La Liberté

La Lune, un hub pour les astronautes

Une nouvelle station spatiale en orbite lunaire servira de plateforme pour les missions sur la Lune et Mars

Film documentaire disponible au bas de l'article

Base lunaire construite avec imprimante 3D. © ESA/Image de synthèse
Base lunaire construite avec imprimante 3D. © ESA/Image de synthèse
Vue artistique de la station orbitale Gateway. A gauche, le vaisseau spatial Orion, qui peut accueillir quatre astronautes et mettre sur orbite lunaire divers modules de la plateforme. Le module Habitat se trouve au centre (avec cargo latéral). Le module Esprit est le cube jaune. © NASA/DR
Vue artistique de la station orbitale Gateway. A gauche, le vaisseau spatial Orion, qui peut accueillir quatre astronautes et mettre sur orbite lunaire divers modules de la plateforme. Le module Habitat se trouve au centre (avec cargo latéral). Le module Esprit est le cube jaune. © NASA/DR

Pascal Fleury

Publié le 02.11.2018

Temps de lecture estimé : 8 minutes

Conquête spatiale » L’approche du 50e anniversaire du premier pas de l’homme sur la Lune semble donner des ailes aux agences spatiales. Après avoir longtemps dédaigné notre satellite naturel, elles ont lancé un ambitieux projet de station spatiale en orbite lunaire. Appelée Gateway, cette plateforme servira à la fois de laboratoire et de hub pour les futures missions habitées vers la Lune, Mars et les astéroïdes. Les explications du Français Aurélien Pisseloup, chef de projet chez Airbus pour le module Esprit de la nouvelle station lunaire, un contrat de l’Agence spatiale européenne.

Comment expliquez-vous ce regain d’intérêt pour la Lune?

Aurélien Pisseloup: Depuis quelques années, un groupe de travail international, qui rassemble toutes les grandes agences spatiales, édite une Feuille de route pour l’exploration, afin de coordonner les efforts de chacun et de déceler les synergies possibles. Ce groupe est arrivé à la conclusion que le dénominateur commun, c’était la Lune. C’est un consensus. Travailler ensemble permet d’être plus efficace et plus rapide. L’idée n’est plus de conquérir la Lune, comme lors des missions Apollo, mais de s’y installer de manière durable, soit en orbite, soit sur la surface. Un défi passionnant!

Le projet Gateway (ou Lunar Orbital Platform Gateway) de la NASA a été lancé l’an dernier. Quel est son objectif scientifique?

Cette ministation spatiale internationale, qui tournera autour de la Lune, a les mêmes contributeurs que la Station spatiale internationale (ISS). Son objectif est de préparer les missions habitées éloignées de notre planète en vue de la conquête de Mars. La plateforme Gateway se trouvera beaucoup plus loin de la Terre que l’ISS. Une implantation durable en orbite lunaire permettra de tester les capacités de l’homme à s’adapter à un tel environnement et à un isolement qui pourrait durer plus de trois ans pour un voyage sur Mars. Gateway permettra aussi d’expérimenter les technologies, procédures et protocoles de gestion des risques en espace lointain. Des systèmes permanents y seront installés pour étudier la Lune et s’y implanter. La Lune sera ainsi le marchepied pour aller sur Mars.

Quelle est la contribution européenne à ce projet?

L’Agence spatiale européenne (ESA) travaille sur deux des modules de la station Gateway, nommés Habitat et Esprit. Pour leur conception, elle a mis en concurrence deux consortiums pour chaque module, menés par Airbus Defence and Space et Thales Alenia Space. Le cahier des charges est commun. Nous en sommes à la phase de faisabilité et de design, qui a démarré en juin et se clôturera en août 2019. L’objectif est de préparer le dossier de développement des deux modules. Il sera soumis aux Etats membres lors de la Conférence ministérielle de l’ESA de novembre 2019.

Vous êtes chef de projet du module Esprit chez Airbus. A quoi est-il destiné?

Esprit est un module (cube jaune sur l’image) à trois fonctions. C’est un sas scientifique, avec rail et portes pressurisées, pour faire entrer et sortir des charges utiles et du matériel d’expériences. Il comprend aussi des réservoirs de plus d’une tonne de carburant (hydrazine et xénon) destiné à alimenter le module voisin, l’Elément de puissance et de propulsion (en rouge), qui fournit en courant électrique toute la station, pour une autonomie de plusieurs mois. C’est enfin un module de télécommunication avec la Terre, la Lune et les véhicules de transfert, comme le remorqueur Orion de la NASA, cette capsule spatiale dont l’ESA fournit le module de service.

Quelles seront les particularités du module cylindrique Habitat?

Il est plus petit que les modules habités de la Station spatiale internationale (ISS), mais d’un diamètre similaire à celui du laboratoire européen Colombus de l’ISS. Il est prévu pour accueillir quatre astronautes en toute sécurité pour des missions de longue durée. L’objectif principal n’est pas le confort, mais il sera équipé de technologies beaucoup plus modernes que l’ISS. Pour la conception des deux modules européens, nous pouvons nous baser sur de précédentes réalisations, comme le véhicule automatique de transfert européen (ATV), le laboratoire Colombus ou le module de service européen d’Orion.

Quand la station Gateway sera-t-elle opérationnelle?

Le module de puissance et propulsion (PPE) sera lancé en 2022 et entrera en fonction fin 2023. Les autres modules suivront à raison d’un par an. Le premier vol habité avec le remorqueur Orion est prévu pour 2023. Des équipages pourraient donc occuper la station dès la même année. Contrairement à l’ISS, Gateway ne sera pas constamment habitée. L’homme pourrait remettre le pied sur la Lune vers 2030.


 

La vision d’un «Village lunaire» permanent

Le Moon Village, imaginé par l’ESA, pourrait être couplé à la station orbitale Gateway.

L’idée d’un «Village lunaire» a été lancée en 2015 par le directeur de l’Agence spatiale européenne (ESA) Jan Wörner. Il ne s’agit pas d’un site de vacances pour milliardaires – même si des vols touristiques ne sont pas exclus – mais bien d’une nouvelle station spatiale permanente qui pourrait succéder à la Station spatiale internationale, qui arrivera en fin de course dans les années 2025.

Couplée à la station orbitale Gateway, cette base lunaire, qui intéresse déjà la Russie, le Japon et la Chine, abriterait des laboratoires ouverts à tous les pays. Elle pourrait être située aux pôles, où la présence de glace en surface a été confirmée en août par la NASA, ou sur sa face cachée, où un radiotélescope pourrait être installé à l’abri des émissions radio de la Terre. Sa construction pourrait bénéficier des nouvelles technologies d’impression 3D.

Si le projet de base lunaire reste encore très hypothétique et controversé, diverses recherches sont déjà menées pour sa concrétisation à l’horizon 2030. Des missions de récupération d’échantillons de roches lunaires sont étudiées ainsi que des possibilités de production d’énergie à partir de ressources extraites in situ. La station Gateway offrira un hub pour les équipages venant de la Terre et devant emprunter un véhicule adapté à l’alunissage. Elle permettra aussi de piloter des robots à distance.

Pour encourager cette course technologique à la Lune, un concours international a été lancé en octobre, lors du Congrès international d’astronautique à Brême (D). Soutenu par plusieurs agences et sociétés spatiales, dont Blue Origin, du PDG d’Amazon Jeff Bezos, The Moon Race est destiné principalement aux étudiants, start-up et PME. PFY

HISTOIRE VIVANTE

Radio: Ve: 13 h 30

Doc TV: Opération Lune (remastérisé) Di: 21 h 05

 


 

Ruag Space partenaire

La société suisse RUAG Space est un «partenaire important d’Airbus Defence and Space pour le projet de module Esprit de la future station orbitale lunaire Gateway», souligne le chef du projet chez Airbus, Aurélien Pisseloup. «Nous sommes chargés du développement de la structure et du sous-système thermique du module Esprit», confirme Peter Guggenbach, CEO de RUAG Space, qui compte 1300 collaborateurs dans six pays. Récemment, RUAG Space a aussi livré des structures pour le rover et le module porteur de la mission ExoMars 2020. PFY


 

Opération lune

 Les images d'Armstrong foulant le sol lunaire ont-elles été tournées dans un studio d'Hollywood par le cinéaste Stanley Kubrick? Dans ce docu-menteur, le réalisateur William Karel nous démontre que l'on peut faire croire n'importe quoi, en truquant habilement des images d'archives authentiques. Entre mensonges et vérités, ce film mêle faits réels et inventés, grâce à de vrais témoins dans leur propre rôle. Avec au bout du compte un vrai-faux documentaire drôle, incroyable, et pourtant totalement plausible!

 

 

 

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