La Liberté

UNIGE: une zone du cerveau inactive chez les "égoïstes"

Certaines personnes sont préoccupées par les conséquences du changement climatique dans plusieurs décennies, d’autres non, et cela se remarque dans leur cerveau, selon cette étude (photo symbolique). © KEYSTONE/AP XINHUA/LI JIAN
Certaines personnes sont préoccupées par les conséquences du changement climatique dans plusieurs décennies, d’autres non, et cela se remarque dans leur cerveau, selon cette étude (photo symbolique). © KEYSTONE/AP XINHUA/LI JIAN


Publié le 25.04.2018


Des chercheurs genevois ont constaté par neuro-imagerie qu'une zone cérébrale permettant de se projeter dans l'avenir est inactive chez des personnes jugées "égoïstes". Ils ont soumis les participants à un questionnaire sur les conséquences du réchauffement.

"Nous nous sommes demandé ce que l’imagerie à résonance magnétique (IRM) peut nous apprendre sur la manière dont le cerveau traite les informations sur les conséquences du changement climatique dans le futur, et comment ce mécanisme diffère en fonction du caractère auto-centré ou non de la personne", explique Tobias Brosch, professeur à la Section de psychologie de l’Université de Genève (UNIGE), cité mercredi dans un communiqué de cette dernière.

Pour ce faire, les psychologues genevois ont relevé dans le rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) certaines prédictions comme la diminution des réserves d’eau potable, l’augmentation des conflits aux frontières ou encore les catastrophes naturelles.

Ils ont attribué une date plus au moins éloignée à chacune de ces conséquences: vers 2030 pour certaines, vers 2080 pour d'autres. Les chercheurs ont ensuite fait remplir un questionnaire standardisé pour mesurer des hiérarchies de valeurs à un panel de 36 participants, marquant les tendances égoïstes ou altruistes de chacun.

Dans l'IRM

Les sujets ont été placés un par un dans l’IRM et confrontés aux conséquences datées. Ils devaient répondre à deux questions sur une échelle de 1 à 8: Est-ce grave? Avez-vous peur?

"Le premier résultat que nous avons obtenu est que pour les personnes à tendance égoïste, le futur proche est beaucoup plus préoccupant que le futur lointain qui se déroulera après leur mort, alors que chez les personnes altruistes, cette différence disparaît, la gravité étant perçue comme identique", indique Tobias Brosch.

Les psychologues se sont concentrés sur l’activité du cortex ventromédian préfrontal (VMPFC), une zone du cerveau située au-dessus des yeux et utilisée lorsque le sujet se projette dans l’avenir et tente de le visualiser.

"Nous avons constaté que chez les personnes altruistes, cette zone cérébrale s’active plus fortement lorsque le sujet est confronté à des conséquences d’un futur lointain par rapport au futur proche, alors que chez une personne égoïste, il n’y a pas d’augmentation d’activité entre une conséquence dans le futur proche et une autre dans le futur lointain", ajoute le Pr Brosch.

Capacité de projection

Cette région cérébrale est principalement utilisée pour se projeter dans un avenir lointain, de l'ordre de plusieurs décennies, rapportent les scientifiques. L’absence d’augmentation d’activité chez une personne auto-centrée indique l’absence de projection et le fait que celle-ci ne se sent pas concernée par ce qui se passera après sa mort.

Applicables à d’autres domaines que le changement climatique, ces résultats démontrent l’importance de pouvoir se projeter dans un futur lointain afin d’adapter son comportement aux réalités du monde.

Les chercheurs suggèrent un entraînement psychologique qui ferait travailler cette zone cérébrale, par exemple grâce à la réalité virtuelle, capable de rendre visible à tout un chacun le monde de demain, et de rapprocher l’être humain des conséquences de ses actes. Ces travaux sont publiés dans la revue Cognitive, Affective & Behavioral Neuroscience.

ats

Articles les plus lus
Dans la même rubrique
La Liberté - Bd de Pérolles 42 / 1700 Fribourg
Tél: +41 26 426 44 11