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Le pillage du Venezuela via la Suisse

Des proches du gouvernement ont détourné des fonds qui sont passés par les banques helvétiques

Les enquêtes du Département américain de la justice ne se limitent plus au pouvoir de Hugo Chavez et menacent maintenant l’actuel chef de l’Etat, Nicolas Maduro (moustache). © Keystone-archives
Les enquêtes du Département américain de la justice ne se limitent plus au pouvoir de Hugo Chavez et menacent maintenant l’actuel chef de l’Etat, Nicolas Maduro (moustache). © Keystone-archives

François Pilet, swissinfo

Publié le 19.12.2018

Temps de lecture estimé : 2 minutes

Criminalité financière » Surnommés les «boliburgués», ces puissants hommes d’affaires vénézuéliens auraient détourné plus d’un milliard de dollars des caisses publiques, en partie pour financer leur train de vie fastueux aux Etats-Unis.

Ainsi, Alejandro Andrade, un ancien garde du corps de Chavez, nommé ministre des Finances en 2007, a plaidé coupable de corruption le 19 novembre dernier. Basé en Floride, où il possédait un ranch de chevaux de course, l’ancien fonctionnaire vénézuélien a écopé de 10 ans de prison.

Les documents judiciaires consultés par la lettre judiciaire suisse Gotham City montrent à quel point les «boliburgués» dépendaient des banques suisses pour commettre leurs méfaits.

Neuf banques

A lui seul, Alejandro Andrade contrôlait 17 comptes dans neuf banques suisses, parmi lesquelles HSBC, Julius Baer, Credit Suisse, la Compagnie bancaire helvétique à Genève ou encore la PKB de Lugano.

En plaidant coupable, l’ex-ministre a accepté que l’ensemble de ses comptes soient bloqués et leurs contenus transférés à la justice américaine. Les montants saisis n’ont pas été révélés.

L’ancien ministre des Finances a reconnu avoir reçu des pots-de-vin à hauteur de dizaines de millions de dollars. En échange, il a prêté son concours au détournement de plus d’un milliard de dollars de fonds publics par un groupe d’hommes d’affaires.

Montres de luxe

Parmi eux, le magnat vénézuélien des médias Raul Gorrin, lui aussi amateur de comptes suisses. Propriétaire de la chaîne vénézuélienne Globovision, il versait des pots-de-vin au ministre directement depuis son compte personnel chez HSBC Private Banking (Suisse) SA à Genève. Raul Gorrin a également été inculpé le mercredi 20 novembre 2018 par la justice américaine.

Les actes d’accusation d’Alejandro Andrade et de Raul Gorrin révèlent que l’ancien ministre ne se contentait pas de recevoir des millions à Genève, Zurich et Lugano.

Depuis son compte chez HSBC, le magnat Raul Gorrin prenait également en charge les soins vétérinaires de ses chevaux de course – il en possédait 17 – et réglait pour lui les frais de trois jets privés et d’un yacht.

L’ex-ministre de la «Révolution bolivarienne» de Hugo Chavez était également féru de montres suisses de luxe. Il en possédait 34, dont 8 Hublot, 5 Franck Muller et 4 Audermars Piguet.

Maduro menacé

Raul Gorrin aurait poursuivi ce schéma de corruption après le départ d’Alejandro Andrade en soudoyant la ministre Claudia Diaz, qui lui avait succédé. Ancienne infirmière de Chavez, elle avait été nommée à ce poste par ce dernier en 2011.

Inculpée aux Etats-Unis, elle fait aujourd’hui l’objet d’une demande d’extradition depuis l’Espagne, où elle réside avec son mari, lui aussi un ancien garde du corps de l’ex-président aujourd’hui décédé.

Les enquêtes du Département américain de la justice ne se limitent plus au pouvoir de Hugo Chavez et menacent maintenant l’actuel chef de l’Etat, Nicolas Maduro.

Raul Gorrin avait rencontré le vice-président des Etats-Unis, Mike Pence, fin 2017. Selon le Miami Herald, l’homme d’affaires tentait de négocier la sortie du pouvoir de Nicolas Maduro en échange d’un abandon des poursuites américaines contre lui et les boliburgués.

Ces efforts n’ont visiblement pas eu le succès escompté.

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