La Liberté

Les hockeyeurs ont plein d'amis

«Bienvenue au club!» • Les joueurs et les membres de certains clubs, en période de play-offs, sont souvent harcelés. Dis, tu n'aurais pas deux places pour le match de samedi soir?

A Fribourg, cette saison, on ne connaît pas son bonheur: les sans-billets ne se bousculent pas, les fâcheux ne fâchent personne. © Aldo Ellena
A Fribourg, cette saison, on ne connaît pas son bonheur: les sans-billets ne se bousculent pas, les fâcheux ne fâchent personne. © Aldo Ellena

Pascal Bertschy

Publié le 05.03.2015

Temps de lecture estimé : 4 minutes

On sait que ce n'est pas drôle pour un hockeyeur de ne pas jouer les play-offs. Mais, gens de Fribourg-Gottéron, séchez vos larmes: une élimination peut avoir du bon. Elle permet, à cette période de l'année, d'échapper au bal des casse-pieds. 

Joueurs, mais aussi parents et copines de joueurs, dirigeants et membres de tel club, tous aux abris! Les séries font rage et électrisent toute la ville, toute la région. C'est à la patinoire que ça se passe, c'est donc là qu'il faut être. 

Les places sont comptées, la chasse aux billets est ouverte. Les joueurs se découvrent un tas d'amis. Du jour au lendemain, c'est une épidémie. 

Avec eux, le culot est roi 

Les copains, pas revus depuis le siècle dernier, se rappellent à votre bon souvenir. Avec eux, le culot est roi. C'est même à ça qu'on reconnaît les plus lourdingues: ils osent tout. 

– Allô, c'est toi champion?
– Oui.
– Salut, c'est Michel.
– Michel?
– Mais voui, souviens-toi, Michel Chamoulot: quand nous avions onze ans, nous étions dans la même classe…
– Ah d’accord, je vois. Si je te téléphone, champion, c'est parce que j'aimerais venir voir votre match de samedi. T'aurais pas deux places pour moi, des fois? Mais attention, hein: s’il le faut, je suis prêt à les payer...

En général, dans les villes où ça chauffe, les gens de hockey sont harcelés. Pourquoi se gêner? Qu’est-ce qu’on risque? Les demandent surgissent de tous les côtés. 

Même Lady Gaga serait battue!

En cas de finale Genève-Servette-Lausanne, mettons, bon courage aux gars des Vernets et de Malley! Ils compteraient soudain plus d’intimes, dans leur entourage, que Lady Gaga ne dénombre d’amis sur sa page Facebook

Pour sortir de leur condition de sans-billet, les sans-gêne sont prêts à tout. Leur mémoire est prodigieuse. Ils se souviennent tout à coup qu’ils connaissent le chef matériel, l’oncle de tel joueur ou simplement le supporter de base qui, lui, assiste à tous les matches et connaît la maniclette. Ça peut servir. 

A Fribourg et à Kloten, cette saison, on ne connaît pas son bonheur. Les sans-billets ne se bousculent pas, les fâcheux ne fâchent personne. Pour éviter les casse-pieds, une seule solution: se taper le tour de relégation.

On me dira que c’est facile de se moquer. Toi qui es journaliste, en plus, tu connais un monde fou, on t’invite partout et tu peux donc bien rire! On me la sert souvent, celle-là, et c’est si flatteur que je laisse dire. 

Tu dois parfois ruser, toi aussi, mais...

Ben oui, quoi! Tu tiens une chronique sur le site de «La Liberté» et cela suffit. Aux yeux de certains, tu es un baron que chaque club reçoit avec déférence. Inutile de leur expliquer que tu dois parfois ruser sans gloire pour obtenir une place, toi aussi, ils s’en attristeraient. 

Or il ne faut surtout pas décevoir son monde. Alors oui, les amis, c’est vrai: toi, le chroniqueur que voici, tu as partout ta place réservée. A Berne, à Bienne, à Genève et à Zurich comme ailleurs, tu te rends aux matches selon un rituel bien établi. 

Des hôtesses aux poitrines gonflées d’amour

Si, si! De belles hôtesses aux poitrines gonflées d’amour t’accueillent à l’entrée, petit sourire aux lèvres, sans cacher l’admiration qu’elles te vouent. Tout en jetant des pétales de rose devant toi, elles te conduisent en secteur V.I.P. 

Puis elles t’installent à ta place, où tu retrouves ces différentes petites choses qui font à chaque fois ta joie: une loge entièrement meublée de blanc et jonchée de fleurs fraîchement coupées.

Sans oublier un plat de fruits exotiques sans pépins, des bols de chips dont on a gratté délicatement le sel, et diverses boissons, dont des bouteilles de Romanée-Conti livrées dans la journée par un chauffeur venu exprès de Bourgogne. 

Voilà, bien que tu sois resté un gars au fond très simple, tel est l’aimable traitement auquel tu as droit si tu honores un club de ta grandiose présence. 

Ah si, je vous jure: en période de play-offs, certains gars ont une de ces imaginations!

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