La Liberté

Les tops et les flops de la Coupe du monde

Mondial 2014 • Les derniers matches de poules ont été disputés hier. L’occasion de tirer un premier bilan à mi-parcours avec les 10 «plus» et autant de «moins» de cette Coupe du Monde au Brésil. Une vue d’ensemble qui ne se limite pas qu’au terrain de jeu.

Toute la détresse de Sergio Busquets: l'Espagne, notamment, a manqué son Mondial. © Keystone
Toute la détresse de Sergio Busquets: l'Espagne, notamment, a manqué son Mondial. © Keystone

Emanuele Saraceno, Fortaleza

Publié le 27.06.2014

Temps de lecture estimé : 8 minutes

Jeudi s’est terminée la première phase de la Coupe du monde au Brésil, avec les derniers matches de poules des groupes G et H. Un Mondial qui avait suscité les pires craintes, surtout du point de vue de l’organisation et des contestations populaires à travers tout le pays. Il n’y a pas eu de révolution, mais tout n’est pas idéal non plus. Bilan à mi-parcours avec les dix «plus» et autant de «moins» pour l’événement le plus médiatique de la planète. Une vue d’ensemble qui ne se limite pas uniquement au terrain de jeu.

LES TOPS: Du Costa Rica à Sabri Lamouchi

Le Costa Rica: ce petit Etat d’Amérique centrale, presque deux fois moins habité que la Suisse, a créé la sensation du premier tour. Il a remporté haut la main le «groupe de la mort», renvoyant deux ex-champions du monde (Italie et Angleterre) à la maison prématurément.

La vitesse d’adaptation des Brésiliens: il y a eu de gros problèmes d’organisation, qui ont débouché aussi sur quelques violences, dans plusieurs villes-hôtes lors des premiers matches du Mondial. Les facilités dans les stades étaient aussi insuffisantes. Mais les Brésiliens ont très rapidement su corriger le tir en cours de route.

Les danses des Allemands: Thomas Müller entre dans la danse avec les Indiens Pataxos au camp de préparation des Allemands, à Santa Cruz Cabralia, rejoint par ses coéquipiers. C’était avant le match face au Portugal, remporté 4-0 avec…trois buts de Müller! Le Mondial peut aussi offrir un moment de partage.

Le jeu offensif: presque trois buts par match (contre 2,3 en 2010) et la plupart des équipes qui pensent à gagner avant de ne pas perdre. L’air du pays du «futebol samba» semble avoir réchauffé même les coaches les plus frileux. Attendons quand même la phase à élimination directe avant de nous réjouir outre mesure…

La fédération anglaise: «Nous ne voyons aucune raison de changer de sélectionneur. L’Angleterre a perdu de justesse ses deux matches et n’a pas démérité. Nous avons un programme prévu jusqu’en 2016 et nous nous y tiendrons.» Le président exécutif de la FA, David Bernstein, sait regarder au-delà des résultats. C’est rare et Roy Hodgson remercie.

Les Fan Fest: d’accord, les billets de match sont chers et pas faciles d’accès. Les organisateurs ont cependant su offrir une très attrayante solution de rempla- cement, gratuite, aux touristes. Mais surtout aux Brésiliens les plus démunis. Au rythme de samba, bien entendu.

France et Suisse: sur leur continent, les équipes américaines brillent de mille feux. Mexique, Costa Rica, Colombie, Brésil, Argentine, Uruguay et Chili se retrouvent en huitièmes de finale. Il manque à l’appel l’Equateur et le Honduras, devancés par la France et la Suisse dans leur groupe. Est-ce à dire que Tricolores et Helvètes sont irrésistibles ou que ces équipes sont les plus faibles parmi les qualifiées des Amériques ?

La cohérence de certains sélectionneurs: «Nous n’avons pas gagné la Coupe d’Afrique et nous n’avons pas franchi le premier tour du Mondial. J’en assume la responsabilité. Mon aventure à la tête de la Côte d’Ivoire s’arrête ce soir», a déclaré Sabri Lamouchi après la cruelle défaite de son équipe contre la Grèce. Malgré un contrat encore valable deux ans, Cesare Prandelli quitte l’Italie après l’élimination. Le président de la fédération, Giancarlo Abete, lui emboîte le pas. Il faut dire que, lui, en est à son deuxième échec consécutif à la phase initiale d’un Mondial.

La passion des Brésiliens: les manifestations et les violences ont grandement diminué dans le pays depuis le début de la Coupe du monde, remplacées par un esprit festif. Les problèmes ne sont pas résolus mais la pas- sion pour le ballon rond est trop forte.

Les stars au rendez-vous: Neymar, Messi, Robben, Benzema et aussi Shaqiri. Les joueurs les plus attendus n’ont pas déçu. A l’exception d’un Cristiano Ronaldo convalescent et de l’incorrigible Balotelli…

* * *

LES FLOPS: Des Espagnols à la pauvreté

Les Asiatiques: quatre équipes, aucune qualification, aucune victoire. L’Asie est peut-être la nouvelle place forte du football en termes de marketing, mais en ce qui concerne le jeu, on est très loin du compte.

L’hébergement: les prix des hôtels, un peu partout au Brésil, ont été multipliés par deux, trois voire dix dans certains cas (notamment à Rio) durant la compétition. Résultats: de nombreux supporters, surtout provenant d’Amérique latine, ont dormi où ils en avaient les moyens. A savoir: gares ferroviaires, routières, terrains vagues ou voitures.

Les pelouses: que ce soit à Sao Paulo, à Brasilia ou à Curitiba, des sélections n’ont pas pu s’entraîner la veille des rencontres dans les stades de la Coupe du monde pour ne pas abîmer les pelouses. Un comble au pays du soleil. Que ce serait-il passé si le Brésil subissait le même climat que Lucerne?

L’arbitrage: pas de véritables scandales, mais encore beaucoup trop d’approximations. Penalties litigieux sifflés, d’autres oubliés et surtout bien des imprécisions sur les hors-jeu. Bon, la FIFA ne veut toujours pas entendre parler d’arbitrage vidéo, alors…

Le monolinguisme: les Brésiliens ne s’expriment qu’en portugais. Pas seulement le peuple, mais aussi les taxis, les employés des hôtels, ceux des offices de tourisme… Un Nigérian qui vit aux Etats-Unis et a effectué une partie de ses études en France nous confiait: « J’ai rencontré plus de gens qui parlent anglais en Chine qu’au Brésil.» Aucun mal à le croire. On mesure mieux les immenses lacunes au niveau de la formation chez le géant sud-américain.

Les connexions internet: la téléphonie au sens large représente un des gros problèmes au Brésil. C’est cher, avec de multiples compagnies et des tarifs différenciés d’un Etat à l’autre. Pour internet, c’est encore pire. Le Wi-Fi est largement accessible, mais de piètre qualité. Si vous souhaitez visionner une vidéo, oubliez, aucune chance. Seules exceptions: les connexions dans les stades, excellentes. Merci la FIFA!

Les dents de Suarez: déjà sauveur de l’Uruguay en 2010 - lorsqu’il s’était sacrifié pour la patrie en mettant sa main afin d’éviter le but de la victoire du Ghana en quarts de finale - Luis Suarez a récidivé face à l’Angleterre, à Sao Paulo. Moins d’un mois après une opération au genou, il a signé le doublé décisif. Pourquoi diable ce champion ne peut-il réfréner ses instincts «cannibales»? Neuf matches et quatre mois de suspension ont sanctionné sa morsure sur l’épaule de l’Italien Chiellini.

La circulation: peu importe la ville, peu importe le jour, peu importe l’heure. Le trafic est infernal au Brésil. Il y a quelques années, pour relancer l’économie, le gouvernement a baissé les taxes sur les autos et facilité l’accès au crédit. Le nombre de voitures a explosé, sans que l’infrastructure routière suive. Le développement des transports publics est insuffisant aussi. De toute façon, il n’y a pas de couloirs de bus…

L’Espagne: «Nous n’étions prêts ni mentalement, ni physiquement pour défendre notre titre de champions du monde.» Le milieu de terrain espagnol Xabi Alonso a tout dit après la défaite face au Chili. Fin de cycle?

La pauvreté: elle est omniprésente - pas besoin de se rendre dans les favelas pour en mesurer l’ampleur - et prend différentes formes. Dans le centre de Sao Paulo, le nombre de sans-abri qui dorment dans les rues avec pour seul bien une vieille couverture fait froid dans le dos (et c’est le cas de le dire, vu les températures nocturnes dans la capitale économique du pays). Dans la plus touristique Fortaleza, la pauvreté se traduit par un développement de la mendicité, parfois insistante, surtout des enfants. Sans oublier la prostitution. Pas étonnant dans ces conditions que le Brésil soit un des pays les plus dangereux du monde. Durant le Mondial, la police veille. Mais après?

Articles les plus lus
La Liberté - Bd de Pérolles 42 / 1700 Fribourg
Tél: +41 26 426 44 11