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Comment la SSR vit sans TVA

Médias • La SSR facture une TVA à la Confédération pour ses prestations, qu’elle remet ensuite au fisc. Problème: elle ne peut plus compter sur la taxe sur la redevance.

Comment la SSR vit sans TVA
Comment la SSR vit sans TVA

Rachel Richterich

Publié le 13.10.2015

Temps de lecture estimé : 4 minutes

Economiser 40 millions de francs: tel est le vaste plan annoncé la semaine dernière par la Société suisse de radiodiffusion (SSR), avec à la clé la suppression de 250 postes (lire ici). Principale raison avancée: la dispense de la TVA sur la redevance. Explications.

Celui qui consomme est redevable d’une contribution financière à l’Etat. C’est en vertu de ce principe de base que la SSR paie, comme tout le monde, une taxe sur la valeur ajoutée (TVA) pour chacune des prestations qu’elle achète. «Qu’il s’agisse de matériel de bureau par exemple, ou de programmes de fiction, avec un pourcentage variable selon le produit acheté», explique Caroline Sauser, porte-parole de l’Office fédéral de la communication (OFCOM). Car, pour simplifier son prélèvement, une entreprise facture ses prestations au consommateur avec la TVA. Une fois prélevée, elle la reverse ensuite au fisc.

En tant qu’entreprise prestataire, la SSR facture elle aussi une TVA: «La Confédération achète ses prestations, elle paie donc une TVA de 2,5% sur ce produit, via l’OFCOM», précise Caroline Sauser. Un montant que le groupe audiovisuel doit ensuite reverser à l’Administration fédérale des contributions (AFC). Pour cela, il pouvait jusqu’au printemps dernier simplement reverser à l’AFC les 2,5% de TVA prélevés sur la redevance radiotélévision.

Droit à l’information

Tout a changé fin avril, avec la décision du Tribunal Fédéral (TF) d’interdire cette taxe TVA sur la redevance. Les juges ont estimé que la redevance de réception ne constitue pas une contrepartie d’une prestation fournie par la Confédération. Celui qui reçoit des programmes de radio et télévision exerce un droit constitutionnel, son droit à l’information. La redevance est désormais considérée comme une taxe que la Confédération perçoit pour pouvoir soutenir financièrement le groupe audiovisuel. Les conditions pour la soumettre à la TVA ne sont plus remplies.

Pour le particulier, la décision se traduit par une baisse de la redevance. Depuis le 1er mai, le bulletin de versement affiche 451 francs, au lieu de 462 francs. Pas de remboursement rétroactif en revanche, ce qui provoque l’ire des organisations de défense des consommateurs. Elles ont réitéré leur opposition hier, indiquant avoir reçu les factures de 4378 ménages, en vue d’une action collective pour récupérer les taxes perçues depuis 1995 sans base légale. En cas de refus, la Fédération romande des consommateurs (FRC) assure vouloir porter le cas au Tribunal administratif fédéral. Mais c’est bien à Billag, l’organe chargé de collecter la redevance et, à l’époque, la TVA, qu’elle adresse ces milliers de réclamations.

Un dommage de 35 mio

Pas à la SSR, qui doit, elle, continuer à facturer la TVA de 2,5% à l’OFCOM puis reverser l’impôt facturé à l’AFC, relève Simon Denoth, porte-parole du groupe audiovisuel. Sans pouvoir compter sur la taxe prélevée sur la redevance, une somme qui allait dans les caisses du fisc et est aujourd’hui entièrement à sa charge.

«La Confédération a estimé qu’il n’existe pas de base juridique justifiant qu’elle prenne elle-même en charge la taxe», explique Simon Denoth, porte-parole de la SSR. Et toute autre solution à court terme aurait requis une hausse de son budget par le biais d’un crédit supplémentaire. «Improbable en période d’austérité», relève-t-il. Le dommage pour l’entreprise se chiffre à 35 millions de francs. Conséquence: le plan d’économies annoncé mardi passé, des licenciements devenus inévitables et une réduction de l’offre. A noter encore que de facto, c’est toujours en grande partie la redevance, principale source de revenus de la SSR, qui finance cette TVA.

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Un rétablissement incertain

A peine abolie, cette TVA sur la redevance aurait pu automatiquement réapparaître dès fin 2018, début 2019 avec la nouvelle loi sur la radio et la télévision (LRTV). Acceptée en votation en juin, la révision comprend un volet sur la TVA (LTVA). Dans cette version modifiée, la LTVA considère la redevance radiotélévision comme une contre-prestation imposable et prévoit explicitement de la soumettre au taux réduit de 2,5%. C’était sans compter sur l’intervention du conseiller national PDC Martin Candinas. Le Grison a déposé début mai une initiative parlementaire pour supprimer cette disposition. Ce sera aux Chambres de trancher.

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