulé dans les yeux" (archives). © KEYSTONE/PETER KLAUNZER


Publié le 23.09.2018


St-Gall devient le deuxième canton, après le Tessin, à interdire la burqa. Les votants ont clairement approuvé dimanche par 66,65% une loi rendant punissable toute personne se dissimulant le visage dans l'espace public, pour autant que cela menace la sécurité.

Les citoyens ont confirmé la modification de la loi sur les contraventions que le parlement a approuvé de justesse en novembre dernier par 57 voix contre 55. La participation s'est élevée à 35,82%.

L'UDC et le PDC soutenaient la loi. Le PLR et la gauche la combattaient. Les sections jeunes des socialistes, des Verts et des Vert'libéraux avaient saisi le référendum.

Pour les partisans de l'interdiction,"il appartient à notre culture et nos valeurs de pouvoir se regarder mutuellement et non dissimulé dans les yeux", pouvait-on lire dans la brochure de votation. Un argument qui vise directement les femmes portant la burqa ou le niqab.

Le Conseil d'Etat s'est opposé au texte, faisant valoir en vain qu'une telle interdiction touchait à des droits fondamentaux sans qu'il n'y ait pour autant un intérêt public. Mandaté via une motion d'élaborer une base légale sur la dissimulation du visage dans l'espace public, il avait proposé une interdiction lors de contacts avec les autorités. Une idée rejetée par les députés pour qui elle n'allait pas assez loin.

Les opposants dénonçaient par ailleurs une loi inutile, puisqu'il n'y a pratiquement pas de femmes portant la burqa à St-Gall. Le canton disposait en outre déjà d'une interdiction de se dissimuler le visage pour les rassemblements soumis à autorisation et autres manifestations sportives.

Ministre pas surpris

Conseiller d'Etat à la tête de la Direction de justice et police, Fredy Fässler (PS) n'est pas surpris par l'issue du scrutin. La nouvelle loi ne va toutefois pas avoir grand effet, a souligné le ministre contacté par Keystone-ATS dimanche.

"Je n'ai personnellement encore jamais vu une femme en burqa dans le canton de St-Gall", a dit Fredy Fässler. Difficile aussi d'imaginer une situation dans laquelle les conditions d'une interdiction seraient remplies. Le ministre part du principe que la police n'infligera pas d'amende aux intéressées.

La Fédération d'organisations islamiques de Suisse (FOIS) abonde. La question est de savoir comment la police va interpréter la condition de menace pour la sécurité, s'interroge le porte-parole Pascal Gemperli, contacté par Keystone-ATS.

Pour lui, le résultat du vote montre bien la "peur irrationnelle" qui entoure l'islam. "Les gens n'ont pas peur de la burqa. C'est une peur plus profonde alimentée par le terrorisme et l'image principalement négative de l'islam véhiculée dans les médias".

Fans de foot touchés

St-Gall devient ainsi le deuxième canton à interdire la burqa. Au Tessin, une telle interdiction est en vigueur depuis deux ans.

Le texte tessinois interdit toute dissimulation du visage dans l'espace public à quelques exceptions près, comme des raisons de sécurité ou encore des manifestations religieuses ou traditionnelles.

Selon un bilan paru cet été, les premiers touchés par cette loi sont les fans de football. Les cas de femmes en burqa mises à l'amende se comptent sur les doigts de la main.

Initiative fédérale

Le thème est aussi d'actualité à l'échelle nationale. L'initiative "Oui à l'interdiction de se dissimuler le visage", lancée par le Comité d'Egerkingen, a formellement abouti en octobre dernier. Le texte anti-burqa prévoit que personne ne devrait avoir le droit de dissimuler son visage dans l'espace public en Suisse.

Le Conseil fédéral s'oppose à une interdiction de la burqa au niveau fédéral et rejette cette initiative. Celle-ci s'attaque à une pratique qui reste marginale et empiète sur l'autonomie des cantons.

En juin, le gouvernement a mis en consultation un projet plus souple. Il entend punir celui qui contraint une femme à se dissimuler le visage, tout en renforçant l'obligation d'enlever son voile dans certaines situations comme lorsqu'une identification visuelle est nécessaire.

Les cantons désireux d'aller plus loin seraient autorisés à le faire. L'initiative et le contre-projet pourraient passer en votation en 2019. Sur le plan cantonal, Zurich, Soleure ou Glaris ont refusé une telle interdiction.

ats

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