Ce rêve étrange et pénétrant
La Fondation Beyeler consacre sa nouvelle exposition au peintre américain Edward Hopper en portant une attention particulière à ses paysages. Le cinéaste Wim Wenders rend hommage à son regard
Elisabeth Haas
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Beaux-arts » Quel est le vrai sujet du tableau? Dans les œuvres d’Edward Hopper, la question se repose à chaque fois, lancinante. Non, cela ne peut pas être que la couleur rouge de la station-essence, que ces maisons modestement alignées, que ces rochers de granit. Ce que regarde la femme en robe rose, au loin, on ne le voit pas sur le tableau. Il y a toujours, dans les huiles de l’Américain, quelque chose qui nous échappe, une dimension qui dépasse le cadre. Le vrai sujet n’est pas dit, il se trouve au-delà de la ligne d’horizon, dans l’ombre des bois, dans ce qui ne s’offre pas au regard, là où l’on ne sait pas où la route peut bien mener.
Même dans les paysages, sur lesquels met l’accent la nouvelle exposition de la Fondation Beyeler, près de Bâle, il ne s’agit jamais d’une peinture réaliste. La question de ce que montre le tableau et du regard du spectateur est reformulée à chaque fois. Une tension vient habiter l’espace et le hanter. A partir de 1930 (mais il avait déjà