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Vingt-cinq ans après l'initiative des Alpes, ses initiants ne voient pas le bout du tunnel

Le texte de l'initiative des Alpes a été accepté le 20 février 1994 par 51,9% de la population (archives). © KEYSTONE/STR
Le texte de l'initiative des Alpes a été accepté le 20 février 1994 par 51,9% de la population (archives). © KEYSTONE/STR
Les organisations environnementales et le PS des Grisons avait lancé la collecte des signatures en septembre 1989 (archives). © KEYSTONE/STR
Les organisations environnementales et le PS des Grisons avait lancé la collecte des signatures en septembre 1989 (archives). © KEYSTONE/STR
Pour les opposants, le texte était trop extrême (archives). © KEYSTONE/STR
Pour les opposants, le texte était trop extrême (archives). © KEYSTONE/STR


Publié le 20.02.2019


En acceptant l'initiative des Alpes avec 51,9% de oui le 20 février 1994, les Suisses décidaient de bouleverser leur politique des transports. Vingt-cinq ans plus tard, les auteurs du texte considèrent que le travail est loin d'être terminé.

Même si l'objectif de l'initiative - transférer le trafic marchandises de la route vers le rail - n'a toujours pas été atteint depuis, le président de l'association Initiative des Alpes se montre satisfait. "Le verre est à moitié plein, pas à moitié vide", estime dans une interview accordée à l'agence d'information Keystone-ATS le Grison Jon Pult, qui reconnaît des imperfections.

La loi d'application sur la protection des Alpes stipule que, deux ans après l'ouverture du tunnel de base du Saint-Gothard, c'est-à-dire à partir de 2018, seuls 650'000 camions peuvent traverser les Alpes chaque année. Cet objectif n'est pas atteint.

Moins de camions

Mais le succès de l'initiative reste incontestable. Si le nombre de camions traversant les Alpes a crû régulièrement jusqu'à 1,4 million par année entre 1980 et 2001, ce chiffre aujourd'hui est inférieur à un million et ne cesse de diminuer.

A titre de comparaison, la situation est bien différente aux passages alpins entre l'Autriche et l'Italie: aujourd'hui, plus de deux millions de camions traversent le Brenner chaque année, soit plus du double que le chiffre cumulé des passages aux Saint-Gothard, au San Bernardino, au Simplon et au Grand-Saint-Bernard réunis.

En Suisse, plus de 70% des marchandises en transit traversent les Alpes par le rail et la capacité de transport par ce biais n'est pas encore épuisée. Afin de transférer davantage de trafic marchandises vers le rail, l'Initiative des Alpes demande depuis des années au Conseil fédéral d'augmenter jusqu'au maximum possible la redevance poids lourds liée aux prestations (RPLP).

Selon M. Pult, cette adaptation rendrait le rail plus compétitif en termes de prix. Selon l'Initiative des Alpes, le transport routier génère de coûts de 1,5 milliard par année qui sont externalisés. "A moyen terme, les émissions de CO2 des camions devraient également être prises en compte dans le calcul de la RPLP", poursuit M. Pult. Ces émissions n'ont guère diminué depuis les années 1990.

Transporteurs routiers agacés

Une telle modification, l'Association suisse des transporteurs routiers (ASTAG) ne veut pas en entendre parler. "Cela ne ferait qu'augmenter le coût du trafic routier, qui, au final, serait répercuté sur les clients", argumente Adrian Amstutz, conseiller national (UDC/BE) et président de l'ASTAG.

Depuis 2001, le transport routier dit avoir supporté les coûts de la politique de délocalisation en versant des milliards à la RPLP. D'autres "tracasseries" n'ont pas pu résoudre le problème principal: les capacités ferroviaires sont insuffisantes en Allemagne et en Italie. "C'est là que ça freine le plus", a imagé M. Amstutz.

Par ailleurs, l'association rejette fermement le principe d'une bourse de transit alpin. L'Initiative des Alpes milite en faveur de ce mécanisme qui offrirait un financement supplémentaire pour les chemins de fer. Un Etat accorderait un nombre limité de droits de transit. Ces droits seraient négociés en ligne. Plus la demande serait forte, plus le prix serait élevé.

"Une bourse de transit alpin changerait la donne pour l'ensemble de la région alpine", affirme M. Pult, convaincu. Toutefois, le Conseil fédéral n'a jamais cherché à s'entretenir avec l'Union européenne à ce sujet. "Nous espérons que la nouvelle ministre des transports Simonetta Sommaruga attachera plus d'importance à la politique de transfert modal que Doris Leuthard", poursuit le socialiste grison.

Nouveaux combats

L'Initiative des Alpes souhaite aussi rester vigilante en ce qui concerne le deuxième tube du tunnel routier du Saint-Gothard, qui sera construit à partir de 2020. Ce nouveau tube ne doit être utilisé que pour la rénovation et la sécurité et non pour augmenter la capacité, comme le Conseil fédéral l'avait promis avant le référendum.

A l'avenir, les représentants de l'Initiative des Alpes souhaitent étendre leur mission de protection des Alpes aux conséquences négatives du trafic de transit. "Il est clair que le plus grand problème pour les Alpes est le changement climatique et la fonte de glaciers qui en découle", juge M. Pult.

L'Initiative des Alpes doit s'assurer que le trafic transalpin ne contribue pas de manière négative à la protection du climat ", conclut M. Pult, qui souhaite travailler à la réduction des émissions de CO2.

ats

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