«Il faut susciter l’envie de partager»
Le Prix du dialogue interreligieux récompense deux membres de la Plateforme interreligieuse de Genève
Joël Burri, Protestinfo
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Distinction » Un parcours dans le Musée d’ethnographie de Genève à la découverte des objets du sacré, la publication dans plusieurs langues de Neuf propositions pour vivre ensemble et se respecter dans la diversité religieuse, l’organisation de rallyes interreligieux et une collaboration avec un module de formation de la Haute Ecole de travail social de Genève pour aborder les questions de spiritualité avec les futurs professionnels de l’action sociale: depuis 25 ans, la Plateforme interreligieuse de Genève s’engage en faveur du dialogue interreligieux. Deux membres de son comité recevront mardi à Berne des mains d’Alain Berset, président de la Confédération, le Prix du dialogue des juives et des juifs de Suisse.
Le président de la plateforme Eric Ackermann et son trésorier Maurice Gardiol seront les deux récipiendaires de ce prix remis pour la première fois et qui récompense des «personnalités qui contribuent de manière significative à la cohésion de la société et à la paix confessionnelle dans notre pays», rappelle le communiqué des organisateurs. Côté alémanique, un imam et un rabbin seront aussi récompensés.
Plateforme interreligieuse
Eric Ackermann est animateur socioculturel et guide spirituel en EMS. Il est également délégué rabbinique. Maurice Gardiol quant à lui est diacre retraité de l’Eglise protestante de Genève. Il préside le Conseil de l’aumônerie œcuménique des prisons. Il a consacré une partie de sa vie professionnelle au domaine de l’accueil des migrants et de l’intégration.
«Nous aurions préféré, Eric Ackermann et moi, que ce prix soit attribué à la Plateforme interreligieuse, plutôt qu’à nous en tant que personnes, note d’emblée Maurice Gardiol. Nous nous inscrivons dans une démarche qui implique d’autres partenaires. Si nous avons malgré tout accepté ce prix, c’est que nous y voyons une reconnaissance de la démarche du dialogue interreligieux par les juifs de Suisse», précise le diacre.
La modestie est toujours de mise quand on demande au retraité de présenter le travail de la Plateforme interreligieuse. «Nous sommes une ressource possible pour les personnes et les institutions qui souhaitent approfondir la question du dialogue interreligieux, explique Maurice Gardiol. Et l’on n’a pas le monopole! Il y a différentes structures qui sont actives sur la question du dialogue entre les cultures», précise-t-il.
Offrir une expertise
Concrètement, la plateforme travaille sur différents axes: offrir une expertise au service des institutions confrontées à des questions liées à l’interreligieux, valoriser la multiplicité de la religion dans la cité, promouvoir la curiosité de la population pour les différentes cultures, encourager les communautés religieuses à soigner la pédagogie qu’elles mettent en œuvre quand elles accueillent des visiteurs, et faire de la question du dialogue interreligieux une question engageant l’entier de la communauté et non seulement quelques responsables.
«J’en arrive de plus en plus à la conviction que ce que nous avons vécu dans le cadre du dialogue œcuménique doit nous servir dans le dialogue interreligieux, explique Maurice Gardiol. Bien sûr, il y a beaucoup d’obstacles. Mais même si certains disent que l’on est des naïfs et que l’on nie les difficultés, cela ne me décourage pas. Nous voyons bien tous ces problèmes, mais moi qui suis descendant de Vaudois du Piémont, je me dis que si, il y a un siècle, on avait dit qu’un jour un pape demanderait pardon aux Vaudois, personne ne nous aurait crus!», compare le diacre. Eric Ackermann complète: «Je ne pense pas être un utopiste, je pense être un idéaliste!»
Aller vers l’autre
«A Genève, nous avons la chance d’avoir beaucoup de bonnes volontés, je crois qu’ensemble nous pouvons faire rejaillir une espérance collective. Il faut susciter l’envie de partager», espère Eric Ackermann. «Les religions ont tendance à se replier sur elles-mêmes, cela n’a pas de sens! Je ne sais pas ce qu’est Dieu, ce que je sais, c’est que l’homme est à l’image de Dieu, donc quand je vais vers l’autre, je me rapproche de Dieu», complète celui qui avoue que son engagement dans le social est lié au fait qu’il «ne peut concevoir la religion qu’au travers du souci de l’autre».
«Cela va être de plus en plus une nécessité de dialoguer et de relier. Je ne sais pas quelle forme cela prendra, mais je crois que Genève est un lieu pilote du dialogue interreligieux, de par le fait que cette démarche existe depuis plus de 25 ans, et de par la présence du Conseil œcuménique des Eglises et des organisations internationales. Il y a un chantier formidable là, devant nous», s’enthousiasme Maurice Gardiol.
Plateforme interreligieuse de Genève: www.interreligieux.ch
Le dialogue interreligieux en Suisse: http://dialogue.interreligieux.ch
Le Prix du dialogue des Juifs de Suisse
Remis pour la première fois ce mardi 29 mai à Berne, en présence du président de la Confédération Alain Berset, le Prix du dialogue des juifs de Suisse récompense en Suisse allemande et en Suisse romande des personnes qui ont favorisé les échanges entre religions et en particulier entre «jeunes gens juifs et non-juifs». Le projet «Likrat: jeunesse et dialogue», qui consiste à former des adolescents juifs afin qu’ils puissent intervenir dans des classes pour présenter leur foi, sera également célébré lors de cette soirée.
«Du côté de la Plateforme interreligieuse, nous voyons aussi un message réjouissant de la part des organisations juives pour encourager le dialogue interreligieux au sein de leur propre communauté, analyse Maurice Gardiol. Une des choses que je trouve importantes dans la tradition juive c’est le «Souviens-toi!» Souviens-toi que tu as été exilé. C’est une des clés si nous voulons aujourd’hui aller à la rencontre des gens qui vivent des exils et qui sont dans ce processus pour trouver leur place dans notre pays.» JB/Protestinfo