Le caméléon européen
Aussi populaire qu’insaisissable, Romain Gary entre dans La Pléiade. Il était temps, celui de relire son œuvre comme un désir d’Europe
Thierry Raboud
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Littérature » Posez un caméléon sur du rouge, il deviendra rouge. Sur du bleu, il deviendra bleu. Sur un tapis bariolé, il deviendra fou. A moins que. «Moi je ne suis pas devenu fou, je suis devenu écrivain», lance Romain Gary pour ponctuer cette fable qu’il affectionne. Caméléon à plumes: posé sur la mosaïque du siècle, il n’a cessé d’écrire ses métamorphoses.
Un insaisissable Je, toujours se rêvant autre. Il faudrait, pour l’appréhender, s’adonner au vertige d’une liste. Comme on ramasserait au sol les mues pythonesques de celui qui, né Roman Kacew à Wilno (l’actuel Vilnius) en 1914, se disait «bâtard juif russe, mâtiné de Tartare». Puis deviendra aviateur décoré, gaulliste inconditionnel, diplomate péremptoire, affabulateur polyglotte, fr