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Un palais renaît de ses cendres pour les cent ans de l'indépendance

Le palais de Darulaman à Kaboul a été incendié plusieurs fois au fil des ans. Il a aussi été bombardé au cours de la guerre civile dans les années 1990. Ouvert aux quatre vents, il dépérissait lentement jusqu'à la décision en 2016 du président Ashraf Ghani de le restaurer (archives). © KEYSTONE/AP/Kamran Jebreili
Le palais de Darulaman à Kaboul a été incendié plusieurs fois au fil des ans. Il a aussi été bombardé au cours de la guerre civile dans les années 1990. Ouvert aux quatre vents, il dépérissait lentement jusqu'à la décision en 2016 du président Ashraf Ghani de le restaurer (archives). © KEYSTONE/AP/Kamran Jebreili


Publié le 18.08.2019


À l'intérieur de l'imposant bâtiment se dressant dans l'ouest de Kaboul, des ouvriers se hâtent pour achever leurs tâches. Le palais de Darulaman, après des décennies de ruine, est la pièce maîtresse des commémorations du centenaire de l'indépendance de l'Afghanistan.

Pendant près de trente ans, la vaste bâtisse, qui fait face aux montagnes entourant la ville, n'a montré que son squelette aux habitants de la capitale. Ce bâtiment emblématique de l'histoire afghane reflète à lui seul les troubles traversés par le pays durant des décennies de guerre.

Alors que la population espère conjuguer l'avenir avec le mot paix, dans l'attente d'un éventuel accord entre les Etats-Unis et les talibans, la République islamique d'Afghanistan entend célébrer brièvement son passé autour de Darulaman (nom arabe, que les Afghans traduisent par "maison de la paix"), construit au début du XXe siècle.

Le président Ashraf Ghani doit inaugurer le célèbre palais d'inspiration néo-classique ce lundi, date du centenaire de l'indépendance de l'Afghanistan vis-à-vis de l'influence britannique.

Un "message de paix"

Les travaux de réfection entamés en 2018 ont été colossaux. Du palais, il ne restait qu'un vaisseau fantôme: plus de toit, pas de fenêtres, des trous d'obus béants et d'innombrables impacts de balles. Pour Javid Hammad, chef de projet, la reconstruction de l'édifice marque un nouveau départ pour l'Afghanistan ravagé par 40 années de conflit depuis l'invasion soviétique de 1979.

"Le message du palais de Darulaman est un message de paix, de sécurité, de fraternité et de coexistence", a-t-il déclaré à l'AFP lors d'une récente visite de chantier où environ 500 ouvriers travaillaient sans relâche.

Cette rénovation à 10,5 millions de dollars a été une bénédiction pour la main-d'oeuvre de tout le pays. Les garnitures en cèdre dans les pièces à haut plafond proviennent de la province de Kunar (Est). Celles en marbre de la ville de Herat (Ouest).

Avis contrastés

Les travaux ne font cependant pas l'unanimité. Des voix se sont élevées face à leur coût dans un des pays les plus pauvres au monde.

"C'est une bonne chose de reconstruire le Darulaman, mais cet argent aurait pu être dépensé pour des infrastructure vitales pour l'Afghanistan, comme des barrages, des centrales électriques ou des ponts", estime Ali, un commerçant.

Un autre habitant de Kaboul, Ghulam Mohammad, suggère que le palais dévasté aurait dû rester en l'état, en témoignage du passé troublé de l'Afghanistan. "On aurait dû le laisser tel quel pour que les gens se souviennent de la brutalité de la guerre", observe-t-il, alors que la capitale continue d'être meurtrie, avec une affligeante régularité, par des attentats sanglants.

Londres et Kaboul ont signé le 19 août 1919 le Traité anglo-afghan par lequel la Grande-Bretagne a reconnu l'indépendance de l'Afghanistan et a promis que l'Inde britannique ne s'étendrait pas vers l'ouest au-delà du col de Khyber, à la frontière de ce qui est depuis 1947 le Pakistan.

Symbole de la modernité

Conçu par des architectes français et allemands et construit sur un promontoire par le roi Amanullah Khan au début des années 1920, le bâtiment se voulait le symbole d'un Afghanistan moderne.

Il a hébergé plusieurs ministères au cours des ans ainsi qu'une école de médecine ou un musée. Détruit par un premier incendie en 1968, le palais de Darulaman a ensuite été pris dans les feux croisés des 40 années de guerre qu'a traversé l'Afghanistan.

Incendié de nouveau lors du coup d'État communiste de 1978, il a ensuite été bombardé au cours de la guerre civile dans les années 1990. Ouvert aux quatre vents, il dépérissait lentement jusqu'à la décision en 2016 du président Ashraf Ghani de le restaurer.

Aujourd'hui, les Afghans espèrent que son renouveau soit aussi celui du pays, eux dont la plupart n'ont jamais connu autre chose que la guerre.

ats, afp

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