La Liberté

Douze ans d’adoration ininterrompue

A Fribourg, des fidèles de tous âges se relaient jour et nuit pour adorer le Saint-Sacrement. Témoignages

Joëlle Marie et William Frei, main dans la main pour organiser l’adoration perpétuelle en l’église des Cordeliers, à Fribourg.
Joëlle Marie et William Frei, main dans la main pour organiser l’adoration perpétuelle en l’église des Cordeliers, à Fribourg.
Le Saint-Sacrement dans l'église des Cordeliers de Fribourg. © Alain Wicht
Le Saint-Sacrement dans l'église des Cordeliers de Fribourg. © Alain Wicht

Pascal Fleury

Publié le 17.02.2018

Temps de lecture estimé : 6 minutes

Prière perpétuelle »   Tradition catholique millénaire, l’adoration eucharistique silencieuse peut sembler anachronique dans notre monde trépidant et bruyant. Depuis une bonne décennie, elle connaît pourtant un regain d’intérêt remarquable dans le monde.

En Suisse, la ville de Fribourg montre l’exemple avec une offre unique d’adoration perpétuelle: depuis plus de douze ans, des fidèles se succèdent 24 heures sur 24 et 365 jours par an en l’église des Cordeliers pour se recueillir devant le Saint-Sacrement. L’hostie consacrée, présentée dans un précieux ostensoir, est exposée le jour dans la chapelle Maximilien Kolbe et la nuit dans celle de la Vierge noire, en toute sécurité.

Besoin de sacré

Une bonne centaine d’adorateurs réguliers ou occasionnels, de tous âges et toutes conditions, se relaient pour assurer cette chaîne incessante de prière. La Fraternité Euchari­stein de Bourguillon vient en renfort en cas de désistements. L’organisation est assurée par un planning sur internet. L’adoration est bien sûr ouverte à toute personne désireuse de consacrer un instant au Seigneur, sans aucune inscription.

«Après Mai 68, les églises ont commencé à être désertées et à mourir. Mais les gens ont besoin de spiritualité et de sacré. Cela explique le renouveau de l’adoration aujourd’hui», observe Joëlle Marie Frei, coordinatrice de l’adoration perpétuelle depuis une année avec son époux William Frei. Pour l’ancien diplomate, ce regain d’intérêt s’explique aussi en raison du «grand désarroi qui frappe la société, le fléau de la solitude qui se propage malgré le développement des médias sociaux».

L’adoration offre alors une possibilité de rencontre avec Dieu, «présence réelle» dans l’eucharistie. «Elle permet de lui exposer nos joies et nos peines, à n’importe quelle heure, alors que la famille ou les amis ne sont peut-être pas toujours à disposition», précise-t-il. «On voit même des prostituées qui passent à l’adoration après leur travail. C’est très touchant», souligne Mme Frei.

Initiative laïque

Lancée à Fribourg le 19 octobre 2005 à l’initiative d’un groupe de laïcs mené par Charles-­Henri de Roten, avec le soutien de l’évêque du diocèse d’alors, Mgr Bernard Genoud, l’adoration perpétuelle remonte en fait «au temps de la construction des cathédrales», note le responsable fribourgeois. La solennité de la Fête-Dieu est établie en 1264, des «édicules eucharistiques» sont construits dans les sanctuaires pour exposer l’hostie, la dévotion des Quarante-Heures apparaît au XVIe siècle et des ordres religieux centrés sur l’adoration du Saint-Sacrement sont fondés au XIXe siècle. En 1881, le pape Léon XIII met en place un Congrès eucharistique international, qui existe toujours. A l’occasion de l’entrée en carême, le pape François vient encore de rappeler aux paroisses d’enseigner aux fidèles l’«adoration eucharistique en silence».

www.eucharistie.ch


 

Témoignages

Tiphaine Gareil

Mère de trois enfants

«Comme nous habitons le quartier du Bourg, je me rends régulièrement à l’adoration perpétuelle, mais sans être inscrite sur la liste des adorateurs. J’y vais quand je dois attendre la fin du cours de musique de mes enfants, par exemple. J’y vais aussi parfois s’il m’arrive d’être triste, si j’ai un souci ou quelque chose sur le cœur. Je reste 10 à 20 minutes, parfois un peu plus longtemps. Si j’ai le temps, je vais peut-être dire le chapelet. Parfois, un de mes enfants m’accompagne. Mon fils aîné, dix ans, aime bien s’y rendre. Je crois que c’est un moment de liberté intérieure pour lui. Pour moi, c’est l’occasion d’adorer Dieu, présence réelle bienveillante. Cela me permet aussi de quitter l’agitation du monde et tout ce qui peut assombrir mon cœur et mon âme. Je ressens une joie et une paix profonde. Je renouvelle mes forces à la source de l’Amour.»

 

Loris Musumeci

étudiant en philosophie et français

«Depuis mon arrivée du Valais, il y a deux ans et demi, je me rends régulièrement à l’adoration perpétuelle à Fribourg. J’essaie de m’inscrire au moins une heure par semaine, de préférence de nuit, lorsque le Saint-Sacrement se trouve dans la chapelle de la Vierge noire, très porteuse pour la prière. La nuit, j’ai aussi l’impression de vivre une plus grande intimité avec Jésus-Christ. Je fais l’effort de me lever pour passer un moment privilégié avec Lui. Cela me rend heureux et me donne du courage au quotidien. Si je n’y vais pas pendant quelques jours, je ressens que cela me manque. Etant jeune, sans attachement paroissial régulier, j’aurais vite tendance à oublier Dieu. L’adoration, c’est comme une piqûre de rappel. C’est aussi un point d’ancrage. Même si on est très occupé, le Seigneur est toujours là, 24 heures sur 24!»

 

Didier Berthod

Diacre et futur prêtre

«C’est ma rencontre avec la Fraternité Euchari­stein, à Bourguillon, dont je suis Frère consacré, qui m’a amené à découvrir l’adoration perpétuelle. J’y consacre une heure nocturne hebdomadaire, et une ou deux heures supplémentaires, s’il faut boucher des trous dans la grille de présence. Ma motivation est triple. L’adoration me permet de prendre part à un mouvement de prière communautaire, une «chaîne de prière» dans laquelle je peux inscrire ma propre prière. L’adoration, c’est aussi une forme de prière privilégiée pour intercéder pour le monde et la paix. Enfin, l’adoration correspond tout à fait à ma vision de la spiritualité chrétienne: elle est un chemin pour devenir un chrétien accompli, un saint, un être transfiguré. L’adoration transfigure l’homme, comme la chenille qui devient papillon.» PFY


 

Programme

Conférence d’un exorciste

Le chanoine Jean-Pascal Duloisy, exorciste des diocèses de Paris et d’Ile-de-France, donnera une conférence le 20 février à 20 h au Christ-Roi à Fribourg. Il animera aussi la messe festive de l’adoration perpétuelle, le 21 février à 19 h aux Cordeliers.

Activités

L’adoration perpétuelle participera aux 24 Heures pour le Seigneur les 9 et 10 mars, aux JMJ nationales du 27 au 29 avril et à la Fête-Dieu.

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