La Liberté

Faux pas, faut pas!

Faux pas, faut pas!
Faux pas, faut pas!

Yves- Alexandre Thalmann

Publié le 23.07.2021

Temps de lecture estimé : 2 minutes

Opinion

Les réseaux sociaux promettaient la libération autant que la libéralisation de la parole. Grâce à eux, tout le monde pourrait donner son avis, non plus seulement les personnes autorisées, les prétendus experts. Une révolution souhaitable pour le bien de chacune et chacun.

Sauf que la réalité est bien différente. L’hégémonie de la parole libre et libérée se traduit paradoxalement par une crainte de s’exprimer et une autocensure de plus en plus marquée. En effet, le moindre faux pas, ou ce qui pourrait être interprété comme tel, peut donner lieu à un lynchage en règle sur le Net tant le terrain des idées est aujourd’hui miné. Chaque parole, chaque tweet, chaque image postée peut déclencher une déferlante de violence et de haine. J. K. Rowling, la maman d’Harry Potter, en a fait les frais récemment pour avoir ironisé au sujet d’un titre d’article où il était question «des personnes ayant leurs règles». Pour elle, il suffisait de dire: des femmes. Mal lui en a pris: plus d’un million de tweets virulents en réaction à ce propos jugé discriminatoire… Pensons aussi à l’actrice Catherine Deneuve qui a eu le malheur de signer, avec une centaine d’autres femmes, une tribune dans le journal Le Monde considérant que «la drague insistante ou maladroite n’est pas un délit, ni la galanterie une agression machiste». Ou encore l’acteur français Omar Sy, rendu célèbre pour son rôle mémorable dans le film Intouchables, accusé de racisme suite à une vidéo humoristique dans laquelle il imitait l’artiste africaine Aya Nakamura.

A chaque fois, c’est le même scénario qui se répète: des personnes touchées dans leur sensibilité réagissent à vif sur les réseaux sociaux, créant un effet boule de neige qui a tôt fait de susciter un tollé. Résultat: la parole qui se voulait libérée se trouve de plus en plus censurée, non pas par une instance gouvernementale ou religieuse externe, mais par les individus eux-mêmes qui en sont à l’origine. On préfère se taire et ne plus s’exposer que risquer l’opprobre et la vindicte populaire pour un mot de travers ou une idée qui pourrait déplaire à certains et certaines ou, pire, les offusquer. Qui peut supporter sans états d’âme de se faire blâmer, critiquer vertement, dénigrer, voire menacer par des centaines ou des milliers d’inconnus?

Les réseaux sociaux nous promettaient un espace de parole où chacun pourrait s’exprimer librement. Il semble que ce projet relève d’une utopie cachant une réalité bien plus prosaïque: ce qui pourrait déplaire ne serait-ce qu’à une poignée de gens doit absolument être tu, au risque de générer une campagne de dénigrement difficile à encaisser. En embuscade derrière les likes gratuits, marques de mépris et commentaires humiliants sont toujours prêts à être dégainés au moindre faux pas, rendant la tâche des influenceurs et autres Youtubeurs délicate et risquée. C’est sans doute une des raisons qui poussent de plus en plus d’internautes à déserter des réseaux ouvertement antisociaux et à fermer leurs comptes… Rideau!

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