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Qui sont les femmes kamikazes?

Attentats de Paris • Des centaines de femmes ont rejoint au cours ces dernières années les «terres de jihad», syrienne ou irakienne, mais rares étaient celles qui avaient choisi la voie du martyre, relève le quotidien libanais «L'Orient-le Jour» dans une analyse.

Pour les musulmans, le phénomène des femmes kamikazes est d'autant plus condamnable que ce n'est pas le rôle qui leur est culturellement attribué. © Keystone
Pour les musulmans, le phénomène des femmes kamikazes est d'autant plus condamnable que ce n'est pas le rôle qui leur est culturellement attribué. © Keystone

Cath.ch

Publié le 19.11.2015

Temps de lecture estimé : 3 minutes

La religion musulmane condamne en principe formellement le suicide. Pour les musulmans, le phénomène des femmes kamikazes est d'autant plus condamnable que ce n'est pas le rôle qui leur est culturellement attribué, explique à l'AFP Fatima Lahnait, chercheuse et auteure du rapport «Femmes kamikazes, le jihad au féminin», publié par le Centre français de recherche sur le renseignement (CF2R). «Mais cela a été régulièrement contourné, notamment par les Libanais, les Palestiniens, al-Qaïda ou les Tchétchènes», souligne-t-elle.

15% de femmes kamikazes

En 1985 une Libanaise de 16 ans, Sana Mhaidly, précipite sa voiture piégée contre un convoi israélien, tuant deux soldats. Elle est la première d'une longue liste de femmes candidates au martyre dans son pays, mais aussi en Israël, Turquie, Inde, Pakistan, Ouzbékistan, Tchétchénie, Irak, rappelle le quotidien libanais.

A partir de cette date et jusqu'en 2006, «plus de 220 femmes kamikazes se sont sacrifiées, ce qui représente près de 15% du total des kamikazes recensés», précise la chercheuse dans son rapport.

Parmi elles figure l'Irakienne Sajida al-Rishawi, qui avait tenté en novembre 2005 de se faire exploser parmi les convives d'une noce palestinienne dans un grand hôtel d'Amman, la capitale de la Jordanie. Les chefs d'al-Qaïda, qui la considéraient comme une héroïne, demandaient sa libération. Après la mort du pilote jordanien Maaz al-Kassasbeh, capturé et brûlé vif dans une cage par l'Etat islamique (EI), elle a été pendue en février.

Fillettes utilisées comme bombes humaines

C'est actuellement le groupe djihadiste nigérian Boko Haram qui a le plus recours aux femmes kamikazes. Pas plus tard que le 18 novembre 2015, au moins 15 personnes sont mortes, à Kano dans le nord du Nigeria, dans un attentat vraisemblablement perpétré par deux «femmes bombes».

Les djihadistes vont jusqu'à envoyer dans des marchés surpeuplés des fillettes dont la plus jeune avait sept ans, qui sont parfois handicapées mentales ou encore droguées. Dans ce cas, les chefs gardent souvent le contrôle de l'explosion de la charge, qu'ils déclenchent à distance par téléphone. Le degré de consentement de ces kamikazes est sujet à controverse. Ainsi, pour Marc-Antoine Pérouse de Montclos, chercheur à l'Institut de recherche pour le développement (IRD) interrogé par l'AFP, «ce sont surtout des femmes ou des enfants, des fillettes, qui vengent la mort de leurs maris ou de leurs pères, tués dans des affrontements avec l'armée nigériane».

Des actes de vengeance?

La vengeance, la perte d'un parent est également souvent à l'origine de la motivation des kamikazes tchétchènes, les fameuses «veuves noires», qui ont fait des dizaines de victimes. Mais toutes ne sont pas djihadistes: les Tigres Tamouls au Sri Lanka, ou encore le PKK kurde, souvent présenté comme un modèle d'émancipation féminine et un rempart contre l’EI, ont eu recours à des femmes kamikazes.

Si les imams des groupes djihadistes promettent aux candidats au martyre les délices du paradis, notamment les fameuses 72 vierges, rien de tel pour les femmes kamikazes: «Ce qu'on peut leur promettre, c'est de retrouver au paradis un être cher, un mari disparu, par exemple», précise Fatima Lahnait.

=> Notre dossier «Attentats du 13 novembre à Paris»

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