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Un avocat ne peut pas assister son client chez l'expert-psychiatre

Le Tribunal fédéral n'a pas accepté la présence de l'avocat d'un prévenu lors de l'entretien avec l'expert-pychiatre (archives). © KEYSTONE/LAURENT GILLIERON
Le Tribunal fédéral n'a pas accepté la présence de l'avocat d'un prévenu lors de l'entretien avec l'expert-pychiatre (archives). © KEYSTONE/LAURENT GILLIERON


Publié le 17.08.2018


Un prévenu souhaitait se faire accompagner par son avocat lors des entretiens chez le médecin chargé d'établir une expertise psychiatrique. Le Tribunal fédéral confirme le refus opposé par la justice argovienne à cette demande.

Le recourant faisait l'objet d'une procédure pour lésions corporelles simples, menaces, contrainte et infractions aux lois sur les stupéfiants, sur la circulation routière et sur les armes. Dans ce cadre, le Ministère public a ordonné une expertise psychiatrique.

Par la suite, une expertise complémentaire a été commandée. L'intéressé a alors demandé que l'expertise principale soit annulée et que son avocat puisse assister à l'entretien agendé pour la seconde expertise. Il souhaitait aussi que son conseil puisse poser des questions lors de cette séance.

Droits des parties

Dans un arrêt publié vendredi, le Tribunal fédéral a rejeté le recours formé par le prévenu contre le refus de la justice argovienne. Les juges de Mon Repos rappellent que le Ministère public et les tribunaux peuvent désigner des experts lorsqu'ils ne disposent pas eux-mêmes des connaissances techniques nécessaires pour juger d'une affaire.

Les parties peuvent se prononcer au préalable sur la personne de l'expert ainsi que sur les questions précises auxquelles il sera appelé à répondre dans son rapport, ajoute la cour. Lors des débats, elles peuvent encore contester l'expertise qui leur est communiquée au préalable et interroger son auteur.

Bien qu'une partie de la doctrine défende ce point de vue, le Tribunal fédéral souligne qu'une participation de la défense à l'expertise psychiatrique n'est pas prévue dans la procédure pénale. Une demande dans ce sens a d'ailleurs été rejetée lors des débats parlementaires sur le code de procédure pénale.

Pour les juges fédéraux, il importe en effet de distinguer les actes de procédure où la présence d'un avocat est autorisée - tel un interrogatoire par la police, une confrontation ou une reconstitution - de l'expertise psychiatrique. L'objectif de cette dernière est d'établir aussi objectivement que possible l'état de santé mentale du sujet.

Droit de se taire

A cet effet, il convient de créer les conditions les mieux à même de garantir, du point de vue scientifique, une telle appréciation. La présence d'un avocat, dont le devoir est de préserver les droits de son client, n'est guère souhaitable, estime le Tribunal fédéral. Qui rappelle que le sujet peut, de toute façon, refuser de répondre aux questions de l'expert et qu'il doit être informé de ce droit avant l'entretien.

Pour le Tribunal fédéral, la participation de l'avocat à l'expertise psychiatrique compliquerait sérieusement la démarche. Par souci d'égalité, les autres parties - telles que le Ministère public ou les représentants des coaccusés et des victimes - devraient aussi être admises. L'intervention de ces laïques pourrait entraver, voire empêcher, la démarche scientifique prévue par la loi. La protection de la personnalité du prévenu serait aussi mise à mal.

La cour n'a pas retenu non plus les griefs du recourant fondés sur ses droits fondamentaux. Elle a estimé que celui-ci n'avait pas invoqué des arguments convaincants permettant dans son cas d'autoriser, à titre exceptionnel, son avocat à participer à l'expertise. (arrêt 1B_520/2017 du 4 juillet 2018)

ats

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